Dans un communiqué commun, publié hier, les gouvernements burkinabé et malien ne sont pas allés par trente-six chemins pour considérer que «toute intervention militaire contre le Niger serait considérée comme une déclaration de guerre contre le Burkina Faso et le Mali».Ils ont souligné que «toute intervention militaire contre le Niger entraînerait un retrait du Burkina Faso et du Mali de la Cédéao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest), ainsi que l'adoption de mesures de légitime défense en soutien aux forces armées et au peuple du Niger». Et pour mieux enfoncer le clou, ils ont affirmé leur refus d'appliquer «les sanctions illégales, illégitimes et inhumaines contre le peuple et les autorités nigériennes» décidées par le sommet d'Abuja. Hier, c'était aussi le début de l'évacuation par la France de ses ressortissants. Par-delà les réactions occidentales uniformes, il est clair que la crise du Niger affecte plus particulièrement Paris où un ancien ambassadeur a déploré dans une chronique publiée par le journal Le Point «l'aveuglement français sur le continent africain», tout en espérant que ces évènements au Niger «serviront de déclic». Le fait est que le coup d'Etat a donné une nouvelle dimension à la lutte d'influence qui oppose la Russie aux alliés occidentaux dans la région sahélienne et, plus largement, dans le continent africain. Cela est vrai même si Moscou a appelé dimanche les militaires nigériens à la «retenue» et a exhorté au respect de l'ordre constitutionnel. Ce discours est venu à contresens de celui de la Cédéao qui, après avoir haussé le ton par rapport aux défis antérieurs du Mali, du Burkina et de la Guinée, n'hésite plus à brandir la menace d'une intervention militaire pour rétablir le statu quo ante. Les médiations qui se déroulent en coulisses pour remettre en selle le président Mohamed Bazoum et pousser les militaires putschistes à l'intérieur de leurs casernes respectives peuvent, peu-être, aboutir à un retour à l'ordre constitutionnel tel que réclamé par la Cédéao, l'Union africaine et l'ONU. Mais cela ne changera pas grand chose au fait que le volcan s'est réveillé et que l'onde de choc des sentiments envers la politique jugée «néocoloniale» de la France dans la région sahélienne et, singulièrement dans les pays concernés par le défi terroriste de la région des Trois frontières, va se propager tant elle est vécue comme une vague libératrice d'une oppression et d'une exploitation devenues insupportables.