A quelques jours des élections législatives partielles, George Bush a promulgué une loi finançant la construction, d'ici à fin 2008, d'une «clôture» de 1200km sur la frontière mexicaine pour tenter d'endiguer l'immigration clandestine. La palissade géante, qui coûtera 1,2 milliard de dollars, doit fermer les sections les plus poreuses des 3200km de frontière entre les Etats-Unis et le Mexique, à commencer par le désert de l'Arizona. Selon les chiffres officiels, 472 personnes ont péri en 2005, la plupart de déshydratation, en tentant de traverser ce désert. Deux fois plus qu'en 1999. «60% des 11 millions d'immigrants illégaux vivant aux Etats-Unis ont traversé à pied la frontière», explique Audrey Singer, experte sur les questions d'immigration à la Brookings Institution. Le «mur» est l'une des rares réalisations concrètes du débat sur l'immigration qui a occupé le Congrès pendant des mois. Il ne correspond qu'en partie au grand projet de réforme «globale» de l'immigration envisagé par Bush, qui souhaitait allier ce genre de mesure répressive à une régularisation temporaire d'une partie des clandestins. La dernière régularisation partielle a eu lieu sous Reagan, en 1986. Elle avait concerné 3 millions de personnes. Bush, ancien gouverneur du Texas, sensible à ces questions en raison de la longue frontière commune de cet Etat avec le Mexique, «n'a pas été suivi par son parti, plus restrictif que lui en matière d'immigration», explique Mme Singer. Les chefs d'entreprise, plutôt favorables à une régularisation des clandestins, sont une composante importante de la mouvance républicaine. Mais, «la plupart des gens qui votent républicain sont contre l'immigration clandestine», note Singer, pour qui la construction de la barrière n'est qu'une mesure «symbolique», un mois avant les législatives. Le budget alloué à sa construction, voté par une large majorité au Congrès, doit financer davantage de clôtures, des radars, de détecteurs, de caméras à infrarouge, et vise à porter à 18.000 le nombre de gardes-frontière. Des satellites et des drones seront également employés. Le mur fait partie d'une loi de financement beaucoup plus vaste, d'un montant de 34 milliards de dollars, affecté à la «sécurité de la patrie». Cette loi servira à «déployer des équipements de détection de matière nucléaire aux points d'entrée aux Etats-Unis, à renforcer la sécurité autour des installations chimiques, à protéger les villes contre les armes de destruction massive et à empêcher les terroristes d'accéder au territoire américain», a dit Bush en regrettant de ne pas avoir été suivi dans son projet de légalisation temporaire des clandestins: «La répression seule ne marchera pas.» Sur les 11 millions de clandestins vivant dans le pays, une bonne moitié cotise à la sécurité sociale et aux fonds de retraite. L'urgence du débat a été suscitée moins par l'afflux de ces clandestins que par leur récente dispersion géographique à l'intérieur des Etats-Unis. Beaucoup d'Hispaniques se sont nouvellement installés dans des régions où la population, blanche et noire, y voit une concurrence déloyale en matière d'emploi.