Une déclaration de guerre. Les propos du leader islamiste marocain «résonnent comme un pari sur le pire». Après avoir utilisé tous les canaux et moyens possibles, politiques, sportifs, culturels, pour déstabiliser le pays, le Maroc passe le témoin à son «bras armé religieux», pour en faire son porte-parole et lui faire dire ce qu'il n'a pas eu le courage d'ouvertement déclarer: la confrontation armée. Le Marocain Ahmed Raïssouni, président de l'Union internationale des savants musulmans a été, vraisemblablement, chargé de lancer une fetwa contre l'Algérie. Le successeur du prédicateur Youssef al-Qaradawi a appelé, dans une interview télévisée, le roi Mohammed VI à ordonner à son peuple de marcher sur Tindouf. «Au Maroc, nous sommes 35 millions, et le peuple marocain est prêt au djihad et à la mobilisation, ses oulémas en premier, que ce soit par les moyens financiers ou le sacrifice de soi, pour en finir avec les espoirs de ceux qui veulent couper le pays de son Sahara», car «comme cela a été le cas pour la Marche verte, nous sommes prêts, et nous serons des millions à marcher sur Tindouf si le Roi nous le demande», a déclaré le leader islamiste qui n'a pas hésité une seule seconde à montrer qu'il avait les yeux plus gros que le ventre. Le dignitaire religieux a clairement affiché les visées expansionnistes auquel n'a pas renoncé le Makhzen. «Personnellement, je me revendique de l'héritage de Allal El Fassi (ex- chef de l'Istiqlal, décédé en 1974, premier parti politique, fondé pour obtenir l'indépendance du Maroc, ndlr) et je ne m'en suis jamais caché. L'existence même de la Mauritanie est une erreur. Le Maroc doit revenir à ses frontières d'avant la colonisation européenne. Si le lien qui unit les populations du Sahara au Royaume est celui de l'allégeance, celle des tribus mauritaniennes envers le Trône est également établie», soulignera Ahmed Raïssouni. Un dérapage de plus qui porte atteinte à la souveraineté à un pays voisin, la Mauritanie et remet sur la table la question sahraouie. Un dossier qui agite le Makhzen dès qu'il sent une évolution jugée défavorable aux thèses marocaines. «Les agissements du Maroc sont l'expression d'une nervosité non maîtrisée pour faire diversion et occulter une question essentielle, celle de la nécessité de la décolonisation du Sahara occidental», avait fait remarquer le Représentant du Front Polisario pour la France, Mohamed Sidati. Cette nouvelle provocation contre l'Algérie n'a cependant d'autre objectif que de faire diversion. Le Maroc étant en effet en proie à une situation économique et politique explosive. Endetté jusqu'au cou, plus de 80 milliards de dollars, il est tombé entre les fourches Caudines du FMI. L'annulation des festivités de la fête du Trône par le roi Mohammed VI dont la maladie est un secret de Polichinelle a rajouté une couche d'inquiétude quant à des lendemains qui s'annonçaient déjà incertains pour les Marocains. Pour tenir un discours guerrier, l'ultra conservateur marocain, dont le pré carré reste celui du «fiqh maqasid», une méthode de pensée qui priorise la finalité et l'esprit du texte religieux plutôt que de son caractère littéral, ne pouvait se prononcer sur des questions de géopolitique ultra-sensibles qui relèvent de prérogatives exclusivement royales, sans avoir été mandaté. Une intervention qui intervient deux semaines après le discours prononcé le 30 juillet par le monarque marocain à l'occasion du 23e anniversaire de son accession au trône où certains y ont relevé la «main tendue» de l'héritier de feu Hassan II envers l'Algérie. Mohammed VI s'est engagé à «trouver une issue à la situation actuelle et à favoriser le rapprochement et la compréhension entre les deux peuples». Une vue de l'esprit! Une manoeuvre! Le bellicisme affiché par le président de l'Union internationale des savants musulmans l'atteste. Le Maroc a tendu une autre main: celle qui sépare. Il n'a pas renoncé à ses attaques insidieuses contre l'Algérie. Les limites ont été dépassées.