Ayant servi l'éducation nationale depuis 1992 et ayant bravé les pires années du terrorisme les enseignants contractuels se voient aujourd'hui rejetés par le système éducatif. Poussés dans leurs derniers retranchements, les jeunes enseignants livrés à eux-mêmes, puisqu'ils agissent hors de tout cadre syndical, refusent le sort qui leur est réservé. Venus des quatre coins du pays (près de vingt wilayas), ils sont plus de mille, femmes et hommes, à observer encore un sit-in devant le Palais du gouvernement. Hier, ils ont passé leur deuxième nuit à la belle étoile. Ni la proposition d'une rencontre avec le chef du cabinet du Premier ministre ni celle avec le ministre de l'Education nationale, M.Aboubakr Benbouzid, n'ont pu apaiser ce groupe de manifestants. Ils maintiennent mordicus leur objectif de rencontrer le chef de l'Exécutif en personne, M.Ali Benflis. Ce dernier n'a pu les rencontrer hier pour des raisons de planning - il recevait le président du Parlement allemand (Bundestag). Pourtant, il était sur le point de le faire, disent les membres d'une délégation invités à l'intérieur de l'enceinte du Palais du gouvernement où ils ont attendu plus d'une heure. Ces contractuels refusent toute tutelle politique ou syndicale, car, disent-ils, «personne n'a daigné lever le petit doigt lors de notre licenciement». Ils se sont organisés en un comité national de coordination pour revendiquer leurs droits. Et c'est de la bouche du Chef du gouvernement en personne qu'ils entendent obtenir les réponses à leurs questions. Las des solutions partielles et de rechange et après les négociations sans lendemain du 6 octobre 2001 avec leur tutelle, ces enseignants marginalisés en sont aujourd'hui à leur quatrième sit-in en quatre mois seulement. En fait, c'est le décret ministériel no 264 en date du 26 mai 2001 qui a mis le feu aux poudres. Or, les 16.000 contractuels à l'échelle nationale, tout en respectant et en reconnaissant la force de cette loi, s'insurgent contre le fait qu'elle ait un effet rétroactif sur les vacataires «recrutés». «Nous avons le capital expérience. Nous avons répondu à l'appel du devoir pour travailler dans les coins les plus reculés de l'Algérie profonde, dans une situation de guerre. Beaucoup d'entre nous en sont morts.» Hier, encore, tous ont passé leur deuxième nuit à la belle étoile pour dénoncer la précarité qui les mine. Eux qui veulent un recrutement effectif et rejettent l'accès au poste sur concours, lancent actuellement un appel de détresse au gouvernement, à M.Benflis, lui qui a déjà annoncé, lors de son dernier déplacement à Chlef, la disponibilité de 1.600 postes. Et quelque 4.000 autres, le 6 octobre. Néanmoins, ces milliers d'enseignants affirment n'avoir rien constaté de palpable. «Nous n'avons pas un pays de rechange», concluent-ils pathétiques. Ces enseignants grâce à qui nos écoles sont restées ouvertes, ont longtemps défié le danger pour vivre. Des années après, ils se révoltent contre l'ingratitude et n'acceptent pas d'être «jetés» comme de vieilles chaussettes. Du travail, de la dignité c'est ce qu'ils demandent... Sans faire la fine bouche.