Pour la catastrophe appelée «Djelfa», le ministre compte utiliser le balai pour bientôt. Les conséquences des résultats catastrophiques obtenus dans les épreuves du baccalauréat au niveau de la wilaya de Djelfa vont tomber tel un coup de massue sur la tête de ceux à l'origine de la calamité. Même si le ministre en poste, Boubekeur Benbouzid, n'a cessé de mettre en exergue la mauvaise gestion et le laisser-aller, faut-il admettre que son département ainsi que certaines instances de la wilaya, à commencer par la direction de l'Education ont aussi leur part de responsabilité. Explication : la décadence du système éducatif à Djelfa a commencé en 1997, date du dernier résultat positif obtenu: classée alors 25e au niveau national. Lors d'une séance de travail avec les proviseurs des lycées de la même wilaya, le ministre jugeait aussi et sans cesse que les résultats peu convaincants obtenus dans certaines régions sont liés directement aux grèves ayant caractérisé l'année scolaire 2005/2006. Les syndicalistes et des professeurs grévistes ont été ainsi pointés du doigt sans prendre en compte la légitimité des réclamations énoncées. De leur côté, le wali et l'inspecteur général, étant intervenus juste après le ministre, voulaient la tête des chefs d'établissement et de certains autres responsables. «Il faut effectivement se débarrasser des virus qui existent dans le secteur de l'Education dans la wilaya de Djelfa», tempête sans ambages le wali. Mais la question qui s'impose avec acuité est de savoir pourquoi ce dernier n'a bougé même pas le petit doigt pour combler 8 postes vacants dans la direction de l'Education, dont le poste de président de la commission formation et inspection. Ce poste demeurait vacant depuis 2003 tandis que le wali a pris les commandes en août 2004. Pis encore, la commission d'enquête a abouti à des résultats qui incriminent particulièrement l'instance de l'éducation relevant de la wilaya de Djelfa. S'ajoutant à la vacance de 8 postes importants dans la direction de l'éducation, le président de la commission a insisté en outre sur l'absence effective de programme de travail et de suivi ainsi que d'un responsable chargé de l'inspection. Aussi, pour un wali qui parle de «virus ayant été à l'origine de la catastrophe», ce dernier n'est-il pas le premier responsable à devoir demander des comptes à toutes les instances de sa wilaya? L'inspecteur général de l'éducation, quant à lui, a jeté la balle dans le camp des chefs d'établissement et responsables de l'éducation de la wilaya de Djelfa qui, selon lui, «sont les responsables» d'une telle calamité. L'on se demande, par ailleurs, si cette inspection générale a réclamé des rapports durant les années précédentes pour parer à une telle situation. Pourtant, cette même inspection qui siège à l'éducation nationale se réclame comme étant au courant de la mauvaise gestion et coordination, de l'absentéisme des enseignants et de la vacance des 8 postes au niveau de la direction de l'éducation de Djelfa. La commission d'enquête a détecté aussi une surcharge qui dépasse le taux national et qui a atteint, dans certains établissements, le chiffre de 50 élèves par classe. Ce n'est pas tout, concernant le taux d'encadrement, celui-ci est évalué à 1 prof pour 33 élèves, tandis que le taux national est de 1 prof pour 24 élèves. Cela s'ajoute au nombre de professeurs qui n'enseignent pas leurs spécialités et qui sont de l'ordre de 239 dans le second et le troisième palier de l'éducation. Ainsi, le processus de laisser-aller démarre au niveau de l'enseignant et de la direction de l'éducation de Djelfa pour arriver aux instances du ministère à Alger. Car, pour une wilaya qui enregistrait une décadence depuis une décennie, les comptes devaient être réclamés bien avant pour pouvoir rééquilibrer la barre avant qu'il ne soit trop tard. Le résultat: «Parmi les 30 derniers lycées du pays, 12 sont de Djelfa et le reste de la wilaya de Laghouat», annonce Boubekeur Benbouzid. Ces deux wilayas ont enregistré le taux le plus faible dans les épreuves du baccalauréat «succédant ainsi à l'ancien syndrome appelé El Bayadh-Naâma». Le ministre de l'Education nationale ne s'est pas arrêté à ce stade, il accuse ouvertement les enseignants d'avoir gonflé les notes des élèves les qualifiant ainsi «des gens des quotas et des cadeaux». Pour expliquer les résultats catastrophiques des deux derniers établissements de la wilaya, leurs responsables se sont défendus en faisant référence à une réalité des plus amères. Pour le directeur du lycée classé avant-dernier sur la liste des résultats, il est quasi impossible d'avoir des résultats meilleurs avec des classes surchargées qui dépassent le chiffre de 55 élèves par classe, 55 enseignants, dont 5 «stagiaires» travaillant sous CPE, deux profs de maths non-spécialistes et «des inspecteurs qui ne répondent pas aux appels». Le comble c'est qu'il existe des élèves qui ont eu moins de 2 points aux épreuves de maths alors qu'il a été décidé d'attribuer les 2 points de l'exercice faux à tous les candidats du pays. Pour le directeur du lycée Ibn Khaldoun, le dernier du classement, le résultat ne pourrait être meilleur avec seulement 22 enseignants désignés pour l'année 2005/2006, dont plusieurs non qualifiés et un tiers de non-spécialisés. Le même établissement souffrait aussi depuis son ouverture, soit en 2004, d'un manque flagrant en matériels et accessoires de laboratoire. L'on se demande pourquoi ces deux établissements de Djelfa et d'autres de Laghouat n'ont pas obtenu les mêmes résultats que ceux des 6 premières wilayas du nord, classées en tête de position.