Quelle mouche a donc piqué les médias français qui faisaient hier des gorges chaudes sur le séjour de Zidane en Algérie. N'en jettent-t-ils pas un peu trop les médias et les journaux français, qui, quasi unanimes, criaient hier, haro sur le baudet, accusant l'Algérie «d'instrumentaliser» le séjour de Zineddine Zidane dans le pays d'origine de ses parents? On est habitué, de longue date, à ce que, tout ce qui touche à l'Algérie, soit pris avec réserve et critique de l'autre côté de la Méditerranée. Mais n'y a-t-il pas, en l'occurrence, abus en la matière de la part de médias maîtres dans les superlatifs quand il s'agit de congratuler les «exploits» de Français, même si ceux-ci, à l'instar de Zidane justement, ne le sont que de nationalité? Et comme Zidane, ce sont ces «bi-nationaux» qui font aujourd'hui la gloire du sport français, de la culture française et même de la politique en France à l'instar de Aziz Beggag, ministre délégué chargé de l'Intégration ou encore Tokia Saïfi, ancienne secrétaire d'Etat au Développement durable dans le gouvernement Raffarin. Or, les médias français semblent faire grief à ces «binationaux» de se rappeler de leur origine, d'en être fiers et d'honorer la terre de leurs ancêtres. Comme Zidane, nombreux sont ces Algériens naturalisés français qui font, ou ont fait, le bonheur du peuple français. Tant mieux pour lui, tant mieux pour eux, mais pourquoi vouloir aujourd'hui faire un procès d'intention à l'Algérie à défaut de le faire à Zizou, dont beaucoup de Français ne lui pardonnent pas le «coup de boule» à Matarazzi lors de la finale de la Coupe du monde de football en Allemagne, en juillet, lui faisant même assumer la responsabilité de la défaite du Onze tricolore. Quand Zidane, qui terrassa le grand Brésil, donnait à la France son premier titre de champion du Monde, le Marseillais, dont les parents sont originaires d'Algérie était un Français bon chic bon genre et surtout «bon teint» faisant courir tous les Français pour voir et toucher le phénomène qui sortit le football français du ghetto, y compris le président Jacques Chirac qui accueillit le champion du monde en héros à l'Elysée. Quand la France frôlait l'élimination, lors des qualifications au Mondial allemand, on appelait à la rescousse le déjà retraité Zineddine Zidane pour sauver ce qui pouvait l'être. Non seulement, Zidane qualifia la France au Mondial, mais emmena les Tricolores jusqu'à la finale contre l'Italie. Oublié tout cela lorsque, durant l'été, la presse à scandale, la presse de caniveau, tenta de salir la réputation de l'un des meilleurs footballeurs du XXe siècle. On n'a pas vu, ni lu, les médias et la presse, qui ironisent aujourd'hui sur le séjour de Zidane dans le pays de ses origines, voler à son secours pour défendre son honneur lorsqu'il a été attaqué dans sa vie privée par la presse à scandale française. Aussi, il est écoeurant de voir cette presse dénier aux autorités algériennes d'accueillir, en héros, l'un des leurs qui a surtout contribué à élever très haut la gloire de la France. De fait, ces binationaux qui font la fierté de la France, chouchoutés pour ce qu'ils apportent ou ont apporté à la France, comme titres et médailles -dont les Français sont très friands- sont passés à la trappe dès lors qu'ils ne font plus résonner la Marseillaise sur les tréteaux, pistes et terrains du monde. Mais, qu'aurait été le sport français sans l'apport des Zineddine Zidane, des Brahim Asloum (boxe), Mehdi Baâla (athlétisme), Djamel Bouras (judo) tous champions olympiques, ou encore les stars du cinéma à l'image d'Isabelle Adjani, de Nadia Farès, de Yasmina Benguigui, du show-biz tels Rachid Taha, Faudel, Amal Bent, Nâdiya, pour ne citer que quelques uns des femmes et des hommes, tous d'origine algérienne, qui ont donné, ces dernières années, titres, médailles, césars et oscars à la France. Aussi, le procès d'intention instruit à l'encontre de l'Algérie à l'occasion du séjour de Zidane est, à tout le moins, mal venu De fait, dès la fin de la Coupe du monde, en juillet, Zidane avait exprimé le voeu de se rendre en Algérie, pays dont il n'a plus foulé le sol depuis l'âge de 15 ans quand il y est venu avec ses parents qui l'emmenèrent voir leur village natal d'Aguemoun, à Béjaïa. C'est cette intention du footballeur très populaire en Algérie que les autorités, à leur tête le président Bouteflika, ont tenu à matérialiser. Aussi bien, qu'est-ce que le séjour de Zidane a-t-il à voir avec la polémique autour de la loi scélérate du 23 février 2005 qui glorifiait les «aspects positifs de la colonisation» que certains titres de la presse française n'ont pas hésité à déterrer dans les commentaires qu'ils ont fait, hier, sur le séjour chez lui du talentueux footballeur. Mais nous ne les suivrons pas sur ce terrain lorsqu'ils veulent politiser et instrumentaliser une visite qui n'aurait pas dû sortir de son cadre symbolique.