La grande place financière est, pour des jours, prise dans la fièvre de ce sport. C'est fou ce que le football peut susciter comme passion. Il n'y a que cette discipline et l'équipe nationale qui la pratique qui peuvent mettre un pays, qu'il soit riche ou pauvre, dans un état extrême de liesse mais aussi... de stress. Ce que nous avons vécu mercredi soir ici à Francfort est l'un de ces épisodes qui restera à jamais gravé dans notre mémoire. Ce n'était pourtant que Francfort, c'est-à-dire l'une des 12 villes retenues pour accueillir les matches de ce Mondial mais pas cet Allemagne-Pologne qui a poussé les Allemands à communier autour de leur équipe nationale et à la soutenir comme l'auraient fait des parents pour leurs enfants appelés à passer un examen ou n'importe quelle épreuve dont l'issue décide de leur avenir. On imagine que Dortmund, la ville qui a accueilli ce match, a dû dépasser en ambiance toutes les autres villes d'Allemagne. Il a fait chaud mercredi dernier à Francfort et dans les deux sens que le terme suppose. Chaud par la température ambiante qui a fait monter le mercure à près de 33 degrés Celcius. Chaud par l'ambiance qui régnait dans les rues de la première cité financière d'Europe. Une ambiance particulière que l'on a bien sûr retrouvée au niveau de la Hauptbanhof, la gare centrale de Francfort tant il est connu que les gares et tout ce qui se trouve aux alentours sont toujours animés. La Munchener Strasse est une rue piétonnière qui court de la gare jusqu'à la place Willy Brandt. Une rue où les bistros et restaurants sont innombrables. D'autres espaces sont occupés par des kiosques installés là pour la période de la Coupe du monde, des kiosques qui vous servent des spécialités culinaires propres aux 32 pays participant à cette Coupe du monde. Le plus significatif est que tous ces endroits qui vous vendent boissons et nourriture ont sorti la grosse artillerie pour vous faire vivre le Mondial. Chacun d'eux y est allé de son grand écran plat LCD pour permettre à ses clients de ne rater aucune miette du spectacle footballistique que la télévision retransmettait. Et l'on peut dire qu'il a été à la hauteur de l'événement. Un match haletant qui a dû déclencher des décharges d'adrénaline difficilement supportables pour les organismes. C'est que l'équipe d'Allemagne a souffert le martyre avant de l'emporter à un instant où le match nul ne faisait plus de doute. Malgré une domination de tous les instants, l'équipe allemande a largement sué pour sauter le verrou polonais. Chaque offensive des camarades de Ballack était suivie de la voix par ses supporters qui n'avaient que la télévision pour suivre leur évolution. Pendant la rencontre, il était rare de voir circuler des voitures. Tout Francfort était «vissé» devant son petit écran. Jusqu'au dernier instant, ces supporters y ont cru malgré la formidable résistance des Polonais et de leur très bon gardien. En choisissant d'incorporer Odonkor puis Neuville en fin de match, le coach allemand Jurgen Klinsmann a flairé le bon coup puisqu'au moment où on venait d'entamer le temps additionnel, c'est sur une action de ces deux joueurs (centre du premier et reprise du second) que l'équipe allemande a fini par inscrire le but de la victoire, celui de la qualification aux 8es de finale. On vous laisse imaginer comment ce but a été accueilli par les milliers de fans de la Manschaft notamment ceux qui résident à Francfort. Cette ville a vécu un mercredi soir de folie dans une liesse qui a débuté juste après le coup de sifflet final du match. Ceux qui étaient dehors ont été rejoints par les milliers d'autres qui ont choisi de suivre le match chez eux. Les défilés de voitures ont alors envahi les rues dans un concert de klaxons assourdissant. Partout, on chantait et on dansait à la gloire de Deutschland et de son équipe nationale. Oliver Neuville, l'auteur du but contre la Pologne est devenu, pour sa part, un héros. Toutes les télévisions allemandes n'ont pas cessé de rediffuser l'action du but suivie d'un portrait du joueur. Il est maintenant acquis que cette Manschaft va tenir en haleine tout un peuple assez longtemps et on n'ose imaginer ce qu'une défaite de sa part pourra générer comme déception. Les gens que nous avons rencontrés sont persuadés que leur équipe ira très loin et ce, même après l'avoir vue peiner pour s'imposer face à une formation polonaise réduite à 10 éléments. Jusqu'aux 8es de finale, au moins, l'Allemagne est promise à vivre des instants de grande intensité émotive.