«Nous sommes à Alger pour parler de l'histoire mais également du présent et de notre avenir commun.» Hier, 9h30 passées, Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général de l'instance exécutive du FLN, accueille ses invités composant la délégation du Parti socialiste français conduite par le premier secrétaire, François Hollande. Les deux hommes prennent place côte à côte au salon d'honneur de l'Hôtel El Djazair, ex-Saint Georges. M.Hollande et M.Belkhadem ont du mal à détendre l'atmosphère. Elle est dure et porte la marque: «contentieux historique PS-Algérie». Les deux responsables politiques cherchent à briser la glace. A défaut de la luminosité d'Alger, ils parlent de l'hôtel El Djazair. François Hollande: «C'est un hôtel historique?». Abdelaziz Belkhadem: «Oui il est historique, plusieurs personnalités y ont séjourné». François Hollande: «Il y a eu une extension je crois?». Abdelaziz Belkhadem: «Effectivement, il y a eu une extension car il y avait un problème de parking». Et la glace se brise sous l'oeil attentif des journalistes de la presse française et algérienne. Les langues se délient et les échanges de subtilités politiques commencent entre le premier secrétaire du Parti socialiste français et le secrétaire général de l'instance exécutive du FLN. «Nous ne récusons pas le débat sur l'histoire» Au bout des lèvres un discours conciliant, le leader du PS (Parti socialiste) a affirmé que sa visite à Alger vise à rétablir le lien avec l'Algérie coupé depuis seize ans en raison «des événements du début des années 90». «Je suis à la tête d'une délégation pour recoudre un fil», a indiqué le responsable du PS. «Il est souhaitable d'établir des liens durables entre les deux parties et les deux peuples» affirme encore M.Hollande estimant que «l'Europe et la Méditerranée ont besoin de nous, nous sommes deux grands pays qui portons les mêmes principes». François Hollande s'est dit ouvert à tous les débats notamment, celui de l'histoire. «Nous ne récusons pas le débat sur l'histoire, nous regardons l'avenir avec lucidité», a souligné M.Hollande, lors de cette brève rencontre avec M.Belkhadem. Ce dernier lui rappelle aussitôt que le PS «avait eu une position courageuse», en ajoutant la précision «avant les présidentielles». Il s'agit bien sûr de la position du Parti socialiste français vis-à-vis de la loi très controversée du 23 février 2005. La nuance apportée par le premier responsable du FLN répond aux lectures faites ici et là sur l'opportunité de la visite. Tout un chacun sait que les rapports FLN-PS n'ont pas été chaleureux par le passé. Belkhadem tend encore une fois la perche: «Pour nous le PS est né 1971» ; déclaration qui détend la forte délégation du PS. Sur sa lancée, le secrétaire général du FLN ajoute qu'il rend hommage à ceux qui se sont démarqués par rapport à la colonisation. «Beaucoup d'amis français ont eu le courage de développer des opinions contraires à celles des officiels». Alors qu'il sortait du salon d'honneur, Abdelaziz Belkhadem se tourne vers la journaliste du quotidien Le Monde, Flaurence Beauget, et lui dit: «Toute personne qui respecte la dignité d'une autre personne ne peut pas accepter que l'on glorifie des choses horribles. Je vous remercie Mme Flaurence Beauget». Le FLN répond aux conditions de l'IS Un peu plus tard, au jardin de l'hôtel, lors d'une rencontre avec des journalistes, Hollande estime que le PS ne renie pas le Sfio. Il évoque la question des visas qui fait l'objet de «mécontentement» du côté algérien, puis se tourne vers l'ambassadeur français à Alger puis lui demande de faire un effort par une accélération dans le traitement des demandes. «C'est un sujet de mécontentement en Algérie dans la mesure où il n' y a pas le même traitement que pour les autres pays du Maghreb. Nous ferons en sorte que cette mesure soit levée et j'espère qu'elle le sera avant la fin de l'année 2007» a-t-il souhaité. Il s'étale sur la discrimination qui avait conduit à des émeutes, l'automne dernier, dans les banlieues, avant d'enchaîner sur la «citoyenneté», l'immigration, Ghaza, etc. Il s'est démarqué de la majorité présidentielle de Sarkozy en plaidant notamment pour une politique d'immigration partagée. «Il n'est pas vrai d'appliquer une politique de l'immigration dictée par un seul pays. Notre vision sur cette question suppose une coresponsabilité dans le partage des règles» La même vision a été développée par rapport à la discrimination sociale. «Il est aujourd'hui essentiel qu'il y ait une nouvelle génération dans l'équipe de France parlementaire qui n'est pas aussi multicolore que l'équipe de France de football», a déclaré l'hôte du FLN. A propos du FLN justement et de son adhésion à l'Internationale socialiste, il donne la parole à Pierre Moscovici, député au Parlement européen et secrétaire national chargé des affaires internationales au sein du PS. Moscovici indique qu'il y a deux conditions pour que l'adhésion d'un parti soit acceptée au sein de l'IS (l'internationale socialiste): la première concerne le respect de l'éthique et la seconde a trait à la politique, c'est-à-dire à l'appréciation d'un parti par rapport aux idées socialistes. «Pour la première condition je ne pense pas qu'il y ait un problème, pour la seconde la demande d'adhésion du FLN sera examinée. Mais je pense que si le Fln a fait sa demande d'adhésion cela signifie qu'il partage les idéaux socialistes.»