Ali Yahia Abdenour estime qu'il est du devoir de l'Etat de dire la vérité aux familles de disparus. L'interdiction du colloque international sur les disparitions forcées, qui devait se tenir à Alger mercredi et jeudi derniers, «va droit avec les directives de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale». C'est en ces termes que le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (Cncppdh), Me Farouk Ksentini a justifié la réaction des pouvoirs publics. Contacté hier par nos soins pour avoir son point de vue sur cette interdiction, notre interlocuteur n'a pas manqué l'occasion pour rappeler que «l'Algérie vit toujours sous l'état d'urgence et que, par voie de conséquence, aucune rencontre, aucune manifestation de rue ne peuvent être organisées sans l'aval du ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales». Pourtant, les organisateurs de cette rencontre internationale sur les disparitions forcées, en l'occurrence des associations de victimes du terrorisme, ainsi que certains acteurs de la société civile algérienne, ont jugé cette décision attentatoire à la mémoire de toutes les personnes disparues durant la tragédie nationale qu'a vécue l'Algérie. En ce sens, le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme, a rappelé que «l'article 46 de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale interdit d'évoquer, derechef, l'affaire des disparus». «Ce dossier est clos et personne n'a le droit d'en parler», a souligné Me Ksentini. «Il y a un ordre public qu'il faut respecter», a ajouté notre interlocuteur. Mais tel n'est pas l'avis de l'avocat Ali Yahia Abedenour, président d'honneur de la ligue algérienne de défense des droits de l'homme (Laddh). «Il est du droit des familles victimes du terrorisme de savoir la vérité sur la disparition de leurs enfants», a-t-il estimé, relevant, en outre, que «l'Etat algérien ne règle pas les problèmes qui se posent avec acuité, mais préfère les occulter ou les ignorer». S'agissant maintenant de l'interdiction de la tenue du colloque international sur les disparitions forcées, Me Ali Yahia estime que c'est erroné d'évoquer l'état d'urgence. «L'état d'urgence a été instauré le 9 février 1992. Quinze ans plus tard, on en parle toujours! Pourtant, on ne cesse d'affirmer que l ‘époque de la violence terroriste est révolue» remarque notre interlocuteur. Par ailleurs, le président d'honneur de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme, n'omet pas de signaler que la question des disparus ne se règle pas via les indemnités matérielles octroyées aux familles. «Il faut dire la vérité à toutes ces familles qui attendent le retour de leurs enfants. Il faut que l'Etat dise si les disparus sont morts ou vivants», a indiqué Me Ali Yahia Abdenour qui n'oublie pas de rappeler que l'Algérie a ratifié plusieurs conventions internationales sur la défense des droits de l'homme.