L'achat de la compagnie Antinea Airlines a fait l'objet hier de débats au tribunal. Après avoir entendu les directeurs d'agence de Khalifa Bank d'Oran, Kers Halim, celui des abattoirs, Soualmi Hocine, et celui d'El Harrach, Aziz Djamel, et tous les témoins de ces agences, c'était le tour, hier, des deux directeurs de l'agence de Chéraga, Mokadam Tahar et Mir Omar d'être auditionnés comme accusés dans l'affaire Khalifa. Les chefs d'inculpation retenus contre ces deux personnes sont notamment association de malfaiteurs, trafic sur procès-verbaux et vol qualifié. Toutefois, ce qui a marqué la journée de ce dimanche, ce sont les révélations relatives à l'achat par Abdelmoumen Khalifa de la compagnie aérienne Antinea Airlines, et ce avec l'argent déposé au niveau de l'agence de Chéraga. C'est Mir Omar, en personne, dernier directeur de l'agence de Chéraga, qui a reconnu les faits devant le tribunal de Blida. «M.Abdelmoumen Khalifa m'a chargé d'ouvrir un compte avec un chéquier au profit du directeur de la compagnie aérienne Antinea Airlines, Arezki Idjelouiden et ce, en une journée seulement. Une fois cette directive accomplie, il m'a ordonné de verser 20 milliards de centimes qui étaient au niveau de notre agence dans son compte personnel», dira-t-il. «Ça veut dire que Abdelmoumen a acheté cette compagnie aérienne avec l'argent des déposants», rétorqua la juge. «Absolument», dit-il. «Pourquoi avez-vous accompli cet acte illégal?», ajoute-t-elle. «Mais je ne faisais qu'exécuter les ordres de mon patron, madame», répond-il. La juge révoltée dira que le directeur d'Antinea Airlines a même payé ses dettes vis-à-vis du Trésor public avec l'argent de Khalifa Bank et non avec l'argent personnel d'Abdelmoumen. Par ailleurs, une fois devant la barre, le deuxième accusé commença à se défendre sauf que, dès le commencement de l'audition, un fait interpelle Mme Brahimi. Ce fait est relatif aux informations données par l'ex-directeur de l'agence de Chéraga, mais qui n'ont pas été mentionnées dans le procès-verbal du juge d'instruction. «Il me semble que vous n'aviez pas déclaré tout cela», lui dira la juge. L'accusé fera savoir à Mme Brahimi que ce sont des informations qui n'étaient pas en sa possession. Dans ce sens, il tenta d'expliquer ce «retard» de trois ans à la juge par le fait qu'il avait entrepris un contact avec le liquidateur à travers une demande, mais qui est demeurée sans suite. Bref, il dira que l'argent qui sortait de son agence allait à la caisse principale tout en niant qu'il a remis de l'argent à quiconque. La juge, de plus en plus curieuse, posa la question suivante: «M.Tahar, parlez-nous des comptes n°4216 et 1266.» Il répond: «Le premier est un compte de passage.» «Et ça veut dire quoi, cela?» Coincé par la question de la juge, l'accusé n'y est pas allé avec le dos de la cuillère pour reconnaître qu'il s'était trompé. «Pardon madame, je me suis trompé. C'est un compte d'investissement et non un compte de passage.» Mme Brahimi ajoute: «Pourquoi ce compte a alimenté votre compte personnel d'une somme évaluée à deux millions de dinars?» Il répond: «C'était pour l'achat de trois véhicules pour la société, madame.» Encore plus curieuse, elle lui pose une question complémentaire: «Pourquoi avez-vous retiré du compte n°1266, 65 millions de centimes?» L'accusé répond qu'il s'agissait d'un prêt qui lui a été accordé par la direction du personnel, à la suite d'une demande. Il reconnaîtra qu'il avait aussi bénéficié d'un autre crédit de la KLR Pharma dont le montant dépassait 233 millions de centimes et ce, pour l'achat d'un appartement à Douaouda dans la wilaya de Tipasa. La même personne déclara avoir connu Abdelmoumen Khalifa autour d'un café et qui lui a été présenté par son chef de service lorsqu'il était à la BDL de Staouéli. Rappelons que l'accusé a occupé pendant 15 mois le poste de directeur de l'agence de Chéraga avant d'être promu, par la suite, au poste de directeur général d'exploitation à la direction générale de Khalifa Bank et ce, pendant cinq mois. Il a été ensuite nommé conseiller sportif, de 2001 jusqu'à la liquidation du groupe, après avoir refusé le poste d'inspecteur général. «Je l'ai refusé parce qu'il nécessitait des déplacements réguliers et il n'y avait personne pour assister ma famille pendant mon absence», dira-t-il. «Cela demandait beaucoup de déplacements ou bien parce qu'il n'y avait pas d'argent à manipuler?», lui dira ironiquement le représentant du ministère public. Par ailleurs, ce dernier voulait savoir quel était son salaire en tant que conseiller sportif et qui était son assistant. L'accusé répond 15.000DA pour le salaire et Ighil Meziane pour l'assistant. «Sur quelle base vous donniez l'argent au club de football?» Mokadam Tahar explique au tribunal que c'était sur orientation du président-directeur général et que certaines équipes étaient plus «favorisées» que d'autres. Concernant le directeur des sports, en l'occurrence Maâmar Djebour, il dira qu'il ne savait pas s'il était recruté. Toutefois, «il avait un salaire». Concernant les raisons de sa brève mutation à Blida, il dira que le directeur de cette dernière avait pour mission d'aller voir les clients qui ont pris des crédits sans les avoir remboursés. «Je l'ai remplacé pendant cinq mois seulement.» Le directeur de l'agence de Blida, autre point sensible du dossier, est programmé dans l'après-midi.