Sur un total de 30 millions de Marocains, 7 millions, c'est-à-dire près de 23% de la population, vivent en dessous du seuil de pauvreté. Les relations algéro-marocaines connaissent depuis quelques années une nette dégradation. Les quelques actions de partenariat initiées de part et d'autre ne sont pas à même d'occulter le lourd contentieux entre les deux capitales. D'essence politique, le froid entre l'Algérie et le Maroc, qui remonte rappelons-le à l'aube de l'indépendance, continue de se consumer, et le rétablissement des relations connaît de sérieuses entraves. En effet, depuis la fermeture des frontières terrestres en 1994, en raison des accusations proférées par les autorités marocaines, à l'encontre de l'Algérie, l'impliquant dans l'attentat dans un hôtel à Marrakech, tuant deux touristes étrangers, le froid s'est installé entre Alger et Rabat. Cependant, en dépit de la suppression des visas instaurée à titre unilatéral aux ressortissants algériens, le Maroc reste accroché à la question du Sahara occidental pour justifier ses distances avec Alger. Un dossier qui, d'ailleurs continue, jusqu'à nos jours, d'hypothéquer les relations entre les deux pays. Même si l'Algérie ne cesse d'affirmer que le dossier du Sahara occidental est une question de décolonisation qui oppose deux pays, à savoir la Rasd et le royaume chérifien. D'autant plus que l'Algérie se dit prête à favoriser tout règlement du conflit entre les deux parties, dans le cadre de la légalité internationale, notamment le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination. Le Maroc cramponné à son projet autonomiste qu'il s'apprête à présenter devant le Conseil de sécurité de l'ONU, ne voit en l'Algérie qu'une vache à traire et continue de faire fi des résolutions internationales qui prévoient un plan de règlement de la crise dans le cadre d'un référendum d'autodétermination. Or, aujourd'hui, ce qui intéresse le plus le Maroc, ce n'est pas le rôle que pourrait jouer l'Algérie dans le règlement du conflit avec les Sahraouis, mais la réouverture des frontières terrestres. Il n'est un secret pour personne qu'avant la fermeture des frontières algéro-marocaines, les villes frontalières marocaines devaient leur prospérité aux produits de première nécessité acheminés à partir de l'Algérie. Par ailleurs, des sources sûres affirment que pas moins de 2,5 milliards d'euros (soit 3 milliards de dollars) de produits algériens traversent chaque année les frontières, via des réseaux de contrebandiers bien organisés. Ces derniers jouissant de complicités de part et d'autre de la bande frontalière. En 2004, l'Algérie a exporté vers le Maroc l'équivalent de 200 millions de dollars (70% d'hydrocarbures) et a importé pour 187 millions. Ce qui est infime au regard du secteur informel. La chambre de commerce d'Oujda (Maroc) estime le montant de ce trafic à 550 millions d'euros par an. Au point où plus de 60% des ressources financières d'Oujda provenaient de ces échanges avec l'Algérie. C'est, d'ailleurs, dans le nord de la wilaya de Tlemcen que la densité des stations d'essence en milieu rural est la plus forte en Algérie. À Bab El Assa , située à quelques encablures de Maghnia, tout comme à Boukanoun, Sidi El Djillali et Zoui, des centaines de tonnes de produits de première nécessité traversent la frontière, sous le nez des gardes-frontières. À la tombée de la nuit, dans les banlieues de Maghnia, il y a un nombre incalculable de voitures à double réservoir qui font la queue pour s'approvisionner en carburant. Le carburant est, par la suite, vendu par les grossistes aux détaillants, qui, souvent, le mélangent avec de l'huile de moteur, ce qui en amoindrit la qualité. À Beni Drar, surnommé par les habitants «Beni Dollar», pour des raisons que l'on devine aisément, les détaillants affichent leur marchandise au su et au vu de tout le monde. Du premier janvier au 10 février 2004, la douane a saisi 359.000 litres de carburant de contrebande entre Nador et Oujda. La contrebande du cheptel n'est pas en reste, puisque des milliers d'ovins sont acheminés vers Oujda où il seront abattus avant d'être vendus sur les marchés européens et ceux du Sud-Est asiatique. Une véritable subvention gracieusement offerte au peuple marocain qui vit ces dernières années une situation sociale des plus désastreuses. Ce qui a d'ailleurs été à l'origine des émeutes qui ont secoué l'année dernière plusieurs localités du royaume. Les aides financières accordées par les institutions financières internationales, notamment la Banque mondiale et tout récemment, la Banque africaine de développement (BAD) et le Fonds africain de développement (FAD) qui ont octroyé au Maroc deux prêts d'un total de 251 millions de dollars, visent en premier lieu à éviter que le royaume ne sombre dans la tourmente. C'est le cas à El Hosseïma, où des milliers de sinistrés du dernier séisme ont été abandonnés à leur sort. Le constat est le même dans tous les gouvernorats du royaume. A noter que la dernière visite du roi Mohammed VI dans les régions de Oujda et de Nador vise en premier lieu à désamorcer la bombe sociale qui risque d'exploser à tout moment. Ces régions qui étaient, avant la fermeture des frontières, des pôles économiques par excellence, se sont transformées en de véritables ghettos où se mêlent précarité et misère sociale. A noter que d'après des statistiques récentes établies, une étude du ministère marocain de l'Economie et des Finances, sur un total de 30 millions de Marocains, 7millions, c'est-à-dire près de 23% de la population, vivent en dessous du seuil de pauvreté.