Le général qui a renversé le président Ali Bongo Ondimba au Gabon il y a deux jours a promis vendredi des institutions «plus démocratiques» et respectueuses des «droits humains», mais sans «précipitation». Le général Brice Oligui Nguema a également ciblé «la corruption» de l'ancien pouvoir de M. Bongo, dont la famille dirigeait ce petit Etat d'Afrique centrale riche de son pétrole depuis plus de 55 ans. Lors de rencontres menées à un rythme effréné avec «les forces vives de la Nation», des partis, le corps diplomatique, les organisations internationales et les bailleurs de fonds, il a insisté sur le fait qu'il voulait rassurer à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. Mais en promettant une nouvelle Constitution et un nouveau code électoral, le nouvel homme fort du Gabon, qui doit prêter serment en tant que «Président de la transition» lundi, a fermé la porte aux principaux partis de l'ancienne opposition qui l'exhortaient à rendre le pouvoir aux civils en le confiant à Albert Ondo Ossa, arrivé deuxième à la présidentielle du 26 août, qu'elle considère comme frauduleuse. L'armée dit avoir perpétré son putsch mercredi parce que les résultats proclamant M. Bongo réélu avaient été truqués et que son régime était marqué par une «gouvernance irresponsable et imprévisible» ainsi que par la corruption. Le général avait convié vendredi le corps diplomatique et les organisations internationales mais les pays, occidentaux et africains notamment, ayant condamné le coup d'Etat n'ont pas dépêché leurs ambassadeurs mais des diplomates de rang inférieur, ont témoigné des participants. Le ministre français des Armées Sébastien Lecornu a tenu à différencier les coups d'Etat au Gabon et au Niger.»La France condamne tous les coups de force (...) Pour autant, nous ne pouvons pas mettre sur le même plan la situation au Niger, où des militaires illégitimes ont destitué un président légitimement élu, et celle du Gabon, où le mobile avancé par les militaires est précisément le non-respect de la loi électorale et de la Constitution. Car de fait, et, je pèse mes mots, il existe des doutes sur la sincérité des élections dans ce pays», a-t-il souligné. Le leader du putsch a affirmé que la dissolution des institution était «temporaire», assurant qu'il s'agissait d'en faire «des outils plus démocratiques», notamment en «matière de respect des droits humains, des libertés fondamentales, de la démocratie et de l'Etat de droit mais aussi de la lutte contre la corruption qui est devenue monnaie courante dans notre pays». Devant la société civile, le général Oligui, chef de la toute puissante garde prétorienne de la famille Bongo, a ensuite promis une nouvelle Constitution, et un nouveau code électoral, mais sans «confondre vitesse et précipitation».»Qui va lentement, va sûrement», a-t-il asséné. Bongo est en résidence surveillée à Libreville depuis le coup d'Etat. Sylvia Bongo, son épouse franco-gabonaise, est également détenue au secret, avec son autre fils Jalil, ont indiqué ses avocats qui ont déposé une plainte en France pour détention arbitraire. Lors d'un discours jeudi retransmis vendredi par les télévisions d'Etat, le général Oligui a sermonné plus de 200 chefs d'entreprises gabonaises en accusant certains d'avoir participé à la corruption. Il les a menacés de poursuites en accusant bon nombre d'entre eux d'avoir alimenté la corruption au sommet du pouvoir. Le regard noir, il leur a reproché un manque de «patriotisme», les a sommés de «se remettre en cause» et de «stopper» la pratique répandue de la «surfacturation» dans les contrats avec l'Etat, donnant lieu à des rétro commissions à de hauts responsables. Au même moment, les télévisions publiques diffusaient des images de l'un des fils du président déchu, Noureddin Bongo Valentin, et d'autres jeunes proches de lui «et de la Première Dame»-, hauts responsables du cabinet de M. Bongo, tous arrêtés le jour du putsch. Ils étaient montrés devant des malles, cartons et sacs débordant de liasses de billets de banque pour des «milliards de francs CFA» (millions d'euros). Les putschistes les accusent - Noureddin Bongo inclus - de «haute trahison», «détournements massifs de deniers publics» et «falsification de la signature» du chef de l'Etat.