Hamid Skif est reconnu par la critique mondiale comme l'une des voix majeures de la littérature algérienne contemporaine. Quand vient la fin de l'été sur la plage... chante Laurent Voulzy. Nous sommes, d'emblée, submergés par une certaine mélancolie semblable à la lecture des poèmes de Hamid Skif. Reconnu par la critique mondiale comme l'une des voix majeures de la littérature algérienne contemporaine, ce poète dont la poésie est «sa voie royale», son «journal intime» d'après ses termes, vit depuis 1997 à Hambourg. Son roman Monsieur le Président, a obtenu le Prix de la ville de Heidelberg qui récompense, tous les trois ans, la meilleure oeuvre publiée par un auteur étranger vivant en Allemagne. Hamid Skif possède également à son actif ce recueil de poèmes intitulé Les exilés du matin, poèmes suivis de Lettres d'absence. Le tout publié récemment et sorti aux Editions Apic. Dans l'incipit de l'ouvrage, Hamid Skif précise écrire depuis des années de la prose mais la poésie demeure sa préférence. Et de confier son rêve de voir un jour «où nous construirons en Algérie, non pas une mais des Maisons de la poésie pour recueillir notre fabuleux patrimoine et offrir un refuge aux poètes de tous les horizons (...) un havre de beauté et de silence où ils pourront écrire et méditer». Hamid Skif prévient que ce présent recueil clôture une période de sa vie sans appartenir à un cycle déterminé ; plutôt, il constitue «un simple témoin dans une existence à la poursuite du bonheur. Il est aussi dédié à ces milliers d'enfants, de femmes et d'hommes victimes de la cruauté du siècle et de la barbarie de ceux qui croient que Dieu leur a confié une mission d'imposer leurs idées moyenâgeuses et de barrer la route du progrès». Ainsi, Les exilés du matin se veut comme un recueillement qui met un temps d'arrêt pour contempler ce qui nous entoure. Temps, nature et amour sont les trois thèmes fondateurs de cette poésie pleine de générosité et de bonté. Il y a comme une senteur de nonchalance, d'évanescence qui se dégage de cette poésie dont le ton prend par moment son envol pour atteindre le sommet d'un arbre, flirter avec le vertige ou souder les blessures de l'âme. Comme des pages de confidences intimes, Hamid Skif couche ses pensées poétiques, se souvient de «tout de rien encore», de ses souvenirs d'enfance dans «cette maison», ses voyages, ses confessions de papier buvard, à la magie des mots, de la sensualité de la femme... de solitude aussi en dépit de tout. Dans Lettres d'absence, Hamid Skif s'adresse à un «absent» qui, pourtant, est bien réel et pesant de tout son poids par le vide qu'il place dans son coeur. Une déclaration pleine de sincérité, désarmante en verve, prolixe en tendresse. «Oh! je t'aime tant que répéter ce mot me semble m'habiter. J'en ferai une hutte, un front sans mesure sous l'arche duquel viendront se reposer les astres perdus. Mon amour au bout de la page, ma déchirure, je t'aime et personne ne pourra jamais me quitter ni venir à moi sans le savoir. Voilà ! les mots sont les mots et je n'y peux rien. Tu recevras cette lettre et nous serons, l'espace d'une respiration, récompensés d'avoir cru aux choses anodines qui meublent l'espérance», écrit le poète transi. L'auteur laisse planer son imagination vagabonde. Ici, dans le jardin, là, dans cette ville tombée en ruine, dans cette «cité-farouche», village où il est revenu assister aux funérailles de son père. Ainsi donc, c'est lui l'absent? Hamid Skif confie ainsi son amertume d'avoir quitté ses parents presque en les abandonnant suite à des menaces terroristes. Hamid Skif parle de son quotidien morose, là-bas, en exil, du temps qui passe, l'oreille vissée à la radio, s'il n'est pas en train d'écrire le soir. Et puis soudain, c'est le bonheur de constater la préciosité de ces petites choses anodines qui nous entourent et forment la vie, ces gens, ces regards. C'est ainsi que le poète se raconte et nous fait pénétrer son monde et sa philosophie faite d'authenticité et de respect «pour ceux de la marge et leur recherche éperdue du bonheur». Idéaliste et humaniste avant tout, Hamid Skif; il convient de lire son recueil de bonnes feuilles.