La France tout en refusant d'assumer son passé colonial, fait dans la provocation. De la glorification du colonialisme, à travers la loi du 23 février 2005, à sa définition tout aussi tendancieuse que revancharde du Petit Robert, ce sont là les signes révélateurs des réflexes d'un Etat colonial, qui ne feront qu'exacerber la tension entre la France et ses ex-colonies. D'autant que la nouvelle définition du Petit Robert coïncide avec la rentrée des classes, une façon d'inculquer aux élèves des notions complètement erronées et sèmeront la discorde entre eux et leurs camarades des autres communautés. Mouloud Aounit, président du Mrap constate «une nouvelle tentative de réhabilitation et de glorification du colonialisme». «On demande donc aux gens, qui ont le choix, de ne pas acheter le Petit Robert», a-t-il dit, à la veille de la rentrée des collèges et des lycées. Le Mrap entend également interpeller les parents et les enseignants sur «l'influence» de ce dictionnaire et de ses procédés «sournois et insidieux». Ainsi, et quelques mois après la polémique sur l'article 4 de la loi du 23 février 2005, qui avait contraint Jacques Chirac à abroger cet article qui évoquait «le rôle positif» de la colonisation, voilà que la provocation reprend de plus belle. Ce qui n'a pas manqué de soulever un tollé général au sein du Conseil consultatif des associations noires de France (Cran) et le Mrap, qui ont réclamé, mardi dernier, le retrait pur et simple de l'édition 2007 du Petit Robert pour sa définition des mots «colonisation» et «coloniser». M.Aounit l'a rappelé à juste titre que «ce qui a été interdit dans la loi du 23 février au plus haut niveau de l'Etat est en train de revenir dans les classes par le Petit Robert». La réaction de l'éditeur ne s'est pas fait attendre, puisque la direction du petit Robert a dénoncé ce qu'elle appelle des «raccourcis» des associations sus-citées. Se justifiant, Le Petit Robert estime, dans un communiqué, que «rien dans la définition» des mots colonisation et coloniser ne justifie, les attaques du Cran. «Le procédé est connu: des raccourcis, des termes pris isolément en dehors de leur contexte», avant d'ajouter que les définitions du Petit Robert «ne sauraient, en aucun cas être dictées par de quelconques groupes de pression». Pour sa part, l'historien Pascal Blanchard a souligné, hier, que la France n'était pas encore prête pour «un débat pacifique» sur son histoire coloniale. L'auteur de la République coloniale (2003) et la fracture coloniale (2005) a évoqué l'émergence en France de réflexes d'un Etat colonial qui entravent le processus de dialogue, notamment le traité d'amitié entre Paris et Alger, sur cale depuis trois ans. Pour cet historien de renom qui s'exprimait, à Paris, lors d'une conférence-débat il est donc permis de considérer que, la France, tout en refusant d'assumer son passé colonial fait dans la provocation. Ce qui ne fera qu'élargir le fossé entre les Français d'origine et ceux issus de l'émigration. Le brasier des banlieues ne s'est pas encore éteint.