Deux ans avant la présidentielle prévue en France, la condamnation à inéligibilité de la cheffe de l'extrême droite Marine Le Pen fait monter la température à Paris : le Rassemblement national (RN) se rassemblait hier à Paris, une partie de la gauche contre-manifestait, et le bloc central était convié par l'ancien Premier ministre Gabriel Attal. Dans un contexte de vives tensions internationales – conflit russo-ukrainien, Proche-Orient, guerre commerciale lancée par Donald Trump – et d'une crise politique latente en France, le pays a subi, la semaine dernière, une très forte secousse judiciaire et politique. La lourde condamnation en première instance du premier parti de France, le Rassemblement national (RN), dans l'affaire des assistants parlementaires européens pour détournement de fonds publics, et l'hypothèse sérieuse de l'inéligibilité de Marine Le Pen ont mis la classe politique en tension, à deux ans de l'échéance prévue pour la succession du président Emmanuel Macron. D'ici là, à l'été 2026, la Cour d'appel de Paris doit se prononcer. Et la triple candidate à l'élection présidentielle n'entend pas d'ores et déjà renoncer et passer le flambeau au président du RN, Jordan Bardella. Au contraire : le parti d'extrême droite est à l'offensive : il a dénoncé à l'Assemblée nationale des «juges tyrans», selon les mots du député RN Jean-Philippe Tanguy, et organisé, hier, un rassemblement de soutien à Mme Le Pen pour mettre sous pression la justice. Le Premier ministre centriste François Bayrou a jugé dans le journal Le Parisien qu'il n'était «ni sain ni souhaitable» d'organiser un rassemblement pour protester contre une décision de justice. Même son de cloche à droite : le président du parti Les Républicains (LR) de la région des Hauts-de-France, Xavier Bertrand, redoutait la perspective d'un «mauvais remake du Capitole», référence à l'envahissement du Congrès de Washington par les partisans de Donald Trump le 6 janvier 2021. «Ce n'est pas une manifestation contre des juges» mais «pour la démocratie, pour Marine Le Pen, pour la souveraineté populaire», a rétorqué le vice-président du RN Sébastien Chenu. Le député du Nord a toutefois de nouveau critiqué une décision de justice «inique» et une «exécution provisoire qui, en fait, est l'exécution politique de la principale leader politique française». Marine Le Pen a de plus été soutenue par des dirigeants étrangers illibéraux et proches de l'extrême droite. Le président américain, Donald Trump, et son vice-président, JD Vance, ont appelé à sa «libération» et dénoncé une prétendue «chasse aux sorcières» menée par des dirigeants européens «gauchistes». Bayrou a fustigé une «ingérence» étrangère. À gauche, les partis La France Insoumise (LFI) et les Ecologistes organisaient au même moment un contre-rassemblement à celui du RN, place de la République à Paris. Et pour le «bloc central», soutien du gouvernement Bayrou, un meeting du parti macroniste Renaissance était prévu depuis des mois à Saint-Denis, au nord de Paris. L'ancien Premier ministre Gabriel Attal, qui dirige cette formation, a battu le rappel après l'annonce du rassemblement du RN pour défendre «l'Etat de droit» et «la démocratie et nos valeurs». «Est-ce qu'on veut que la France devienne l'Amérique de Trump ou pas ?» s'est interrogé un proche d'Attal. Mais la patronne du groupe RN à l'Assemblée nationale, n'entend pas d'ores et déjà renoncer et passer le flambeau au président de son parti, Jordan Bardella. À l'ouverture de son meeting, Attal a accusé l'extrême droite d'«attaquer nos juges» et «nos institutions».