«Argu» (rêves), un film long métrage de Omar Belkacemi, projeté en avant-première samedi dernier à la cinémathèque de Béjaïa. Une fiction à la fois poétique et philosophique puisqu'il traite d'une question relative à la personnalité existentielle de l'être humain. C'est l'histoire de Koukou, un jeune de 20 ans, qui vit dans un village de Kabylie avec ses parents et sa soeur Jura. Au village, Koukou est traité de fou à cause de son look et son comportement différents aux yeux du comité des sages du village. Avec la complicité de son père, le comité des sages décide d'interner Koukou dans un asile psychiatrique. Son frère Mahmoud, enseignant de philosophie apprend la nouvelle, décide de défendre son frère. Pendant son séjour au village, Mahmoud mène un combat sur plusieurs fronts. Le film s'ouvre sur une séquence d'un paysage naturel du village où se déroule l'histoire du film. Une séquence qui montre une femme chargée d'amas de bois suivie de son mari plutôt libre. Le film enchaine avec une deuxième séquence qui se déroule à l'intérieur d'une salle de cours où un professeur de philosophie, Mahmoud,,le frère de Koukou, dispense un cours autour d'une phrase de Nietzsche tirée de «Au-delà du bien et du mal: «Il n'y a pas de phénomènes moraux, rien qu'une interprétation morale des phénomènes.» Deux séquences qui nous plongent tout au long du film sur le combat des femmes qui assument une grande part du combat pour la vie, mais semblent exclues de la démocratie participative villageoise, d'une part, et la question relative à la morale dans la vie villageoise d'autre part Il traite du droit de l'être humain de vivre à sa manière, mais sans faire du mal aux autres. C'est le cas de Koukou, le petit frère de Mahmoud, professeur de philosophie, qui essaie de créer son propre monde, un monde de liberté. Il est très différent des hommes du village qui sont aux yeux de son frère Mahmoud des êtres mort-vivants. L'exception du village est incarnée par M'hand, retiré de la vie commune du village, qui a fini par se suicider, et Mustapha, un ex-émigré, qui a vécu avec sa femme française dans ce village même avant que cette dernière ne l'abandonne et en emmenant avec elle leur unique fille. Ces villageois («mort-vivants») ne veulent ni voir la vie, ni vivre normalement. Ils sont sous l'influence de leurs esprits conservateurs. C'est pourquoi ils sont devenus jaloux de Koukou, surtout que leurs femmes l'admirent pour sa gentillesse et sa façon de voir les choses. Entre la philosophie qui fait penser à entrevoir un autre monde et la poésie qui fait rêver, la réalité de la vie rattrape Mahmoud au fond de lui. C'est ainsi qu'il envisage d'entreprendre la seule solution qui est plutôt réaliste. Quitter le village afin de sauver son frère Koukou, sa maman et sa soeur Jura du pouvoir sadique de son père et celui du comité des sages du village. Voler de leurs propres ailes comme cela a été bien illustré par l'oiseau en cage rendu à la liberté.