Treize dirigeants arabes prennent part à la rencontre. Ils sont venus, ils étaient presque tous là à Tunis, et tant pis pour les absents. Longtemps, en effet, a plané, sur le sommet de Tunis, le risque de ne pas atteindre le quorum justifiant sa tenue. Mais hier, plusieurs chefs d'Etat et souverains étaient présents dans la capitale tunisienne, levant l'hypothèque qui pesait ces derniers jours sur sa tenue. Il faut noter ici la présence en force des Maghrébins, y compris le tonitruant guide libyen, Maamar El Gueddafi, -lequel constant dans ses (mauvaises) habitudes à quitté Tunis si tôt le sommet ouvert-, et le voisin égyptien Mohamed Hosni Moubarak. Il est patent que la présence du souverain chérifien, Mohamed VI, des présidents algérien et mauritanien, Abdelaziz Bouteflika et Maouiya Ould Sid Ahmed Taya, est une sorte d'hommage et de solidarité au président tunisien Zine Al Abidine Ben Ali sous l'égide duquel se tient ce rendez-vous arabe, qui doit faire date, eu égard aux dossiers cruciaux soumis à l'examen des chefs d'Etat et souverains arabes. Parmi ces derniers notons la présence du souverain jordanien, Abdallah II, de l'Emir du Qatar, Hamad Ben Khalifa Al-Thani et des présidents syrien, Bachar Al-Assad, libanais Emile Lahoud, djiboutien Ismaïl Omar Guelleh. Le Bahreïn, président en exercice du sommet arabe, est représenté par le Premier ministre cheikh Khalifa Ben Salmane Al-Khalifa qui a transmis à Zine Al Abidine Ben Ali la présidence du nouvel exercice. Une présidence qui débute en vérité quelque peu dans le doute, ambiguïté accentuée par l'absence de nombreux souverains et chefs d'Etat arabes notamment celle du prince héritier saoudien, Abdallah Ben Abdelaziz, donnant lieu à supputation sur l'engagement réel de l'Arabie saoudite au train de réformes que le sommet de Tunis doit notamment officialiser. En réalité, le monde arabe est depuis longtemps mal parti, étant incapable de susciter de l'intérieur, des pays arabes, des réformes que le plus autoritaire des dirigeants arabes estime aujourd'hui nécessaires. En fait, si le sommet arabe place le dossier des réformes en première ligne c'est d'abord pour ne pas se faire déborder, et imposer, par les grandes puissances, singulièrement la première d'entre elles, les Etats-Unis, les changements qui auraient dû intervenir dans la foulée de la chute du mur de Berlin et de la disparition de l'Union soviétique. Tout autour des pays arabes le monde a changé, a évolué, alors que le monde arabe insensible à ce qui se passe autour de lui, demeure dans son cocon, se trouvant aujourd'hui confronté à des choix qui peuvent ne pas être les siens et de son seul vouloir. Ceux qui ont décidé de ne pas venir à Tunis, outre de jouer à l'autruche, font en réalité le jeu de ceux qui veulent, et sont prêts, d'une manière ou d'une autre, à réformer le monde arabe avec ou sans le consentement de cette région stratégique, tant du point de vue de la sécurité du monde, que le l'approvisionnement en énergie, dont les trois quart des réserves prouvées de pétrole et de gaz dans le monde se trouvent au Moyen Orient et en Afrique du Nord (Maghreb). C'est dire tout l'intérêt attaché à un sommet qui doit faire franchir le Rubicon au monde arabe, c'est-à-dire donner aux pays arabes de prendre en charge leur propre réforme, cela en adéquation avec leurs cultures et croyances. Et de fait, la tâche sera loin d'être aisée pour le président Ben Ali qui aura la lourde charge de mettre le train du changement arabe sur les rails. De fait des pays arabes ont déjà engagé, à leur niveau, une démocratisation, plus ou moins réussie, selon les avancées politiques et sociales induites ces dernières années. Démocratisation qu'il convient toutefois d'approfondir et surtout de rendre irréversible. Aussi, c'est de l'action qui est attendue des Etats arabes pour promouvoir de manière concrète les droits de l'Homme, la démocratie, les libertés et la bonne gouvernance dans le monde arabe. Défi qui reste, au sommet arabe de Tunis, à relever. C'est là, en fait, que les chefs d'Etat et souverains arabes sont attendus.