Apres avoir été projeté en compétition, l'année dernière au festival d'Oran du film arabe, le film Terre de vengeance» second long métrage d'Anis Djaâd a été projeté en avant-première à la salle Ibn Zeydoun, cette semaine, devant une salle pas très pleine, faute de communication, sans doute. Le film reprend les mêmes codes cinématographiques de la plupart des oeuvres d'Anis Djaâd, de ses courts métrages à son dernier film La vie d'après, qui paraît plus abouti et audacieux que ce dernier. Car si les intentions sont bonnes, Terre de vengeance n'a pu se hisser, hélas, au rang du sacré bon film, malgré son aspect esthétique bien travaillé, voir affirmé. Il y a des films qui se veulent être poétiques par leur seuls grands plans séquences, leurs grands plans panoramiques, leur silence profond et cette musique planante qui semble parfois transpercer le ciel... Il y a des films où Dame nature épouse l'âme humaine et semble se confondre avec elle, entre destin tragique et apathique...Sauf, voilà, l'on ressent ici les influences, notamment du cinéma asiatique, mais l'emprunte se limite là. La trame de Terre de vengeance ne suffit pas elle seule, pour en faire un bon sujet de film, tant le vide est trop présent, trop pesant....l'on comprend bien l'intention du réalisateur à vouloir appuyer la vacuité du temps qui passe et qui ploie inexorablement sur le protagoniste, mais cela finit par lasser le spectateur. Le film commence quand Djamel campé par Samir El Hakim, sort de prison. En se rendant chez lui, il apprend que sa femme a vendu l'appartement et s'est échappée avec son fils. Tournant en rond et sans un rond en poche, ne voulant pas être de trop chez sa soeur, Djamel décide de retourner à son village natal et tenter une affaire pour reprendre du poil de la bête. Aidé par son cousin Mohamed, il espère s'acheter un lopin de terre et le faire fructifier. Pour ce faire et être bien sûr de son coup, il offre un pot de vin au type de l'administration, mais le directeur de l'agence agricole les détourne vers une autre terre, qui s'avère aride.....Cet homme, interprété par Hamid Krim, n'est autre que l'amant de sa femme, que l'on a obligée de se marier avec Djamel de force. Cette femme qui se retrouve donc chez cet homme, est campée par Meryem Medjkane, toujours dans la pointe de la justesse. L'on apprend d'ailleurs, par la bouche du père de cette dernière, qui revient dans le village et meurt juste après, qu'une bagarre avait éclaté entre les deux familles antagonistes, le jour de ce mariage maudit....Cette malédiction qui poursuit nos anti-héros est rappelée sans cesse par le réalisateur qui donne à voir un arbre qui vacille au gré du vent, accompagné à chaque fois par la même musique classique qui revient ponctuer tout ce drame comme une sempiternelle litanie ou une tumeur maligne....Une chose est sûre, le réalisateur aime prendre des risques, lorsqu'il s'agit de ses plans. L'entre-deux est souvent présent. Si les grands plans larges sont également là, l'on se surprend à se prendre en plein face le visage de Djamel qui suinte le désespoir. Terre de vengeance est un film triste, étouffant, qui ne donne pas matière à respiration malgré ses gros plans sur les paysages naturels. Ce film est quasi noir, sec comme ce terrain vague.. D'ailleurs, métaphore ou pas, Mohamed et sa femme peinent à avoir aussi un enfant.. La vie dans Terre de vengeance paraît morne; comme dictée d'office par un fil invisible, celui du mektoub funeste. Le film se laisse voir, mais jamais à emporter le spectateur. Le malaise est constant. était-ce l'intention du réalisateur? Si la mise en scène reste épurée tel un plateau de théâtre, l'atmosphère qui s'en dégage est insipide, invivable... Toutefois, un vent d'optimisme s'ouvre vers la fin.. mais le spectateur a t-il eu assez de patience pour tenir le coup? Plusieurs thématiques sous-jacentes sont également abordées, telle la corruption, la violence faite aux femmes, ou encore la roue de la vie qui tourne inlassablement. Le symbolisme procède à la narration dans ce film, un peu trop «contemplatif» et qui ne sauve pas nécessairement le film. Il reste, cependant, un moyen pour faire réfléchir, mais sans grande émotion, et c'est là où réside l'écueil dans ce film, le manque d'empathie envers les personnages, tels comme ils sont, ou presque...