Sollicitée le 3 juin dernier lors de la visite à Alger d'une délégation du gouvernement malien conduite par le ministre de l'Intérieur, le général Kafougouna Koné, la médiation algérienne entre les autorités de Bamako et les ex-rebelles touaregs qui avaient attaqué le 23 mai deux camps militaires de Kidal et un camp à Menaka a abouti à la signature d'un accord qui met fin à la crise. Le texte paraphé à Alger par les émissaires des deux parties en conflit stipule que la partie touarègue «ne réclame plus l'autonomie pour la région» nord du pays où est confinée la majorité de la population targuie tandis que «le gouvernement malien s'engage à accélérer le développement des trois régions du nord du Mali (Kidal, Gao et Tombouctou)». La signature du document est confirmée par les deux belligérants, les Touareg assurant, pour leur part, vouloir «faire la paix et retourner vers la base pour commencer une campagne d'explication du texte». Ainsi, se confirme la capacité de l'Algérie à gérer utilement et surtout efficacement la médiation entre deux factions rivales, même si pour cette dernière intervention le rôle était plus ou moins prévisible, Alger ayant déjà pesé de tout son poids pour obtenir le règlement du premier conflit qui avait opposé en 1992 la rébellion touarègue au gouvernement malien. A la veille du sommet de l'UA, ce nouveau succès de la diplomatie algérienne, il est vrai prévisible dès lors qu'on connaît la personnalité de l'ambassadeur d'Algérie à Bamako, Abdelkrim Gheraïeb, confirme les performances et l'efficience de l'Algérie en matière de médiation, notre pays ayant fait ses preuves depuis fort longtemps et bien avant l'épisode de la prise d'otages à l'ambassade américaine de Téhéran, contrairement aux idées reçues. Certes, c'est cet événement, derrière la solution duquel on trouve encore Abdelkrim Gheraïeb qui avait travaillé, à l'époque, de concert avec le regretté Mohamed Seddik Benyahia, alors en charge du portefeuille des Affaires étrangères, qui a en quelque sorte donné ses lettres de noblesse à la diplomatie conquérante de notre pays. Laquelle avait auparavant l'habitude de travailler en secret et se gardait de toute publicité tapageuse sur nombre de dossiers, intéressant notamment les mouvements de libération. Outre l'interlocuteur iranien qui n'hésite pas à solliciter la médiation algérienne chaque fois qu'il l'estime nécessaire -tel a été de nouveau le cas pour la crise du nucléaire qui oppose Téhéran à Washington, soutenu par tous les pays occidentaux- il y a eu le conflit fratricide sénégalo-mauritanien, dans les années 80, le contentieux tchado-libyen sur la bande d'Aozou, en 1992, les luttes intestines des mouvements angolais, en 1994-1995, le dossier soudanais avec toutes ses complexités et ses contraintes et, tout dernièrement, la démarche ivoirienne dont l'importance n'échappe à personne, eu égard à la forte implication de l'ancienne puissance coloniale. C'est un fait que, lorsqu'elle est sollicitée, l'Algérie ne rejette a priori aucune possibilité de médiation, tout en se réservant le droit d'examiner au préalable l'ensemble des tenants et aboutissants et de consulter les parties concernées afin de mesurer l'ampleur du différend et de jauger les opportunités réelles de (ré)conciliation. Compte tenu de cette méthodologie, l'efficacité de l'opération est en effet plus assurée et c'est ce qui a permis à notre pays d'engranger le bénéfice du succès dans la majorité de ses interventions. Les Algériens, quant à eux, ne mesurent pas toujours l'importance d'une telle action, croyant qu'elle est circonscrite à un satisfecit conjoncturel. Ils doivent savoir qu'en réalité, ces opérations sont comptabilisées en termes de redevance morale et que lors de votes décisifs dans les instances internationales ( ONU, UA, Ligue arabe etc.), elles valent à l'Algérie, et à ses représentants, la validation de ses choix et l'élection haut la main de ses candidats aux postes internationaux. D'où la perpétuelle et opiniâtre effervescence diplomatique de notre pays qui, il est vrai, finit par donner le tournis à tous ceux qui méconnaissent le sens et l'importance de nombre d'enjeux diplomatiques et stratégiques.