Plusieurs hautes personnalités italiennes ont fait l'objet de consultations frauduleuses et illégales de leurs dossiers fiscaux. Deux cent cinquante perquisitions effectuées dans tout le pays, au domicile et au bureau, de 117 agents du fisc et de 10 membres de la guardia di finanza (police des finances), soupçonnés d'avoir consulté illégalement et frauduleusement les dossiers fiscaux des personnalités de premier rang du monde politique, économique, sportif et du spectacle. La plus spectaculaire entreprise «d'espionnage» à grande échelle -via Internet- des dossiers fiscaux des «grands qui dirigent le pays, tel le président du Conseil Romano Prodi, de son épouse Flavia Franzoni, du président de la République Giorgio Napolitano, et de tant d'autres...victimes de ces «consultations illégales» qui permettent de connaître dans le moindre détail le patrimoine financier, la position fiscale, les amnisties fiscales, ainsi que les donations». L'Italie est, une fois de plus, secouée par un de ces innombrables «scandales», qui surgissent -par à-coups- sur le devant de la scène, reléguant au second plan les problèmes importants que vit le pays, comme celle de la finanzaria, (la loi des finances), en discussion depuis plus d'un mois à l'intérieur de la fragile majorité. Cette finanzaria, ou le nouveau gouvernement Prodi essaie de remettre en marche et en ordre les comptes publics, et qui arrive avec peine à passer et à être comprise par une grande masse d'Italiens, de gauche comme de droite. Et l'aubaine est tellement «mûre et forte» pour l'opposition, qui en profite sur le coup, pour descendre manifester dans la rue, avec le slogan de «bugiardo» (menteur), mis en évidence par Silvio Berlusconi, dans son premier meeting de «protesta» contre son ennemi rival de la politique, Romano Prodi, l'accusant de «gros menteur» et de «Prodi Pinocchio». C'était à Vicenza, la semaine dernière. «Une loi de finances est efficace quand elle ne plaît à personne. Il faut en passer par là pour que le pays aille mieux», répond philosophiquement il Professore. Fermant cette parenthèse pour revenir à ce scandale fiscal qui touche l'Italie des «palazzi» (palaces). Après la grande affaire de Télécom et son vaste système d'écoutes clandestines et illégales ou de dizaine et dizaine de personnalités «écoutées» du monde qui «compte» et «décide» dans le pays et autres VIP, financiers, sportifs et du show-business d'où une vingtaine de personnes impliquées dans cette affaire a été mise aux arrêts. En voici un autre «cas» aussi important que les autres «scandales» qui s'annonce et met toute cette fourmilière, encore une fois, sur la sellette - qui écoute qui -et- qui espionne qui. Hauts responsables politiques, comme par exemple Massimo d'Alema le n°2, vice-président du gouvernement et ministre des Affaires étrangères, Piero Fassino secrétaire général des démocrates de la Sinistra, Carlo Azeglio Ciampi ex-président de la République, même «Il Cavaliere» Silvio Berlusconi et sa fille Marina. Des footballeurs de classe et de grandes fortunes, à l'exemple de Francesco Totti de l'As Roma, d'Alessandro Del Piero de la Juventus de Turin, également dans le collimateur des espions, ainsi que quelques stars du spectacle. A quoi rime ces consultations abusives, d'«espionnage politique délibéré», comme l'a dénoncé le vice-ministre de l'Economie. Cet événement inquiétant qui remet en mémoire «les années de plomb de la décennie 70» et le spectre du «pouvoir occulte», celui de la loge P2. Antonio Di Pietro, ex-magistrat de l'opération «Mani pulite» (mains propres), ministre du gouvernement, souhaite une commission d'enquête parlementaire «afin de savoir pour quelles raisons et par qui ces actes ont été diligentés». Le président de la République se dit «profondément troublé». Les proches de Berlusconi soupçonnent le gouvernement d'avoir voulu «soulever un nuage de poussière pour distraire l'opinion de ses difficultés». Mais Gianfranco Fini, président de l'Alliance nationale (AN),et ancien numéro deux «del Cavaliere», reconnait que «cet événement inquiétant (...) ne fait pas honneur à l'Italie» et «de punir de façon exemplaire les responsables». Romano Prodi déplore cette affaire d'espionnage fiscal, tout en soulignant la gravité. De son côté, la presse nationale par la voix de ces journaux s'interroge. La Repubblica se préoccupe de ces «pouvoirs occultes, qui, depuis quelques années, pèsent de nouveau sur la vie publique italienne, comme au temps de la loge P2». Le Corriere della Sera, «s'agit-il d'un réseau structuré ou ces consultations sont-elles le résultat d'une curiosité malsaine d'employés du fisc?» Il Sole 24 Ore, quotidien des finances et des milieux d'affaires se dit que, peut-être «ce climat d'alarme démocratique peut se révéler un coup de fouet pour la coalition au pouvoir». Après les scandales des années du gouvernement de la «Casa delle liberte» de Silvio Berlusconi, comme l'affaire des écoutes illégales ou le dérapage d'agents des services secrets italiens, complices de la CIA dans l'enlèvement de l'imam Abu Omar, survenu à Milano, voilà venu le temps de l'espionnage fiscal, au détriment surtout de la gauche au pouvoir.