C'est du moins ce qu'a laissé entendre, hier, le secrétaire général de l'ONU en visite en Egypte. Plus de trois semaines après la fin de la guerre, et en violation de la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l'ONU, qui a mis un terme à la confrontation armée entre le Hezbollah et Israël, ce dernier n'a toujours pas levé un blocus qui asphyxie peu à peu le Liban. Le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, qui était hier en Egypte, ultime étape de son périple proche-oriental, a estimé que le blocus serait levé dans les quarante-huit heures. Affirmation qu'il a toutefois nuancé dans un entretien paru, hier, dans le quotidien madrilène El Païs. A Alexandrie, où il a eu des entretiens avec le président égyptien, Hosni Moubarak, le secrétaire général de l'ONU a en effet affirmé -lors d'un point de presse avec le ministre égyptien des Affaires étrangères Ahmed Aboul Gheit- «Nous travaillons tous très dur et avec un peu de bonne volonté et de raison, nous devrions être capables de résoudre cette question dans les prochaines 48 heures», M.Annan a également confirmé avoir nommé «un médiateur en vue de faciliter le règlement» de l'affaire des prisonniers entre Israël et le Hezbollah. «J'ai de l'espoir, a-t-il indiqué, que mon médiateur sera capable de travailler efficacement et rapidement avec les parties pour dégager une solution acceptable pour les deux». M.Annan a aussi admis la fragilité du cessez-le-feu, estimant que la trêve au Liban, entrée en vigueur le 14 août, était «fragile» ajoutant toutefois, «nous prenons des mesures pour consolider le cessez-le-feu». Cependant, dans son entretien au quotidien El Païs, Kofi Annan a été moins catégorique sur la levée de l'embargo qui étouffe le Liban en nuançant son propos, en estimant que la levée du blocus est liée à la mise en place de la nouvelle Finul (Force internationale des Nations unies pour le Liban). Or, il est fort douteux que la force internationale de stabilisation qui doit se positionner au sud du Liban, achève son installation dans les deux jours à venir. Ainsi, le secrétaire général des Nations unies a indiqué à El Païs, que l'armée israélienne «devrait se retirer du Liban Sud» dès que la Finul sera devenue «une force crédible». «Quand nous compterons sur une force crédible sur le terrain, je pense à 5000 soldats internationaux, Israël devrait se retirer (du Liban-Sud) sans attendre le déploiement total des 15.000 hommes prévus», déclare M.Annan dans cet entretien accordé alors qu'il se trouvait en début de semaine au Qatar. De fait, tant il est peu probable que la Finul finalise son installation dans les prochaines quarante-huit heures, se pose également la question du désarmement du Hezbollah, dont Israël fait une condition sine qua non pour lever le blocus imposé au Liban. Ce qu'affirmait, hier, un porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Marc Regev, selon lequel «lorsque le gouvernement libanais, aidé par les forces internationales, sera prêt pour faire appliquer un embargo sur les armes destinées au Hezbollah, Israël sera disposé à lever les restrictions sur les mouvements des personnes et des marchandises» vers le Liban. Et le porte-parole de la diplomatie israélienne d'ajouter: «Nous n'allons pas lever les restrictions avant d'être sûrs que cette disposition prévue par la résolution 1701 soit mise en oeuvre» se référant à un embargo sur les armes. Il est patent que par «embargo sur les armes» Israël entend de fait l'élargissement du contrôle international aux frontières entre le Liban et la Syrie, par le positionnement d'unité de la Finul dans la Bekaa pour empêcher «la contrebande d'armes» au profit du Hezbollah. Or, Damas, comme le rappelait récemment le président syrien, Bachar Al Assad, s'oppose fermement à un positionnement de la Finul à ses frontières, menaçant de fermer ses frontières avec le pays du Cèdre, ce qui aggraverait la situation du Liban. L'un dans l'autre, on ne voit pas comment le secrétaire général de l'ONU compte procéder pour, d'une manière ou d'une autre, amener Israël à mettre un terme à un blocus qui met à mal le Liban. Cela d'autant plus que le Hezbollah n'est pas prêt à désarmer comme l'indiquait son dirigeant Hassan Nasrallah au quotidien libanais As Safir. Le chef du Hezbollah a, en effet, affirmé: «Nous garderons (missiles et roquettes), sans les utiliser. Nous ne les utiliserons qu'en cas de guerre d'envergure lancée contre le Liban», estimant que la «résistance», au même titre que l'armée régulière, «a le devoir de défendre le pays». De fait, la Finul n'a pas pour mission de désarmer le Hezbollah, disposition figurant certes dans la résolution 1701 que d'ailleurs le Hezbollah conteste. Or, pendant que l'on tente de trouver le moyen de faire lever un blocus qu'Israël applique au Liban, en contravention avec le contenu de la résolution 1701, c'est l'économie libanaise, étranglée par l'embargo, qui en essuie le contre-coup et se trouve plongée dans une crise aiguë alors que la faillite menace plusieurs entreprises ayant subi d'énormes pertes occasionnées par le blocus aérien et maritime qu'Israël continue d'imposer au Liban trois semaines après la fin de la guerre.