Le ministère de l'Agriculture a récemment autorisé l'importation de bovins à l'effet d'engraissement pour l'abattage, ainsi que de la viande pour la consommation, à partir du 1er septembre prochain. Cette décision qui répond à une situation de tension sur le marché national de la viande est diversement appréciée par les professionnels de la filière en Algérie. Ainsi, outre que ces importations n'apportent aucune plus-value en terme d'intégration du process de production, censé agir positivement sur la filière, cette manière de faire dans le «goutte-à-goutte» n'aura aucun effet sur les prix à la consommation, avertissent certains acteurs de la filière viande en Algérie. Le président de la Fédération nationale des importateurs de viandes, Sofiane Bahbou, retient justement une carence significative dans la communication de la décision ministérielle. Même si sur le fondement, «nous saluons le principe du retour des importations, principalement en raison des tensions qui font grimper le prix de la viande à des niveaux inédits», il reste, selon Sofiane Bahbou que d'ici au 1er septembre, la mercuriale ne cessera de grimper. «Au jour d'aujourd'hui, la viande ovine est cédée à 2800 dinars le kilo chez le boucher. Le faux filet coûte 2900 dinars, le filet 3900 dinars. Cela pour souligner l'ampleur de l'inflation», note Sofiane Bahbou qui trouve aussi que sur la forme, les professionnels regrettent le fait que cette décision n'ait pas été prise après consultation de tous les acteurs de la filière. «Maintenant si on cherche, à travers cette décision, à casser les prix, il aurait été préférable que ces importations englobent aussi la viande en carcasse et la viande en sous-vide en carton». Pour ramener le marché à ses niveaux d'avant cette folle inflation, «il faut agir de manière massive», argumente le président de la Fédération nationale des importateurs de viande. En d'autres termes, «diversifier les sources d'approvisionnement, mais agir aussi sur toutes les catégories de viandes qui devront se retrouver sur les étals des bouchers», propose Sofiane Bahbou qui estime que le seul moyen de casser les prix consiste en la hausse de l'offre qui «doit être d'entrée massive et disponible à travers les 59 wilayas du pays», insiste-t-il. Sortie de cette logique commerciale universelle, «nous risquons de nous retrouver dans le scénario du Ramadhan où les importations de viandes opérées par Alviar n'ont eu aucun effet sur les prix», argumente notre interlocuteur. Rappelons, à ce propos qu'à l'exception du millier de points de vente d'Alviar, «les prix n'avaient pas cessé de grimper durant le mois sacré», note Sofiane Bahbou qui fait un constat peu reluisant de la situation de la filière à un mois du retour des importations annoncées par le ministre de l'Agriculture. «Pour l'heure, les ménages algériens consomment la viande de l'Aïd El Adha qu'ils ont congelée. Mais les réserves s'épuisent. La demande va donc reprendre et je doute que le marché de la viande ovine, dans sa configuration actuelle, puisse absorber cette nouvelle demande sans effets sur les prix. Nous allons vers un autre état inflationniste». Sofiane Bahbou fait le même constat pour la viande bovine, dont les prix de gros sont hors de portée d'une bourse moyenne. L'importation s'avère donc une solution incontournable à court terme. Le président de la Fédération nationale des importateurs de viande s'interroge sur la nature des cahiers des charges. «Il faut absolument diversifier les partenaires à l'échelle de la planète. Et j'insiste sur la multiplication des catégories de viandes importées et l'ouverture aux opérateurs privés. Ce sont des conditions sine qua non pour espérer agir sérieusement sur l'offre et la demande», conclut Sofiane Bahbou.