Jeudi 28 novembre 2002. Il est exactement 7h07 heure algérienne, (9h07 heure de Moscou). Une fusée porteuse légère Cosmos-3 m, à bord de laquelle un satellite qui allait propulser l'Algérie au rang de nation spatiale, fond le ciel moscovite à une vitesse vertigineuse. L'Algérie venait de lancer son premier satellite Alsat 1, pionnier dans l'histoire spatiale nationale, à partir de la station «cosmodrome de Plessetsk» en Russie. Un instant magique et historique, surtout, puisqu'à partir de cet instant les scientifiques algériens, hommes et femmes, soutenus par les responsables du pays allaient franchir, inéluctablement, le grand pas vers la conquête de l'espace. D´un poids d'à peu près 100 kg, ce premier satellite allait faire profiter l'Algérie de précieuses techniques et données dans la gestion des ressources naturelles et la prévention des comme les et les. Faisant partie du programme Disaster Monitoring Constellation (DMC) comprenant l'Algérie, le Royaume-Uni, la Chine, le Nigeria et la Turquie. Un programme qui vise à prévenir les catastrophes naturelles dans le monde. Ce premier satellite aura permis de «fournir des informations sur les feux de forêt, lors de la canicule de 2003 touchant plusieurs pays européens du Bassin méditerranéen (France, Portugal, Espagne), ceux de la Grèce en 2008, les inondations survenues aux Philippines en 2004 et le séisme de la même année qui a touché l'île de Sumatra, l'Indonésie ainsi que le Sri Lanka». Alsat1 a permis également à l'Algérie d'assurer la présidence. Le rêve fou d'une poignée de scientifiques algériens Pour rappel, «Alsat-1 est le premier satellite lancé de la constellation DMC. Plus de 20 années se sont écoulées depuis ce moment historique et l'Algérie semble maîtriser, de mieux en mieux, ces techniques spatiales et acquérir davantage d'expertises et d'expériences dans ce domaine réservé aux grandes nations de ce monde. Le rêve spatial algérien était permis et pouvait désormais prendre forme sur le terrain de la réalité. Alsat1, pionnier des satellites algériens, était le prélude à une série de satellites DZ, de plus en plus perfectionnés. Premier satellite artificiel algérien d'une série de six autres satellites mis sur orbite depuis. Une belle aventure qui allait propulser l'Algérie dans le giron des grandes nations, en quête de technologies spatiales avancées, en vue de conquérir l'espace. Le rêve fou d'une poignée de scientifiques algériens devenu réalité. Mais avant que toute cette aventure ne prenne forme, il aura fallu toute une structuration et un travail de fourmis, en amont et en aval, pour aboutir à ces résultats probants. C'est à Arzew, une petite ville (un pôle pétrochimique d'envergure), située à une quarantaine de kilomètres à l'est de la ville d'Oran, deuxième capitale à l'ouest du pays, que le rêve a commencé entre une poignée de scientifiques algériens visionnaires et précurseurs. Ils y avaient cru fermement. Conscients des enjeux et des défis qui se dressent sur le chemin du pays, en quête de développer et maîtriser les technologies spatiales, les responsables du pays ont donné leur quitus à ces scientifiques et, à leur tête, le professeur Azzedine Oussedik. «L'objectif principal est de faire de l'outil spatial un vecteur performant de développement économique, social et culturel du pays et d'assurer la sécurité et le bien-être de la communauté nationale», pouvait-on conclure à l'époque du côté des hautes sphères du pays. C'est en 1987 que l'Algérie se dote d'un Centre national des technologies spatiales (Cnts) basé dans cette ville pétrochimique. Le Cnts est chargé notamment de «projets intégrant la télédétection et les systèmes d'information géographique (SIG) pour la gestion des ressources naturelles, la protection de l'environnement, l'aménagement des territoires urbains et ruraux, sans oublier les infrastructures routières et ferroviaires». Pour parfaire son travail le Cnts fera appel au Surrey Satellite Technology Ltd (Sstl), relevant de l'université britannique du Surrey. Loin de se contenter de cette structure qui avait effectué, en amont, un travail remarquable par ces scientifiques algériens précurseurs dans ce domaine précis. Sur recommandations de ces derniers, les autorités nationales procéderont, le 16 janvier 2002, à l'installation de l'Agence spatiale algérienne (Asal). C'est à cette agence dotée d'une centaine de chercheurs et d'ingénieurs qu'échoit, désormais, la mission de déployer la politique spatiale nationale; l'espace doit devenir «un vecteur important pour le développement économique, social et culturel du pays», devait-on considérer à l'époque. Déjà avec le premier programme et grâce au niveau de maîtrise des équipes scientifiques algériennes, Alsat1 permettra à l'Algérie de présider de 2014 à 2015, le comité des Nations unies pour l'utilisation pacifique de l'espace extra-atmosphérique. Face à cette ambition «démesurée» de ces chercheurs algériens chevronnés, l'effectif activant au sein de l'agence passera de 100 à 600 entre chercheurs et ingénieurs entre 2002 et 2019. Des ambitions spatiales effrénées Aujourd'hui, l'Algérie compte un paysage structurel fourni d'institutions spatiales qui n'ont rien à envier aux grandes institutions américaines, russes, chinoises et autres européennes. Le premier noyau dur de cette folle expédition aura été un groupe de chercheurs et de scientifiques, dont une dizaine a suivi et accompagné l'ensemble du processus du programme spatial national. En effet, le programme du premier satellite conjoint avec le centre spatial de Surrey du Royaume-Uni, aura permis à une équipe de 11 chercheurs du Cnts, ayant suivi tout le processus relatif à la conception, au développement, à la réalisation des différents sous-systèmes composant Alsat-1, à leur assemblage, à leur intégration et à leurs tests, d'acquérir l'expertise requise. Les satellites algériens dont Alcomsat auront également permis la constitution d'un fonds en exploitation, à travers des centaines de milliers d'images et de photos collectées et servant dans différents domaines d'application. Tel le cas pour les projets de développement de l'agriculture saharienne (Biskra et El Oued), la gestion des zones steppiques, la délimitation des périmètres miniers, une cartographie avec un système d'information géographique de la zone de Béjaïa, mise à jour cartographique du littoral national, etc. Forte de son expertise ascendante et de son potentiel scientifique, l'Algérie a entamé un ambitieux programme de parachèvement de cadre organisationnel et fonctionnel, à travers l'implantation de nouvelles structures spatiales spécialisées, comme le Centre des applications spatiales (CAS), le Centre de développement des satellites (CDS) et le centre d'exploitation des systèmes de télécommunications (Cest). Le programme spatial algérien a «contribué à renforcer la capacité et l'autonomie de l'Algérie en matière d'imagerie satellitaire à haute résolution nécessaire pour offrir des données transparentes pour la prise de décision avec un temps de réponse réduit», devait-on souligner à l'époque. Pour le professeur Oussedik, «le renforcement de la souveraineté nationale en matière de télécommunications, à travers la mise en place d'un réseau de transmissions approprié, performant et sécurisé». Aujourd'hui, l'Algérie peut se targuer d'avoir des ingénieurs capables de contrôler et de procéder à des tests en orbite, opérées de manière autonome à partir du territoire national. C'est vous dire le génie algérien...