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«Hawas est l'image d'un Algérien positif»
HAMID GRINE À L'EXPRESSION
Publié dans L'Expression le 11 - 01 - 2007

Ceux qui ont lu ses best-sellers comme Lakhdar Belloumi, un footballeur algérien; Chroniques d'une élection pas comme les autres, ou encore Comme des ombres furtives, apprécieront certainement son premier roman La Dernière prière. Dans cette oeuvre romanesque, qui figure actuellement parmi les meilleures ventes, Hamid Grine nous fait découvrir un personnage typiquement algérien, Hawas. «Il pense souvent ce qu'il dit et il fait souvent ce qu'il pense. Parfois, dans la même journée, on voit Hawas héros et on le voit lâche, comme nous tous!»
Dans l'entretien qui suit, l'auteur nous en parle. Découvrons ensemble cet héros «qui ne tourne jamais en rond».
L'Expression: De l'essai au roman, comment l'idée d'écrire La Dernière prière vous est-elle venue à l'esprit?
Hamid Grine: Il faut d'abord dire que j'ai écrit sur le sport à l'époque, parce que j'aimais l'écriture, d'une part, d'autre part, parce que si on voulait écrire librement sans borne et sans restriction, on ne pouvait le faire que dans le sport, du fait que le paysage politique était verrouillé. Même en culture et en société, on n'était pas libre d'écrire ce qu'on voulait sous peine de voir la censure s'exercer. En sport, par contre, on pouvait se défouler. Ça c'est pour revenir à l'écriture sportive, où j'ai écrit quand même sept livres. Par la suite, après l'ouverture politique et économique du pays, j'ai pu faire ce que je voulais, c'est-à-dire écrire des essais, écrire une chronique politique, en l'occurrence Chronique d'une élection pas comme les autres. Ce que je dois souligner c'est que ce dernier livre collait à l'actualité. Mon livre est sorti presque vingt jours après l'élection présidentielle du 8 avril 2004. Pour revenir maintenant au roman, l'idée elle, est venue d'elle-même. Je n'ai pas cherché à écrire de roman, d'ailleurs même au plan de la lecture, je ne lis que ce qui est utile, entre autres, les ouvrages philosophiques. Il n'y avait même pas eu de déclencheur. Le livre, tout comme le personnage, il s'est imposé de lui-même.
C'était une nécessité?
Effectivement, et c'était une nécessité viscérale même. C'est la première fois que j'ai ressenti une sorte de bouillonnement. Quand j'ai écrit mes précédents livres, je l'ai fait d'une façon très allègre, je dirais très épanouissante. J'étais heureux d'écrire. Et quand j'ai commencé La Dernière prière, le titre s'est imposé de lui-même, même s'il y a beaucoup de marketing et de publicité, la juxtaposition de deux termes magnétiques. Dernière ultime, prière, charge émotionnelle. Et donc quand j'ai commencé à écrire, c'était pour délivrer quelque chose. Mais, ce n'était pas l'écriture automatique. Je n'ai pas décidé d'écrire un roman.
Justement, La Dernière prière est un roman qui parle de la décennie du terrorisme. N'est-ce pas là une façon de faire votre deuil?
C'est juste, non seulement le deuil de la décennie mais encore le deuil de mes illusions.
C'est-à-dire...
La décennie noire était, aussi bien pour moi que pour beaucoup de personnes de ma génération, une sorte de prise de conscience. Prise de conscience tout d'abord de notre identité. Qui sommes-nous? Où allons-nous? Parce que je suis certain que si on savait qui on était -je dirais une consolidation de la personnalité algérienne- on n'aurait jamais versé dans «l'afghanisme» et l'extrémisme dans un certain nombre de choses. Il faut dire qu'en 1991, on cherchait des modèles culturels...on n'avait pas de repères. On n'a jamais réussi à nous réconcilier avec nous-mêmes. Pourquoi? Parce qu'il y avait la fermeture du champ politique, du champ culturel. Je me rappelle très bien que Kateb Yacine, que je considère comme le plus grand écrivain algérien, était presque une personnalité non grata. Rachid Mimouni, c'est la même chose. Et je suis certain que cette absence de la consolidation de la personnalité algérienne, a produit cette dislocation de la structure de notre culture.
