La résistance héroïque des combattants du Hezbollah qui tient tête depuis vingt-trois jours à l'une des armées les plus agressives du monde, vainqueur de plusieurs guerres contre les armées du monde arabe réunies, commence à créer un désordre au sein de l'état-major de l'armée israélienne et des mécanismes de défense de son territoire. L'attitude sereine et pragmatique du leader, Hassan Nasrallah, a brisé l'élan d'enthousiasme et l'arrogance des militaires israéliens qui ont promis à leurs concitoyens une guerre éclair, sans risque, et surtout victorieuse. Mais au fil des jours, une autre réalité s'entête à prendre forme dans cette région du Moyen-Orient. Terre des miracles, celui des combattants du Hezbollah armés de Kalachnikov et de lance-roquettes qui humilient le corps d'élite du Tsahal, le Golani réputé invincible et appuyé par un rideau de feu aérien, maritime et terrestre, en fait partie. Sinon comment expliquer le déroulement d'un tel scénario? Le monde entier est surpris. Les régimes arabes «complices» le sont encore plus. Pour boucler la boucle, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a menacé, jeudi dernier, de frapper Tel-Aviv si Beyrouth était bombardée. «Si vous bombardez notre capitale, nous bombarderons la capitale de votre entité agressive», a-t-il calmement déclaré sur les chaînes de télévision arabes. Ceux qui ont appris à l'écouter savent que l'homme ne balance jamais des mots en l'air. Ils savent surtout qu'il joint toujours le geste à la parole. Le lendemain, la municipalité de Tel-Aviv prenant la menace très au sérieux, a fait savoir qu'elle procédait à une vaste inspection de ses abris antiaériens. C'est aussi le branle-bas du côté de l'état-major israélien qui serait, d'après l'un des plus importants organes de presse israéliens Yediot Aharonot, en proie à de «vives dissensions depuis le début du conflit du Liban, sur la stratégie à mettre en oeuvre face au Hezbollah». Il n'y a pas de fumée sas feu. Le quotidien estime que ces «rumeurs» traduisent une situation de «grave malaise» au sein du commandement militaire, provoqué par les échecs de l'offensive menée par Israël au Liban et qui fait ressurgir le spectre d'un nouvel enlisement au Liban, six ans après le retrait unilatéral israélien du pays du Cèdre. Le scénario catastrophe est déjà planté d'où cette insistance des politiques et militaires israéliens à pencher vers la solution diplomatique en anticipant de préparer le terrain à une éventuelle force internationale d'interposition tout au long de la frontière. L'incroyable prend forme. Israël en appelle à l'arbitrage international pour se protéger de la force de feu du Hezbollah. Dans l'entourage de l'état-major de l'armée israélienne, on parle de limogeage de hauts responsables militaires en charge de mener les opérations sur le front. Quelques jours auparavant, le chef d'état-major des armées, le général Dan Haloutz, avait été pris d'un malaise suite aux cuisants échecs subis par ses unités d'élite sur le front terrestre. Ces signes annonciateurs d'une défaite humiliante d'Israël sur le plan militaire face au Petit Poucet libanais, n'ont pas empêché l'aviation de continuer de larguer ses bombes meurtrières sur le Liban. Selon des observateurs de l'ONU, l'armée mène actuellement sept incursions le long de la frontière et les combats y font rage. Environ 10.000 hommes opèrent dans quatre axes en direction d'une vingtaine de villages avec pour objectif, d'instaurer une zone de sécurité de 6 à 8km au nord de la frontière israélienne et de neutraliser les secteurs à partir desquels le Hezbollah continue de tirer ses fameuses roquettes. Ces dernières ont encore touché, hier, le nord d'Israël où l'on a annoncé deux morts suite à une salve de sept missiles qui ont explosé, venues tout droit du Sud-Liban. Une terre qui ne veut pas se taire et qui ne cesse de cracher le feu de sa colère sur la face d'Israël. La légende continue. L'agression aussi, puisque dans l'après-midi d'hier, au moins douze personnes ont été tuées et 30 autres blessées dans un énième bombardement israélien sur l'enceinte du bâtiment des douanes libanaises à Qaa, un village à la frontière libano-syrienne. Israël continue de jouer avec le feu. Il risque de se brûler davantage.