Les tirs à la roquette du Hezbollah ont eu leur effet sur l'intransigeance israélienne. «Nous savons qu'il n'y a pas de solution militaire pour neutraliser le Hezbollah. La solution est diplomatique. Une solution diplomatique et non militaire est maintenant susceptible de mettre un terme à la crise au Liban», a affirmé hier le porte-parole du ministre israélien des Affaires étrangères Mark Reguev. Ce changement d'attitude intervient au cinquième jour du conflit, certes disproportionné, mais équilibré sur le plan psychologique. Les Israéliens ont misé sur une guerre ciblée, courte et expéditive, en s'attaquant aux infrastructures libanaises, dans l'objectif de pousser le gouvernement Siniora à accuser le Hezbollah d'être seul responsable de l'escalade, épousant ainsi les thèses de l'Arabie Saoudite, la Jordanie et l'Egypte. Les tirs de roquettes sur Haïfa ont créé une panique imprévisible. Les habitants de la première ville industrielle et la troisième ville israélienne en nombre de population ont fui vers le Sud. Reguev essaie de minimiser la stupeur de l'opinion israélienne en indiquant que «les intérêts israéliens dans cette affaire ne sont pas différents de ceux de la communauté internationale, eux-mêmes en concordance avec les résolutions 1559 et 1680 du Conseil de sécurité des Nations unies». Comme il estime que «si la communauté internationale avait fait preuve d'une plus grande détermination, la crise actuelle au Liban aurait été évitée». «Il est désormais possible qu'avec le nouveau contexte qui se met en place au Liban nous contribuions à faire appliquer à la lettre les résolutions des Nations unies», ajoute-t-il. «Notre seul objectif est de neutraliser le Hezbollah au Liban. Le seul moyen d'y parvenir est une mobilisation de la communauté internationale et sa détermination». L'ONU est enfin sortie de sa léthargie. Kofi Annan a appelé hier à Saint-Pétersbourg les parties en conflit au Liban à «conclure une trêve» pour permettre la mise en place d'une force internationale de stabilisation à la frontière israélo-libanaise. «Les combats pourraient se poursuivre un temps (mais) nous devons obtenir des parties concernées qu'elles se mettent d'accord, aussi vite que possible, sur une cessation des hostilités pour nous donner le temps de travailler à l'envoi de ces soldats», a-t-il dit. A l'issue d'une rencontre avec le Premier ministre britannique, Tony Blair, en marge du sommet du G8, il a déclaré: «J'appelle les parties à être très sélectives quant à leurs cibles et à avoir à l'esprit qu'elles ont une obligation relevant du droit humanitaire international d'épargner les vies des civils et les infrastructures civiles.» Les dirigeants du G8 ont souhaité dimanche l'examen par le Conseil de sécurité de l'ONU d'une «présence internationale de surveillance et de sécurité» au Liban. Annan a précisé que la force qu'il envisageait serait «une force de stabilisation». Il a ajouté qu'il voulait disposer de suffisamment «de temps et d'espace» pour s'assurer d'avoir «des soldats bien entraînés, bien équipés, pour y aller très rapidement». Il a dit aussi attendre un rapport d'une équipe de l'ONU dirigée par son conseiller politique Vijay Nambiar, actuellement dans la région. Le secrétaire général de l'ONU a rappelé que quatre des pays du G8 étaient membres permanents du Conseil de sécurité et a laissé entendre qu'ils ne devaient pas faire usage de leur droit de veto pour retarder le déploiement de la force de stabilisation. «Je m'attends à ce qu'ils travaillent avec nous». Tony Blair estime que «la seule manière de voir une fin de la violence est d'avoir une force internationale déployée dans la zone». «La situation est de toute évidence critique et la priorité la plus immédiate est de créer les conditions à une cessation de la violence», a-t-il dit. Jacques Chirac a indiqué hier de Saint-Pétersbourg que la force internationale qui pourrait être déployée au Liban devrait disposer de «moyens de coercition». Il a envoyé hier son Premier ministre à Beyrouth afin de rencontrer le chef du gouvernement libanais et de lui exprimer «le soutien de la France et la solidarité du peuple français envers le peuple libanais dans l'épreuve». L'UE a annoncé hier qu'elle étudiait un éventuel déploiement «de forces de maintien de la paix au Liban». Sa position évolue selon le bon vouloir du G8. Rappelons que le G8 avait auparavant appelé les deux parties «à la retenue», condamné «l'enlèvement de deux soldats israéliens» et demandé «l'arrêt des attaques sur les villes israéliennes» par le Hezbollah. Du côté israélien, on qualifie d'«hypothétique» l'adoption d'une résolution de l'ONU visant à imposer le cessez-le-feu à Israël. La guerre expéditive n'a pas eu lieu. Le Hezbollah s'est installé dans la durée. Il lance ses roquette sur Haïfa en jouant ainsi avec les nerfs des Israéliens qui croyaient rééditer les expéditions de 67 et 73.