A l'approche des échéances électorales, le débat relatif au contrôle des mosquées est remis sur le tapis. Même si, officiellement, le ministère des Affaires religieuses continue d'adopter un discours rassurant, estimant que les temps ont changé et que les mosquées «sont actuellement à l'abri des discours partisans», il est à noter que les autorités concernées semblent être conscientes de cet enjeu, en renforçant, au fur et à mesure, la machine de contrôle. C'est ainsi que des directives et des instructions interministérielles ont été élaborées avec comme objectif principal la responsabilisation du rôle de l'imam. La conférence d'orientation consacrée aux imams et aux mourchidate (conseillères religieuses), organisée conjointement par le Haut Conseil islamique et le ministère des Affaires religieuses, s'inscrit en droite ligne de cet objectif, même si les organisateurs ont voulu insister, en substance, sur le fait que cette occasion était avant tout un cadre de formation et d'orientation. Il suffit de signaler que la communication de Ghallamallah partait d'ailleurs d'une approche «politico-religieuse» visant à redonner à la mosquée sa véritable place dans la société «comme un espace pour l'enseignement et l'éducation religieuse». Faut-il signaler que ce lieu avait perdu son caractère sacré avec l'avènement du multipartisme. Il a servi de tribune pour la propagande partisane, essentiellement à l'ex-FIS. On se rappelle, aujourd'hui, les prêches incendiaires de Ali Benhadj ou encore de Abassi Madani. Avec l'apparition du terrorisme, ce lieu a été pris en otage par les prédicateurs du djihad. Certains imams ont même payé de leur vie le fait d'avoir refusé de prononcer des fetwas à ce sujet. Mais selon le chef de cabinet de la tutelle, les mosquées sont totalement contrôlées et les dépassements ne constituent, en effet, que des cas isolés. «L'imam a un contrat et un engagement à respecter. S'il faillit à sa mission, il sera sanctionné par les différents conseils scientifiques», appuie-t-il. A l'approche des élections législatives et municipales, des partis islamiques tentent, tant bien que mal, de contrôler ce lieu. Mahfoud Nahnah s'est adressé, lors d'un mémorandum confidentiel, envoyé en octobre dernier aux imams. Il les a invités à développer la thèse concernant la réhabilitation de l'idée du califat islamique, «car vous occupez des postes sensibles». Les autorités officielles n'ont pas réagi. Mais un responsable des Affaires religieuses avait qualifié cette sortie, dans une récente déclaration à notre journal, de «tentative visant à piéger le ministère des Affaires religieuses dans des dérives politiques». Contacté par nos soins, le vice-président d'El-Islah, M.Abdelghafour Saâdi, développe une approche bien particulière quant au rôle de la mosquée. Notre interlocuteur estime que la mosquée ne devrait en aucun cas se transformer en une tribune de propagande partisane. «Il est, par ailleurs, injuste d'interdire à l'imam de se prononcer sur les préoccupations des citoyens», y compris celles liées à la vie politique. «Le courant laïque stigmatise la politisation des mosquées.» Il a affirmé, dans ce même contexte, que son parti n'a nullement l'intention d'utiliser ce lieu aux fins de la prochaine campagne électorale. Force est de constater qu'aujourd'hui et malgré les discours optimistes de la tutelle, un grand nombre de mosquées continue à échapper au contrôle de l'Etat dans les régions enclavées ou encore dans les banlieues d'Alger ou ailleurs. On cite, à titre d'exemple, une mosquée d'El-Harrach, dont les prêches extrémistes de son imam - un repenti - ont obligé les fidèles à opter pour un autre lieu de prière, ou encore à Boumerdès, où l'on signale que des groupes salafistes essaient de s'organiser afin d'entraver le rôle de l'imam considéré comme émissaire du pouvoir.