La «saga» spirituelle avec ses illuminations et ses prières nocturnes comme pour attirer la bénédiction du Seigneur sur cette terre, mais aussi avec son côté profane fait de déambulations dans les rues, de rires, de soirées artistiques, s'achève. Requinqués par la perspective de retrouver dans deux ou trois jours leurs vieilles habitudes, les gens se comportent déjà comme s'ils les ont déjà retrouvées par anticipation. Autant les premiers jours ont semblé pesants et maussades, autant les derniers jours qui nous séparent de l'Aïd paraissent légers et pleins d'entrain. Les rues, les magasins ouverts dès le matin et ne fermant que tard dans la nuit ne désemplissent pas. Tous n'achètent pas, bien sûr, tous, cependant entrent, regardent, comparent les prix et ne se décident qu'en fonction d'une opportunité qui vient souvent d'une promotion. Nous avons fait comme tout le monde, ainsi que nous l'avions fait au début de ce mois pour les marchés de proximité. Certains se plaignaient des prix des légumes et des fruits. D'autres, au contraire, les trouvaient raisonnables. Aujourd'hui, à la veille de la fête, le scénario se répète: les prix des vêtements et des souliers conviennent à une certaine catégorie de clients, ils indignent chez d'autres. Il faut dire que pour les bourses modestes, éprouvées déjà par la cherté des denrées alimentaires qui attendent, chaque année le début du Ramadhan pour s'enflammer, ne contiennent plus un rond. Et les enfants qui réclament des vêtements neufs à l'Aïd el Fitr, comme ils vont exiger leur mouton à l'Aïd el Adha ne veulent rien savoir. La tendance nous a semblé portée, cette année, par ces magasins dont leur emplacement dans ce quartier dit «Saïd El Ghat» rend incontournables. Ici, toute la journée, un flot humain s'écoule sans fin. Cela va dans les deux sens, de la cité de la Police, à l'entrée de la trémie. (En face, c'est la BDL et le commissariat central). Des noms de boutique essayent de capter l'attention par leur exotisme ou leur référence à l'histoire ancienne. On a ainsi Istambul, la Classe, Princesse Boutique, Elza Shoès, le Chat Bijoux. Nous entrons chez Akram, un jeune qui fait de la promotion, érigée en règle par le père à chaque fête de l'Aïd. Il pratique l'importation. Il va acheter les pièces en Italie et recourt à un couturier chinois pour les assembler. Cela revient moins cher, expliquait-il. Mais il va aussi acheter ses articles vestimentaires à Paris. Même si l'Espagne a sa préférence. «Cette année, le commerce stagne», nous déclarait ce jeune commerçant qui, pourtant consent des rabais intéressants, pouvant aller jusqu'à 1000 et plus sur l'article. «Nous avons une marge très réduite», assurait-il. Chez Elza Choès, Adel qui vend des souliers, des basquets, des sacs pour femmes, et qui lui aussi les amène de Chine, des produits qui portent son logo, le commerce, qui obéit à la loi de l'offre et de la demande, baisse. Les gens achètent peu. À côté, le Chat fait de bonnes affaires. Les bijoux en étain marchent bien. Naël qui aide son frère est débordé. Les clientes lui laissaient à peine le temps de nous répondre. Sihane, 6 ans et son frère Tadini, 5 ans qui accompagnaient leur mère ont eu les vêtements qu'ils souhaitaient. Ils restaient juste les souliers. Ils sont sortis ce matin pour cela. Ils ont le temps. Au Jet Sept Shoès, où on vend des robes et des Djallaba importées d'Espagne, le magasin est si achalandé que pour faire face à la clientèle la patronne a recruté 3 étudiantes. Dehors, de l'autre côté, en face de la trémie, Mustapha étalait des jouets sur le trottoir: des fusils, des pistolets, des camions, des poupées etc. La concurrence est forte, mais il ne se plaignait pas. Il a un autre métier. Les jouets c'est pour un temps très court.