«La communauté musulmane» est, désormais, une réalité politique au même titre que le chômage, la délinquance et la discrimination. Quelle alternative pour la communauté musulmane en France à l'occasion de la prochaine élection présidentielle? Telle est la problématique posée, avant-hier soir, au Centre d'accueil de la presse étrangère de Paris, à l'occasion de la présentation du livre Marianne et Allah (1), par les coauteurs, Vincent Geisser et Aziz Zemouri. Aux yeux de ces deux auteurs, entre la menace de la droite (l'UMP) et la politique en queue de poisson de la gauche socialiste, la communauté musulmane se penchera plutôt vers la politique du moins mauvais. «Avec son communautarisme sarkozyste, le candidat de l'UMP joue sur le rapport universel républicain pour séduire les musulmans à voter pour lui. Mais ces derniers sont conscients de la menace que représente Sarkozy, qui se dit pourtant un ami et frère des musulmans», lance Aziz Zemouri, grand reporter au Figaro Magazine, et auteur de plusieurs publications. En termes clairs, l'orateur avance que le «national-sarkozysme» défend des vieux thèmes de l'extrême droite en opposant systématiquement «immigration» à l'«identité française.» Quant à Ségolène Royal, l'orateur estime que la candidate socialiste constitue, aussi, une menace pour l'Islam et les musulmans, en se cachant derrière des facteurs socioéconomiques. «Si Mme Royal joue la carte des conditions socioéconomiques, ce n'est pas seulement pour gagner la sympathie des musulmans, mais pour les inciter plus tard à abandonner leur religion», a-t-il dit.Et d'apporter cette précision: «Selon la conception des socialistes, l'Islam est un refuge pour tous les maux sociaux tels que la pauvreté, le chômage, la délinquance...Dans leur idéologie, en offrant un poste de travail à un musulman, tout en lui assurant sa sécurité et son bien-être, reste la meilleure manière pour lutter contre cette religion,» a-t-il enchaîné. Y aurait-il un vote musulman pour l'extrême droite représentée par Jean-Marie le Pen? A cette question, l'auteur n'exclut pas la possibilité de voir des musulmans qui tenteraient de voter pour le Front national, et ce, en raison de la prise de position de Le Pen vis-à-vis de quelques questions internationales qui concernent les musulmans. Devant ce difficile choix, le conférencier a fait savoir que «toutes les études que l'on cite dans notre ouvrage montrent que, majoritairement, ceux qui se réclament de l'Islam votent surtout à gauche et surtout pour le PS. Ce qui, là aussi, en dit long sur la position de nombreux musulmans prompts à dénoncer ce parti comme étant, avant tout pro-israélien, mais qui, in fine, vote tout de même pour lui». Dans son intervention, le coauteur M.Vincent Geisser, a tenté de répondre à la question du communautarisme musulman en France qu'il considère comme une invention républicaine. Ce dernier a, d'emblée, dénoncé, «l'activisme islamique» qu'il considère toujours comme un produit des responsables politiques français. «Les hommes politiques français ont réussi à émerger une schizophrénie républicaine. Ils ont inventé un Islam à la française. Ils ont créé des associations musulmanes pour leur faire jouer le rôle d'interlocuteur, et ce, dans le but de porter les musulmans à la laïcité», a déclaré Vincent Geisser, qui a pris le premier la parole. Pour l'orateur, ce principe reflète la contradiction flagrante de l'esprit républicain qui adopte la laïcité. «Comment peut-on expliquer le fait que des politiques qui défendent la laïcité encouragent l'invention d'un Islam sur mesure?», s'est-il interrogé. Enfin, aux yeux des auteurs de l'ouvrage, la question de «la communauté musulmane» est, désormais, une réalité politique au même titre que le chômage, la délinquance et la discrimination. (1).Livre édité aux éditions La Découverte en mars 2007.