Dans votre roman, on est souvent confronté au fait suivant: Quand on prend Hawas pour un hypocrite, on se retrouve face à une société schizophrène, et lorsqu'on prend la société pour hypocrite, on se retrouve face à la schizophrénie de Hawas...
Hawas n'a jamais était schizophrène. C'est quelqu'un qui essaie de s'adapter, tout simplement. Il a la diététique -tout comme Lord Bayron- de lui-même, il a l'hygiène de soi. Beaucoup d'Algériens sont comme cela. Mais ils ne le montrent pas. Hawas n'est pas quelqu'un de masqué. Il pense souvent ce qu'il dit et il fait souvent ce qu'il pense. Parfois, dans la même journée, on voit Hawas héros et on le voit lâche, comme nous tous! On ne peut pas être tout le temps dix sur dix. Dans le roman, il le dit. Le héros d'aujourd'hui pourrait, dans une autre situation, être traître. Et Hawas est conscient de cela. C'est quelqu'un qui joue à se façonner, à sculpter sa personnalité selon les cadres du stoïcisme et quand il est confronté à des situations où nécessairement il doit faire appel à ce qui l'aide à vivre, il les oublie.
N'est-ce pas là le côté ambigu de la personnalité humaine, dont Hawas est l'échantillon?
La personnalité algérienne est encore plus ambiguë. Les étrangers nous voient d'une façon très négative. Mais quand ils viennent ici, ils sont déconcertés par une chose: par le décalage entre ce qu'ils ont cru et ce qu'ils voient. L'Algérien est éminemment sympathique et profondément généreux, j'y crois. Il est aussi positif, pour peu qu'il soit valorisé. Qu'il ait les conditions nécessaires pour s'exprimer. Mais, mis dans un contexte défavorable, l'Algérien peut être très méchant. C'est-à-dire qu'il peut se soulever, se révolter. Et on le voit dans l'histoire de l'Algérie. Si on n'avait pas eu un centralisme d'un pouvoir politique fort, contrairement à d'autres pays, parce que nous avons dans les gènes ce désir permanent de liberté mais également la révolte dans le sang. Nous n'aimons pas l'injustice. Et l'absence de repères, jusqu'à maintenant, nous met devant la nécessité de nous réconcilier avec Jugurtha, Juba, Saint Augustin...et on ne l'a pas fait.
Un phénomène bien spécifique de la littérature algérienne, c'est que le héros est toujours campé par un intello. Dans votre roman, il est campé par un journaliste. Pourquoi n'avez-vous pas dérogé à la règle et créé, de ce fait, un héros issu du petit peuple, qui n'est, de surcroît, pas forcément instruit?
Oui, mais...chacun travaillle selon son intuition. Vous remarquerez que Hawas n'est pas un fils de riches. Si vous parlez de l'origine sociale, il est d'une origine moyenne. Seulement, il a une culture. Hawas, ressemble à beaucoup d'Algériens. Il n'est ni de gauche ne de droite. Il peut prendre les valeurs des uns sans pour autant être d'accord avec eux. C'est-à-dire, c'est quelqu'un qui se nourrit à ce qui fait l'humain de la personne. Ce n'est pas un hémiplégique sur ses critiques de la démocratie...
Dans La Dernière prière, on a l'impression que vous avez créé le personnage principal juste pour le mettre au service d'une idée que vous voulez transmettre, n'est-ce pas?
