Nous sommes vendredi 28 juillet 2023. La police judiciaire a démantelé un important trafic de cocaïne à Alger. Pas moins de 35,9 kg, dissimulés au niveau d'un navire étranger qui avait accosté au port d'Alger, ont été saisis. Cette opération est l'aboutissement d'une investigation lancée par les services de la police judiciaire, en collaboration avec les gardes-côtes. Deux jours plus tard, à Blida, le Service central de lutte contre le trafic illicite des stupéfiants (Scltis) relevant de la Dgsn déjoue l'une des plus grandes opérations de trafic de cocaïne et saisi 79 kg et 400 g de cette drogue. 16 criminels ont été arrêtés dans cette affaire. Ces deux grosses prises rappellent la fameuse affaire des 701 kilogrammes de cocaïne saisis au port d'Oran. Mais les spécialistes de la lutte contre la drogue mettent en évidence quelques différences et ne manquent pas d'afficher leur inquiétude, en ce sens que la cargaison découverte à Oran était visiblement destinée à être réexportée. Mais les 35 et 79 kg de cocaïne étaient, estiment-ils, dirigés à la consommation locale. Les trafiquants à l'origine de ces quantités sont des grossistes de taille importante. La marchandise valait entre un milliard et deux milliards de dinars. C'est gigantesque, mais ne reflète pas la taille réelle du marché qui pèserait sans doute dix fois plus, sachant qu'habituellement, les «importateurs» qui aliment les grossistes, manipulent des quantités autrement plus importantes. Le danger que font courir les trafiquants de cocaïne au pays est d'autant plus grand, que les saisies des services de sécurité ont remonté jusqu'au semi-grossiste. La dernière affaire en date est celle de la mise en échec d'un réseau qui comptait écouler 2,5 kilogrammes de cette drogue à Relizane. Un pactole de près de 50 millions dinars! Cela donne une idée sur la puissance du réseau à l'intérieur du pays. Cette remontée dans la filière de la cocaïne en Algérie débouche sur des dealers en possession de quelques grammes, destinés au client final. Les saisies effectuées par les services de sécurité démontrent que l'Algérie n'est plus un pays de transit de cette drogue dure. Une partie de la cocaïne clandestinement débarquée sur les ports ou traversant les frontières ouest et sud-ouest du pays est injectée dans un ou plusieurs réseaux criminels, visiblement bien organisés, avec leurs grossistes, leurs «mules», leurs semi-grossistes, leurs dealers et leurs niches de consommateurs. Il est clair, au regard des quantités récupérées par les services de sécurité, que l'ampleur du trafic est inquiétant. Outre les drogues classiques et les psychotropes, on remarque l'apparition de la cocaïne dans les milieux de la jeunesse en Algérie. Son prix est actuellement élevé, mais l'ampleur du trafic fait craindre une baisse rapide, histoire de sortir des «niches», mais aussi en raison d'une concurrence entre trafiquants qui ne manquera pas de s'installer. Cet état de fait amène à se poser des questions sur les origines de cette montée du trafic. La réponse est dans des rapports de l'ONU et d'autres organisations internationales versées dans la lutte contre le trafic de drogue. Des informations sûres, basées sur des investigations de services de sécurité américains et européens signalent une collusion entre les cartels marocains et leurs homologues sud-américains. Les premiers ont mis à la disposition des seconds les routes de la drogue qui traversent le Sahel et remontent vers l'Afrique du Nord pour atteindre l'Europe occidentale. Mais les Marocains ne se sont pas contentés de rendre leur kif plus addictif et accompagner les trafiquants sud-américains, ils ont également mis au service de leurs alliés les connexions établies avec leurs clients en Algérie. Ces derniers se sont organisés pour laisser une partie de la marchandise sur place. Il la font «ruisseler» au sein de leurs réseaux. L'intention criminelle est plus qu'évidente, mais il y a également dans la démarche une volonté d'affaiblir l'Algérie en dévoyant sa jeunesse. Le propos ne relève pas de la fiction, puisque pareil stratagème a déjà été utilisé au Vietnam contre les soldats américains et lors des deux guerres de l'opium menées par les Occidentaux contre la Chine en 1839 et 1856. Le rapport qu'entretient le pouvoir marocain avec les barons de la drogue, permet au Makhzen d'envisager ce genre de guerre contre l'Algérie.