Les Etats-Unis font face à des adversaires, en Irak, capables de «s'adapter et qui vont probablement accroître leurs attaques contre les forces américaines». Profitant des accords d'«apaisement» passés entre le Pakistan et les régions tribales du Waziristân, l'organisation Al Qaîda a complètement restructuré ses réseaux dans le monde. C'est ce que rapporte le New York Times se basant sur des études récentes faites par des responsables américains du renseignement et des spécialistes des questions sécuritaires. Selon le NYT, «toutes les donnes disponibles accréditent la thèse selon laquelle Oussama Ben Laden et Ayman al Zawahiri ont complètement redéfini et structuré les réseaux terroristes un peu partout dans le monde, consacrant au moins un réseau opérationnel à la planification et la mise en application d'attentats à l'étranger», ce qui apporte un large discrédit aux propos tenus récemment par G.W.Bush, qui affirmait que les chefs d'Al Qaîda étaient «totalement coupés de leurs réseaux». Il y a un peu plus d'un mois, l'ancien chef de la Direction du renseignement national, John Negroponte, disait précisément que «le noyau dur d'Al Qaîda était en fait extrêmement flexible» et que la direction de l'organisation se «construit des relations opérationnelles depuis ses caches des zones tribales afghano-pakistanaises jusqu'au Maghreb et l'Europe, en s'appuyant sur le courrier électronique et le courrier postal normal». Il y a trois jours, le New York Times rapportait aussi que «des documents saisis sur des insurgés irakiens indiquent que certaines des récentes attaques contre des hélicoptères américains sont le résultat d'une stratégie soigneusement préparée visant les avions de la coalition.» La stratégie consiste à accélérer le nombre d'opérations coordonnées utilisant des mitraillettes, des roquettes et des missiles sol-air, écrit le quotidien, citant des responsables américains ayant requis l'anonymat. Les documents, qui auraient été rédigés par l'Organisation Al Qaîda en Mésopotamie, indiquent que les milices se préparent depuis la fin de l'année dernière à «concentrer leur action sur l'armée de l'air». Selon les responsables américains, ces documents sont une nouvelle illustration que les Etats-Unis font face à des adversaires en Irak capables de «s'adapter et qui vont probablement accroître leurs attaques contre les forces américaines au moment où celles-ci augmentent leurs efforts pour pacifier Baghdad», écrit le Times. «Les attaques contre les avions de la coalition vont probablement augmenter si les missions d'hélicoptères augmentent pendant la dernière phase du plan de sécurisation de Baghdad ou si les insurgés cherchent à continuer sur la lancée de leurs récents succès», selon un rapport du renseignement cité par le journal. Sept hélicoptères se sont écrasés en Irak depuis le 20 janvier, soit davantage qu'en 2006. Cinq ont été la cible de tirs ennemis. Une alliance de groupes armés sunnites chapeautée par la branche irakienne d'Al Qaîda affirme, dans un communiqué mis en ligne le 15 février, avoir développé «de nouvelles armes» contre des hélicoptères américains. Au Maghreb aussi, on assiste au déroulement d'un plan de restructuration des réseaux pro-Al Qaîda, notamment avec l'adhésion du Gspc à l'organisation d'OBL. Au début du mois en cours, une cellule opérationnelle du Gspc avait été démantelée en Espagne, et, paradoxe à retenir, planifiait de faire des attentas au Maghreb. Au Maroc, où plusieurs cellules ont été démantelées, la DST constate, jour après jour, l'ampleur des réseaux djihadistes, encore mal structurés, donc détectables, mais qui déjà font craindre le pire. Cette agitation marocaine est bien évidemment à replacer dans un contexte marqué par l'expansion du jihad dans toute la région. Il y a un peu plus d'un mois, l'arrestation, à Meftah, près d'Alger, de deux terroristes tunisiens appartenant à un groupe djihadiste, et qui s'apprêtaient à rejoindre les maquis du Gspc, faisait entrer Tunis dans le cercle «très ouvert» des pays maghrébins à risque. Les deux terroristes venaient de Libye où ils étaient en contact avec d'autres organisations terroristes, comme le Groupe islamique combattant libyen. Ce qui renseigne sur les dispositions de la toile d'araignée d'opérer de nouvelles expansions et que cette connexion entre les groupes armés marocains, comme la Salafiya djihadiya ou le Gicm, et le Gspc algérien, qui se pose comme la branche armée d'Al Qaîda dans la région et le champion du salafisme, est le reflet encore instable des nouvelles mutations du terrorisme dans le Maghreb. La «fièvre du djihad» qui vient de contaminer le Maghreb ne fait certainement que commencer.