Il y a trente et un an et quelques jours, Med Chérif Ould El Hocine avait acquis un terrain à l'APC de Chéraga en vue d' y aménager une unité de production de plaques de signalisation. Il y a trois jours (mardi), Hadj Ould Hocine comparaît devant la section pénale de Chéraga pour faux et usage de faux, en compagnie de sa fille. Depuis mai 1975 à juin 2006, que d'eau et d' «oh!» ont coulé sous les ponts des coups bas. De propriétaire de l'Epsr, son enfant, Ould El Hocine se retrouve inculpé et de quelle inculpation! Pour le tenir en respect, on doit le faire condamner afin que les méchancetés, la vilenie, la lâcheté, le lâchage par les compagnons de lutte, de toutes les luttes, règnent en maître des lieux. Spolié, voilà Ould El Hocine inculpé.Va-t-il être condamné? Nous allons le savoir lorsqu'il sera appelé à la barre par Debouzi Houria, la juge du pénal. Le trio de défenseurs de Ould El Hocine est décidé à faire triompher la vérité. Maître Fadel, Mentalecheta et Houadjbi attendent le bon moment. Me Mentalecheta transmet des questions préjudicielles et en fait aussi lecture. Après quoi, l'avocat semble entrer dans une colère qui ne dit pas son nom. «Une plainte a été déposée en 2003 contre l'actuelle partie civile pour faux et usage de faux. Nous n'avons pas compris pourquoi la plainte de 2004 est passée devant celle de 2003». Juste après, la juge demande à Ould El Hocine de s'expliquer autour de cette inculpation. Et comme on dit chez nous, «ne demandez jamais à une lanceuse de youyous, de youyouter». La présidente semble être au fait du dossier. L'inculpé est ravi qu'enfin, après Fella Ghezloune, la juge d'El Harrach (Cour d'Alger), Houria Derbouzi, celle de Chéraga, (cour de Blida), l'écoute raconter ses mésaventures qui débutent le 27 mai 1975: création de la Sarl Epsr avec un acte notarié et domiciliée 16, route de Ouled Fayet (Chéraga). Le 10 avril 1975, cependant, Ould El Hocine demande à l'APC l'attribution d'un terrain en qualité d'ancien de l'ALN (Wilaya IV historique). Trois semaines après, le terrain est octroyé à l'Epsr. Entre-temps, une demande d'attribution (n°25/75) du terrain est adressée au domaine Aliou-Fodil que le conseil accordera. Le 16 février 1976, le Comedor, qui relevait à l'époque de la Présidence de la République, autorise l'aménagement de hangars. Le 4 mars de la même année, le PC est délivré par le Comedor sous le n°234. Entre le 11 avril 2000 et le 3 janvier 2005, diverses attestations sont délivrées par l'APC de Chéraga concernant le terrain. Les impôts entrent en scène le 28 novembre 1979 pour certifier que l'Epsr était à jour. Le 16 mars 1976, c'est la Casoral qui certifie l'affiliation de l'Epsr sous le n°3492/5 -déclarations de l'employeur- et le n°124949 l'affiliation. En 1984, le colonel Ahmed Benchérif, premier commandant en chef de la Gendarmerie nationale, atteste qu'il n'y a jamais eu d'entreprise créée par la Gendarmerie nationale ni sous la dénomination: Darak el watani, ex-Van-Rossem, ni sous la dénomination Eprs Darak el Watani ex-Van Rossem. Le 5 mai 2004, le général Mustapha Chelloufi, ancien commandant en chef de la Gendarmerie nationale, certifie, à son tour, qu'Ould El Hocine Med Chérif n'a jamais fait partie des effectifs de la Gendarmerie nationale, et que l'Epsr n'a jamais fait partie du patrimoine de la Gendarmerie nationale. Puis Ould El Hocine demande l'indulgence de la présidente pour l'ouverture d'une parenthèse.«A condition que cela reste et relève du dossier du jour : faux et usage de faux», tranche la juge. «Et comment, madame la présidente. Tout a commencé par des poursuites d'atteinte à la sûreté de l'Etat qui m'ont valu cinq longues années de détention préventive à la prison militaire de Blida, avant que je n'obtienne un non-lieu. Et c'est durant cette période que le processus de spoliation a débuté. 25 ans, madame ! J'en suis malade. Je tiens à mon enfant et je lutterai jusqu'au bout de mes forces», a dit Ould El Hocine au bord de l'épuisement, lui qui était au tribunal dès 9h et qui ne passera à la barre que cinq heures plus tard! Denni, le PR, requiert -sans avoir la moindre idée du dossier contentieux (Epsr-Enps), dix-huit mois fermes contre le père et la fille. Me Mentalecheta, comme pour ouvrir les yeux au jeune parquetier, s'adresse à la présidente en déclarant à haute voix: «Il vous est impossible de saisir cette affaire si vous n'étudiez pas les tenants et aboutissants de ce dossier.» Me Fadel a affirmé que ce document supposé être faux ne concerne nullement Ould El Hocine. «C'est l'interprétation qui est mal faite». Puis le trio d'avocats emballe la juge qui a joué «fair-play» en laissant les défenseurs aller au bout de leurs arguments. Si Me Mentalecheta Med avait regretté la position du JI, Me Ahmed Fadel s'est dit troublé qu'une affaire aussi simple voit une victime de faux passer à la barre en qualité d'inculpé. Me Rida Houadjebi, fidèle à sa ligne de conduite, s'en prend lui aussi vingt-huit secondes à l'attitude incompréhensible du JI qui ne se comporte pas en juge juste mais salue la sagesse de la présidente d'avoir montré de l'intérêt pour ce dossier. La juge rejette cette fleur en retournant le compliment. «Me, le tribunal se penche sur tous les dossiers avec le même intérêt», marmonne-t-elle avant d'annoncer la mise en examen de l'affaire pour le 11 juillet 2006.