On voit mal le chef de l'Etat se départir d'un des piliers de l'actuel gouvernement, au même titre que Ali Benflis. La cabale contre le secrétaire général du RND continue. Malgré le démenti officiel apporté par le bureau national sur une prétendue brouille entre Ouyahia et Bensalah, la campagne visant la déstabilisation du ministre de la Justice s'intensifie avec, cette fois, une nouvelle rumeur qui donne le SG du RND en disgrâce auprès de la présidence de la République, tout en insistant, bien entendu, sur le conflit qu'il aurait avec le président de l'APN. Les cercles hostiles au RND dressent un tableau peu reluisant du climat au sommet de l'Etat. C'est ainsi qu'on affirme, dans le microcosme politique algérois, que Bouteflika voudrait se débarrasser de l'actuel SG du RND au profit du président de l'Assemblée populaire nationale. La partie, à l'origine de ces allégations, citée par un quotidien arabophone, affirme que le voeu de Bouteflika serait justifié par un sérieux désaccord entre lui et son ministre de la Justice sur la politique présidentielle en termes de réformes et au sujet de la réconciliation nationale. A en croire ses détracteurs, Ouyahia serait le principal frein à la mise en oeuvre des réformes, ainsi que de la réconciliation nationale. Déduction: Ouyahia doit absolument sauter. L'on prévoit, pour ce faire, son remplaçant et même un clan pour soutenir ces desseins. L'on est en droit de se poser des questions sur la véracité de tels scénarios, lorsqu'on sait que le même Ouyahia, qu'on dit fortement affaibli dans son parti et personnage gênant de la stratégie présidentielle, se trouve actuellement aux Etats-Unis dans le cadre du règlement de la très épineuse question du Sahara occidental. En outre, l'on se demande où les détracteurs d'Ouyahia sont allés pêcher les différences de vue dans le traitement des dossiers des réformes. C'est bien le SG du RND qui est en charge de conduire la réforme de la justice et c'est aussi son parti qui a résolument soutenu la réforme du système éducatif. Quant à la réconciliation nationale, le porte-parole du RND, Miloud Chorfi, nous a déclaré que sa formation politique n'était, en aucun cas, contre l'avènement de la paix et de la sécurité dans le pays. Il se trouve seulement, relève notre interlocuteur, que «nous estimons que la réconciliation nationale doit se faire dans le cadre du respect des lois et des institutions de la République». Autrement dit, c'est dans l'approche qu'il y a divergence, non pas avec la présidence de la République, mais avec le camp islamo-conservateur qui veut profiter de la main tendue pour obtenir la reddition de la République ou tout au moins, maintenir le statu quo dans le but de faire perdurer le système en place. Les observateurs attentifs à la scène politique nationale, voient mal le chef de l'Etat se séparer d'un des piliers de l'actuel gouvernement, au même titre que Ali Benflis. En effet, en décryptant les discours des trois hommes, l'on peut aisément saisir que la préoccupation essentielle du pouvoir est de parvenir à instaurer la paix, mais sans sacrifier le principe d'un Etat moderne. Le chef de l'Etat l'a dit lors de son discours à la clôture du Festival mondial de la jeunesse. Ali Benflis l'a réaffirmé dans sa lettre aux militants du FLN et Ahmed Ouyahia défend le principe de la cohabitation pacifique de toutes les tendances qui composent le paysage politique national. Il a, ne l'oublions pas, dirigé le premier gouvernement pluraliste de l'Algérie indépendante. A la lumière de ces faits, il est permis de dire, sans trop de risque de se tromper, que la cabale contre Ouyahia ne vise ni plus ni moins que l'affaiblissement du pouvoir pour l'amener à abdiquer sur la question de la réconciliation nationale en acceptant une «réconciliation au rabais».