Les exigences de La Friche Belle de Mai répondent d'abord à des choix d'ordre artistique. Pour clôturer le cycle cinématographique consacré par le CCF d'Alger au cinéaste Robert Guédiguian, Matthieu Colotte, secrétaire général adjoint de l'association Système Friche Théâtre, a proposé mercredi dernier, à la salle de projection du ccf, un regard sur la scène cinématographique marseillaise, ses acteurs, ses paradoxes et ses enjeux. Evoluant à la Friche belle de Mai, M.Colotte présentera d'abord, cette ancienne manufacture fermée en 1989, et 1991 le rôle prépondérant qu'elle joue à Marseille. Celle-ci, a-t-il avoué, appartient à la ville. Situé en plein coeur de Marseille, ce complexe culturel pluridisciplinaire est avant tout un lieu de création, de recherche et de diffusion de l'art (arts plastiques, danse, théâtre, cinéma et arts audiovisuels). Son principal fondateur du projet Friche est l'artiste et sa ville. La Friche répond à la seule exigence artistique. Elle existe depuis 1992 et a pour mission d'accueillir des groupe d'artistes, des sociétés de production ou de compagnies de danse jusqu'à 6 mois en résidences. Trois compagnies de théâtre se sont installés depuis. Aujourd'hui, La Friche c'est 60 structures qui se sont installées, 400 personnes y travaillent, 500 événements par an qui s'y déroulent, 1000 artistes français et étrangers par an la fréquentent, 110.000 personnes y viennent chaque année. Avec le metteur en scène Ziani Chérif Ayad, une collaboration est née qui se soldera par la présentation prochaine d'une pièce de théâtre en langue arabe. Les studios de la Friche y abritent le plateau de tournage du feuilleton qui passe sur France 3 Plus belle la vie. Marius et Jeannette de Guédiguian, Comme un aimant de Kamel Saleh et Le Petit voleur d'Eric Zonca notamment ont également été tournés ici. La Friche s'est ouverte au cinéma en 1994. Un tournage et des projections ont donné le coup d'envoi. M.Colotte évoquera le militantisme de Guédiguian et l'image que beaucoup de Marseillais font. Celle-ci relève toujours du documentaire. La Friche est composée, nous dit-on, de 20 structures de cinéma, 50 professeurs du cinéma y travaillent, 80 auteurs y ont créé leurs films (longs métrages, pub, vidéo...). La Friche est aussi des formations aux métiers techniques, de comédiens... le tout à partir de rien et sans moyens financiers mais en inventant sa propre économie de fonctionnement. Les grosses productions payent tandis que les autres sont accueillies gratuitement. M.Colotte dira que Marseille possède 3 multiplexe avec chacun entre 14 et 15 salles de cinéma répondant plus ou moins aux exigences commerciales. Comme partout, il faut reconnaître la prédominance de ce genre de marché qui rapporte au profit de films d'auteurs dont certains cependant, arrivent à sortir du lot comme ce fut le cas avec le Fabuleux destin d'Amélie Poulain. Revenant à la filmographie de Robert Guédiguian, le conférencier soulignera le réalisme social qui transparaît dans ses films, qui tend à dépeindre toujours des personnes en rapport avec l'histoire, ouvrière notamment et la revendication syndicale. C'est Marie-Jo et ses deux amours qui clôturera ce cycle. Marie-Jo, «conductrice médicale rattachée à un hôpital et depuis longtemps engagée dans la lutte syndicale, y décrète à ses collègues incrédules que désormais ils vont devoir se débrouiller sans elle, qu'elle a décidé de ne plus s'occuper que d'elle-même». Marie-Jo aime deux hommes d'un amour égal, son mari et son amant. Ni l'un ni l'autre ne veulent la partager. Difficile à renoncer à l'un deux. Et pourtant la fin est encore plus tragique. Guédiguian met en scène sa femme, Ariane Ascarid dans un rôle intimiste qui lui sied bien. La nature et la sensualité des corps baignés dans un océan de simplicité de ces gens ordinaires rend le film naturellement attachant.