Oui. Mais alors, imaginez que Hawas est un pauvre type. On va faire appel au regard subjectif de l'auteur qui sera donc omniscient. C'est l'auteur qui va se substituer à son personnage. Hawas est quelqu'un qui a un niveau intellectuel. Donc, il peut analyser la situation politique de l'Algérie des années 1990. Ce n'est pas quelqu'un de très moyen sur le plan de la réflexion, non. C'est quelqu'un de foncièrement franc, honnête. A partir de là, je peux affirmer que mon roman n'est pas idéaliste. J'ai présenté mon personnage tel qu'il doit être, c'est-à-dire avec ses tares. Je pense que c'est un roman profondément algérien. Mon personnage est positif, il aime profondément son pays. C'est le cas de plusieurs Algériens, mais l'avantage de Hawas, c'est qu'il s'est nourri beaucoup de stoïciens. Et s'il a tiré quelque chose de ses lectures, c'est la lucidité. Il ne se voile pas la face. Par exemple, quand on était en plein début de l'insurrection, Hawas savait bien que ça se terminera avec l'apparition des militaires. Et ça, je dirais que c'est une lucidité extraordinaire. Hawas était conscient à l'époque que le salut viendra des militaires. Bien que jeune, il pense que la démocratie ne va pas sans autorité. Pour lui, il est d'accord avec Goethe qui dit: «Je préfère une injustice à un désordre». Et son modèle c'est Franco, Atatürk, il le dit. Mais, si l'Espagne est une puissance mondiale, c'est grâce à Franco. Si la Turquie est devenue une puissance régionale, c'est grâce à Atatürk. Qu'on le veuille ou non. Hawas pense que l'Algérien a besoin d'un père. Peut-être dur, mais juste. L'Algérien préfère une autorité juste à une injustice libérale.
Comment concevez-vous l'acte d'écrire: Est-ce un travail lucide consistant à exposer ses idées ou c'est l'expression du côté narcissique de l'auteur?
Je pense que l'un est dans l'autre. L'auteur, quel qu'il soit, s'il n'est pas narcissique n'est pas un auteur. On n'écrit pas pour le simple plaisir d'écrire, on écrit pour se délivrer. On écrit parce qu'on sent quelque chose. Parce que c'est un besoin vital. Et dans ce besoin, il y a aussi le besoin de se regarder. Je pense que l'acte d'écrire est un acte solitaire qui part du particulier vers l'universel. L'écrivain est, avant tout, le témoin de sa société. Regardez Tolstoï, Dostoïevski, Gogol, Tchekhov...ils sont vus comme les porte-parole de la société russe. Ils n'ont pas parlé de l'Algérie, ni de la France mais de la Russie.
Certains écrivains estiment que l'avenir en Algérie est exclusivement réservée à la littérature d'expression arabophone. Quel est votre opinion à ce sujet?
Je ne sais pas sur quel critère ils se basent. Je pense que, à l'heure de la mondialisation, à l'heure de la mise à niveau sur tous les plans, le fait de connaître deux, trois ou quatre langues est un enrichissement. Ce n'est pas un handicap. Maintenant, il se trouve que les plus grands auteurs sont des auteurs anglo-saxons, sinon francophones. Non pas parce qu'ils n'ont pas de talent, mais parce qu'ils n'ont pas les moyens de promouvoir leur talent. Je n'ai pas encore vu un prix Nobel arabe, à part Naguib Mahfouz. Je pense qu'il y aurait de plus en plus de bons auteurs francophones et l'idéal serait qu'il y ait de plus en plus d'auteurs bilingues. Je dirais même trilingues: en arabe, en français et en tamazight. Et puis, jusqu'à maintenant, qu'on le veuille ou non, l'auteur algérien le plus connu est Yasmina Khadra. Pourquoi Yasmina Khadra? Si cet auteur était resté en Algérie, il aurait été un auteur national, mais parce qu'il est en France, parce qu'il est édité chez Julliard, qui a les moyens de promouvoir, qui a une stratégie de communication, bien ciblée, Yasmina Khadra est traduit dans 25 pays, et il est connu mondialement. Je suis certain qu'en Algérie, il y a des auteurs qui le valent sur le plan de l'écriture, sur le plan de la richesse littéraire. Nous avons actuellement des dizaines d'auteurs de talent, mais s'ils n'ont pas le prestige de Yasmina Khadra, non pas qu'ils n'ont pas de talent, c'est parce qu'ils n'ont pas eu la chance d'avoir accès à un éditeur international.
Le prochain livre...
Le prochain est un roman. Il s'intitule La Nuit du henné. C'est une histoire tirée de faits réels. C'est l'Algérie des années 1980. L'Algérie des pénuries. C'est l'histoire d'un Algérien qui vit, donc, dans une Algérie de paix mais également de pénuries. Sa femme se réveille un jour avec du henné. C'est en somme l'Algérie de l'absence de tous repères, de charlatanisme...


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