Il est certain qu'à ce rythme, ce n'est pas demain qu'une nation africaine sera championne du monde. Alors que la fin de la Coupe du monde approche à grands pas, les critiques les plus acerbes sont portées contre l´arbitrage accusé d´avoir faussé le résultat de certains matches. Quand l´Espagnol Luis Medina Cantalejo accorde un penalty à l´Italie à la 3e et dernière minute du temps additionnel de son 8e de finale contre l´Australie sur une faute pas vraiment évidente sur un joueur transalpin, les langues se délient et les doigts se pointent pour assener à l'Ibère des critiques dont il se souviendra pendant longtemps et dont on se demande si elles ne vont pas l´amener à écourter sa carrière. Il est évident qu´un arbitre a, comme tout être humain, ses faiblesses et ses carences. Il est impossible d´être parfait. Seulement il s´agit de la Coupe du monde des nations ou trop d´argent est investi pour se permettre de laisser le sort d'un match entre les mains d´un seul homme. L´ex-arbitre international algérien et ex-président de la FAF, Belaïd Lacarne suit pour la Fifa les arbitres qui ont été sélectionnés pour diriger les matches de ce Mondial. Nous avons pu le rencontrer ici en Allemagne et il nous a indiqué qu´avec «les moyens déployés par la Fifa, il est impossible de rater son arbitrage. Il faudrait ne rien connaître du football pour le faire». Pourtant des ratages il y en a eu et pas seulement de la part d´arbitres sur lesquels on avait des doutes sur leurs compétences. Certaines grosses pointures de la corporation sont, elles aussi, passées à côté de la mission que l´on était en droit d´attendre d´elles. Ainsi en a-t-il été du Slovaque Michel Lubos, trahi, il est vrai, par ses juges assistants, qui a largement lésé le Ghana face au Brésil en 8e de finale. On a aussi parlé du Russe Valentin Ivanov qui a dirigé un Portugal-Pays Bas qui s´est avéré être le match le plus musclé de l´histoire de la Coupe du monde avec 16 cartons jaunes et 4 cartons rouges. Mais la responsabilité du Russe est relative. Il était particulièrement ardu d´arbitrer un match où les joueurs étaient entrés sur le terrain non pas pour jouer au football mais pour se taper dessus. Cependant, celui dont on a le plus parlé ici, surtout dans le milieu journalistique, c´est l´Anglais Graham Poll qu´on donnait parmi les favoris pour diriger la finale de ce Mondial si l´Angleterre ne la jouait pas. Dans un match du premier tour entre l´Australie et la Croatie, il s´est tout simplement trompé, infligeant un carton jaune au numéro 3 croate, Simunic, à la 61e minute de jeu puis un autre avertissement au même joueur à la 89e minute mais ne lui a pas sorti le carton rouge d´usage. A la fin de la rencontre, Graham Poll a, de nouveau averti Simunic et l´a, cette fois-ci, exclu. Dans son rapport de match, il a reconnu s´être trompé et avoir noté sur son calepin, pour le second carton jaune, le numéro 3 australien Moore. Le drame c´est que personne au bord du terrain ne s´est aperçu de cette bévue. Ni les deux juges assistants, qui notent pourtant toutes les sanctions, ni le 4e arbitre, qui en fait autant ni les officiels de la Fifa sur leur table de marque n´ont réagi. Cette erreur a poussé la commission d´arbitrage de la Fifa à demander des excuses tout en prenant la défense de l´arbitre. «En 26 ans de carrière, est-il écrit dans le communiqué de cette commission, jamais l´Anglais ne s´est retrouvé dans une telle situation. Cet arbitre expérimenté n´avait jamais commis une erreur de ce genre....Graham Poll est un arbitre extraordinaire ainsi qu´un grand sportif. Selon lui, sa personnalité et son immense amour pour le football lui permettront de surmonter cette situation.» La «bêtise» de Poll pour aussi grave qu´elle soit n´a pas influé sur le sort du match. Par contre les Togolais ont des raisons d´en vouloir au Paraguayen Amarilla de les avoir privés d´un penalty dans leur match contre les Suisses et les Ivoiriens ont dû voir de travers le Colombien Ruiz qu´ils ont accusé de partialité lors de leur confrontation contre les Néerlandais. Du reste, le président de la Fifa, Sepp Blatter lui-même, vient de reconnaître que «les Africains n´avaient pas été gâtés par l´arbitrage». Il rejoignait ce que nous disait Guy Roux, l´entraîneur français pour qui «les équipes africaines sont celles qui sont le plus victimes de l´arbitrage»: Quand des centaines de millions d´euros sont investis dans une opération comme la Coupe du monde, les gens sont forcés de croire que ces erreurs d´arbitrage ne sont pas involontaires. Bien sûr on pourra toujours affirmer que l´Australie, pays riche, a été, lui aussi, victime d´une erreur d´arbitrage mais il avait pour adversaire l´Italie économiquement presque d´égale valeur que le pays austral mais «footballistiquement» plus porteur que lui. Il n´est nul besoin d´être grand clerc pour deviner qu´il vaut mieux avoir un Brésil dans la compétition qu´un Ghana ou un Pays Bas qu´une Côte d´Ivoire. La Coupe du monde est devenue un énorme enjeu économique où le «faible» doit rester le moins longtemps possible. Il est possible que M.Blatter soit animé d´un réel désir d´aider les pays en développement mais il est pris en tenaille par ceux-là mêmes qui ont d´énormes interets dans l´affaire. A ce rythme là ce n´est pas demain que l´on verra un pays africain champion du monde. En 2010, la Coupe du monde sera sur notre continent, en Afrique du Sud. C´est un pays économiquement plus en avance que tous les autres du continent, d´où le choix qui s´est porté sur lui pour accueillir la compétition. De la à croire que les surprises à un stade très avancé de la compétition pourront avoir lieu serait tenter de franchir un pas que nous n´oserons pas effectuer. La Coupe du monde de football semble pour l´instant une affaire de riches et les «petits» continueront à être «invités» juste pour meubler le calendrier.