Avant, le citoyen s'endettait pour construire une demeure, s'offrir une voiture ou meubler sa maison, maintenant il le fait pour se nourrir. La vie est trop chère à Béjaïa. Ce constat est unanimement partagé par les pères de famille qui ne savent plus où donner de la tête ces derniers temps. S'il y a quelques jours, seule la pomme de terre faisait parler d'elle, ce n'est plus le cas à présent, le poisson et le poulet se mettent de la partie. De quoi donner le vertige aux consommateurs. Que l'on en juge! La pomme de terre à 60DA le kilo, le poulet à 270DA et la sardine à 150DA. Des prix qui dépassent tout entendement quand bien même des explications sont avancées par-ci, par là. Que ce soit au marché ou dans les magasins, les prix des produits de large consommation sont loin d'être abordables. Le consommateur ne comprend et ne peut comprendre cette flambée des prix, lui qui a un pouvoir d'achat très limité. Toutes les explications apportées sont, de fait, rejetées face au refrain désormais traditionnel repris par tout un chacun en référence «aux dizaines de milliards de réserves de change du pays». Partout l'inquiétude est de mise. S'agissant des produits de consommation quotidienne, le choix n'est plus possible. Comme il faut, forcément, alimenter sa famille, le père de famille se retrouve, alors, face à un dilemme qui ne peut être résolu que par l'endettement. «Avant, on s'endettait pour construire une demeure, s'offrir une voiture ou meubler sa maison, maintenant on le fait pour se nourrir» ironise cette ménagère rencontrée lundi au marché hebdomadaire Idimco qui précise: «Avant, on pouvait s'offrir un poulet par semaine qu'on achètait vivant, c'est-à-dire, moins cher, mais depuis quelques mois celui-ci est interdit». Un commerçant soutient d'un hochement de tête. A la question de savoir le pourquoi de la flambée du prix du poulet, notre interlocuteur avance plusieurs raisons dont celle liée «au manque de production en raison de la cherté de l'aliment du bétail et de l'emballage imposé par la réglementation». «Lorsque vous faites le calcul vous obtenez ce prix affiché» conclut-il. Chez le poissonnier, les motifs développés ne sont guère convaincants. «L'insuffisance de l'offre fait monter les prix» soutient-il à la question posée par un consommateur qui réplique sur un ton interrogatif: «Comment se fait-il qu'à Sétif, la sardine coûte moins cher?». Nous sommes renvoyés vers les pêcheurs. «Eux seuls peuvent vous expliquer» tonne-t-il avant de proposer ses services à un client. Mal lui en prit lorsque ce dernier ne fait que demander le prix. Des scènes comme celles-la sont si récurrentes que, parfois, il arrive qu'on assiste à des situations d'énervement engendrant des bagarres. La vie est dure aussi bien pour les consommateurs que pour les commerçants. C'est le moins qu'on puisse dire. Cet état de fait n'arrange, évidemment, les affaires de personne. La situation est sérieusement inquiétante, d'autant plus que les rumeurs font état d'une prochaine augmentation du prix du lait. Une éventualité qui ne fera qu'aggraver la situation des consommateurs déjà très précaire. On n'en est pas encore là mais «c'est déjà trop comme ça» constate, impuissante, cette ménagère qui nous confie attendre les derniers moments pour faire ses emplettes, soit l'heure des liquidations mais pas pour le poisson et le poulet, juste pour les légumes et les fruits. Ils sont nombreux, comme elle, les consommateurs qui agissent de la sorte. C'est dire la dégradation du pouvoir d'achat de l'Algérien.