Le pipe de Baraki, à l'origine de l'eau douteuse dans les robinets, constitue bel et bien un risque majeur pour la population. L'affaire de l'infiltration de mazout dans la conduite d'eau potable met Naftal dans de beaux draps. C'est le huitième incident depuis 1990, confirme-t-on auprès du ministère de l'Environnement. Il y a bel et bien transgression de la réglementation en vigueur. Selon la loi, il est interdit d'installer une conduite d'hydrocarbures à une proximité ne dépassant pas les 75 mètres de celle d'eau potable. Cette proximité concerne les canalisations placées dans la nature, pour celles en pleine zone d'habitations, la réglementation n'autorise pas deux conduites à moins de 35 mètres. Le cas Baraki est criant. Mais Naftal, au bout du compte, s'en est, une fois de plus, sortie indemne. En effet, les tests viennent de sourire à cette entreprise. Pas d'agents de toxicité ni mort d'homme, mais le danger est bel et bien réel. Car, en toile de fond, c'est l'éternel problème des risques majeurs urbains qui refait surface. La conduite d'hydrocarbures qui va de la raffinerie d'Alger vers la Chiffa passe tout près d'une zone d'habitations, mais carrément à côté. C'est le risque maximum. Selon un directeur de l'environnement, Naftal est à son huitième incident dans l'unique zone de Baraki, infectant ainsi la nappe phréatique. Le champ captant de Baraki est l'un des plus importants et représente 10% du total du réservoir qui alimente le Grand Alger. La couverture quotidienne des besoins, à partir du champ captant de Baraki 35 forages, est de 50.000 m3. L'hypothèse consistant à ester cette entreprise en justice tient toujours la route. Car, pointée du doigt à maintes reprises pour non-respect de la réglementation, Naftal, censée écarter le danger, traîne toujours lamentablement la patte. Le ministre des Ressources en eau, approché lors d'un déplacement sur le lieu de l'incident, a reconnu, sans ambages, qu'il existait bel et bien une négligence de la part de Naftal. «C'est inacceptable et impardonnable par la loi qu'il y ait un passage d'un pipe près d'une conduite d'eau et d'une ville», explique Abdelmalek Sellal. Le cas de Baraki passe pour être l'illustration parfaite d'une inconscience manifeste des autorités locales, voire nationales. La sonnette d'alarme, tirée à maintes reprises, a permis d'envisager la déviation du pipe loin de la zone d'habitations. Néanmoins, depuis les premiers incidents à nos jours, Naftal se contentait de colmater les fuites renvoyant ainsi aux calendes grecques le projet d'éloigner la conduite d'hydrocarbures de la zone peuplée. Le pipe de Naftal a été installé en 1981, tandis que la canalisation d'eau potable remonte aux années quarante. Un fait qui laisse la parenthèse ouverte quant à la responsabilité de Naftal dans cette affaire d'«eau mazoutée» ayant touché plus d'une quinzaine de localités algéroises. Les inondations de Bab El Oued et le séisme de Boumerdès n'ont, semble-t-il, pas suffisamment réveillé les consciences des gouvernants. Il s'avère impératif, aujourd'hui, de songer à des plans d'action devant mettre en évidence les points faibles du système urbain. Les schémas doivent prendre en compte les quartiers comprenant des typologies vulnérables, les ouvrages stratégiques, particulièrement sensibles à de tel phénomène et pouvant poser des problèmes majeurs en cas de crise. Naftal devra, justement, commencer par là. Le cas de Baraki serait-il le dernier carton brandi à l'encontre de cette entreprise?