À un peu plus d'une semaine du premier tour des élections législatives en France, le parti d'Emmanuel Macron et ses alliés centristes sont talonnés par une coalition de gauche le vent en poupe. Dans une campagne largement atone, qui mobilise peu les Français selon les sondages, cette coalition de partis de gauche emmenée par Jean-Luc Mélenchon, livre un âpre duel dans l'espoir de devenir la première force d'opposition dans le pays. De récents sondages montrent un tassement de la coalition «Ensemble!» du président Macron, qui arriverait certes en tête des législatives des 12 et 19 juin, mais sans être certaine de décrocher la majorité absolue dans la prochaine Assemblée, comme maintenant. Elle obtiendrait, selon une enquête Ifop-Fiducial, entre 275 et 310 sièges, contre 170 à 205 pour la Nupes, cette alliance électorale regroupant les socialistes, communistes, écologistes et le parti de Jean-Luc Mélenchon, la France insoumise. La majorité absolue est de 289 députés. «Nous sommes bien placés pour gagner», a déclaré vendredi Jean-Luc Mélenchon sur la radio franceinfo, lui qui s'efforce de transformer le scrutin en «troisième tour» de la présidentielle. À 70 ans, M. Mélenchon, que certains affublent du surnom de «Chavez gaulois» en référence à l'ancien homme fort du Vénézuela Hugo Chavez, est arrivé troisième de la présidentielle du 24 avril à la tête de la gauche radicale en France. Du côté de la majorité présidentielle, on assure «prendre au sérieux» cette montée en puissance de la Nupes, indiquait jeudi la députée Aurore Bergé. Le ministre des Relations avec le Parlement, Olivier Véran, assurait lui que si le Parlement n'était pas «en concordance avec le programme pour lequel le président a été élu, ce serait une déstabilisation majeure de la politique dans notre pays pour les années à venir». Or, selon un sondage BVA diffusé vendredi, seulement un tiers des Français (35%) souhaite qu'Emmanuel Macron dispose d'une majorité à l'Assemblée nationale. Un mois et demi après sa réélection confortable le 24 avril face à son adversaire d'extrême droite Marine Le Pen, Emmanuel Macron ne bénéficie d'aucun état de grâce et reste loin de son image de président pressé et de l'élan habituel d'une majorité en campagne. Malgré des déplacements à Bruxelles en début de semaine pour un sommet européen, puis dans l'ouest de la France mardi et dans le sud, jeudi à Marseille, le président français est accusé par l'opposition de temporiser, voire d'«inertie».Et ce malgré l'inquiétude croissante des Français exprimée dans toutes les enquêtes d'opinion, liée au ralentissement de l'économie française et à la flambée des prix alimentaire et de l'énergie provoquée par la guerre en Ukraine. Quant à son nouveau gouvernement, formé il y a quelques semaines sous la houlette d'Elisabeth Borne, il a les mains liés par le calendrier électoral et est fragilisé par des polémiques. Il y a eu d'abord l'affaire du ministre des Solidarités, Damien Abad, accusé de viols, ce qu'il a réfuté. Puis, le fiasco à l'entrée du Stade de France samedi dernier en marge de la finale de la Ligue des Champions de football. Ce raté a pris une tournure très politique, l'opposition appelant jusqu'à la démission du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. Auditionné mercredi au Sénat, celui-ci a dû finalement s'excuser. Le gouvernement français apparaît d'autant plus fébrile que plusieurs de ses membres, dont la Première ministre, sont candidats aux législatives. Les Français y sont appelés à renouveler les 577 députés de l'Assemblée nationale. Mais la campagne électorale peine à décoller, à l'exception de certaines joutes locales dans le sud de la France, notamment où l'extrême droite se déchire. Comme à Saint-Tropez, emblématique station balnéaire, où l'ancien rival de Marine Le Pen à la présidentielle, Eric Zemmour, est candidat. Les Français «ont très clairement la tête ailleurs», estimait jeudi l'expert en sondages Brice Teinturier, alors qu'«en réalité il n'y a pas vraiment de campagne qui se soit construite». Les Français vivant à l'étranger et en Polynésie française votent pour leur part dès ce week-end, certains ayant déjà pu le faire en ligne jusqu'au 1er juin malgré quelques couacs. Ce climat fait craindre un très fort taux d'abstention. Lors des dernières législatives, en 2017, elle avait dépassé les 50% au premier tour, un record.