Soufflant le chaud et le froid, comme à son habitude, le maître de Tripoli n'est pas à sa première défection. Le Sommet arabe, le 19e du nom, s'est ouvert hier dans la capitale saoudienne. Pas moins de seize souverains et chefs d'Etat y prennent part, dont le président algérien Abdelaziz Bouteflika, arrivé, rappelons-le, à Riyadh mardi après-midi. Toutefois, ce sommet consacré à la cause palestinienne sera marqué par l'absence du roi du Maroc Mohammed VI, du président tunisien, Zine El Abidine Ben Ali et du Guide de la Jamahyria libyenne, Maâmar El Gueddafi. En sus de celle des chefs d'Etat somalien et omanais. Cependant, une autre «absence» est à signaler: c'est celle du sempiternel dossier de réforme de la Ligue, renvoyé à maintes reprises aux calendes grecques. Même le mandat de Amr Moussa, qui avait constitué la pomme de discorde entre Alger et le Caire, n'est plus à l'ordre du jour. Un mandat qui devait expirer au premier semestre 2006, de l'avis même du titulaire du poste. C'était à l'occasion d'une conférence de presse tenue fin 2005 à Alger à la veille du Sommet arabe. La division des rangs arabes a, encore une fois, été illustrée par le «bicéphalisme» du gouvernement libanais, représenté par deux délégations distinctes; celle dirigée par le président Lahoud et celle menée par son premier ministre Fouad Siniora. Une chose est sûre, le sommet de Riyadh, qui se tient dans une conjoncture difficile pour la nation arabe, rongée par les crises irakienne, palestinienne et la tension au Moyen-Orient avec le dossier nucléaire iranien, est boudé par le dirigeant libyen, Maamar El Gueddafi qui, lors d'un entretien à la chaîne satellitaitre Al Jazeera, a avancé ses arguments quant à cette défection. «Je ne participerai pas à un sommet qui divise l'Islam en deux et dresse les sunnites et les chiites les uns contre les autres», a déclaré le colonel El Gueddafi. Pourtant, tout le monde sait que la tension entre Tripoli et Riyadh remonte au sommet d'Aman, quant Riyadh avait accusé les services secrets libyens d'avoir planifié l'assassinat du prince héritier Abdallah Ben Abdelaziz. D'ailleurs, lors du sommet de Charm el-Cheikh (Egypte) en 2003, le roi Abdallah, alors prince héritier, avait échangé de vifs propos avec El Gueddafi en direct à la télévision. Voulant à tout prix conforter son argumentaire, El Gueddafi a ajouté ne pas faire confiance aux autres pays arabes parce que ceux-ci ne se sont pas rangés à ses côtés quand les Etats-Unis avaient imposé des sanctions à la Libye, dans les années 80, pour ses liens avec le terrorisme. Soufflant le chaud et le froid, comme à son habitude, le maître de Tripoli n'est pas à sa première défection, aussi bien au sein de la Ligue arabe, de l'Union africaine que de l'UMA. N'a-t-il pas organisé un sommet extraordinaire de l'OUA à Syrte, deux mois seulement après la tenue du sommet d'Alger en 1999. Il s'agissait juste de ravir la vedette à l'Algérie qui revenait sur la scène internationale. Par ailleurs, quelques jours avant l'ouverture du sommet de Riyadh, le colonel El Gueddafi avait dépêché son ministre des Affaires étrangères, Abderrahmane Chelgham à Alger et à Tunis pour sensibiliser à sa cause les dirigeants de ces deux pays. Un coup d'épée dans l'eau, puisque aussi bien l'Algérie que la Tunisie sont présentes au sommet, même si le président Ben Ali sera représenté par son premier ministre, Mohamed Ghannouchi. Quant au roi Mohammed VI, qui avait participé aux deux précédents sommets, il s'est fait représenter par son frère le prince Moulay Rachid. Il est clair que Sa Majesté ne se serait pas encore remise de la débâcle essuyée par la diplomatie marocaine concernant le fameux plan d'«autonomie» du Sahara occidental.