Témoignage n Toute l?inspiration poétique de l?auteur est irriguée par une vie tantôt tumultueuse, tantôt paisible. Hamid Skif, reconnu par la critique mondiale comme l?une des voix majeures de la littérature algérienne contemporaine, publie, aux éditions Apic, Les Exilés du matin, un recueil de poèmes qui, selon l?auteur, clôture une période de sa vie. Ces poèmes constituent le simple témoignage d?une existence à la poursuite du bonheur. Il y a, en effet, à travers cette poésie, une quête de lumière et de joie, d?amour et de générosité, de conscience universelle et de rapports humains, une quête aussi de solidarité, et ce, dans une existence où la condition de l'homme n'a presque plus rien d'humain. Ces poèmes surgissent tantôt dans un bruissement évanescent, tantôt dans les cris fracassants d?une conscience endolorie, quotidiennement labourée par des défaites et des ruptures, une souffrance qui va ? longuement ? se prolonger et dans l?espace et dans le temps. Le poète, tourmenté, frissonnant, fuit, va de par le monde «mourir sur l?herbe fragile». Toute l?inspiration poétique de Hamid Skif est irriguée par une vie tantôt tumultueuse, tantôt paisible. Et si sa poésie est agitée, c?est parce que le poète est en soi tourmenté : «Je suis né d?une nuit d?orage / Dans la boîte de carton / Où meurent les rêvent de bouts de bois.» Le poète ne vit plus parce qu?il n?a plus de rêves. Il a perdu sa foi en la vie, en l?homme, et il n?a de salut que dans la poésie, des mots qui lui restent et qu?il arrache à la vie et dans chacun il projette une partie de lui-même. Chaque poème raconte donc un épisode d?une existence devenant indifférente, cruelle ? «la vie est comme l?hiver qui plante ses crocs dans un corps tailladé par des blessures récentes, ou comme l?été qui lâche ses griffes sur une peau sur laquelle les plaies tracent déjà leur chemin de sang» ? et dont le poète n?entend plus l'écho. Elle ne résonne plus. Elle devient muette. Insensible à ses cris, à ses plaintes et à l?amour. Le poète a aimé «si près et si loin» : «J?ai aimé sur cette terre», écrit-il. Puis il a cessé d?aimer. Car «l?obscurité jette sa jupe sur les toits» et «de l?arbre maudit des ténèbres / D?une pierre de larmes concassées / Vient le bruit furieux des galops.»