La culture est ce qui reste lorsque tout est dilué. C'est ce que pense sans doute l'ambassadeur de France, parlant de la coopération algéro-française. «Aucun accord culturel n'est aussi ambitieux que celui que nous allons proposer à l'Algérie», a souligné l'ambassadeur de France en Algérie, avant de poursuivre que, «pour la France, le Maghreb est un partenaire stratégique et l'Algérie, particulièrement, a une part importante dans cet échange». M.Bernard Bajolet a tenu à faire ces déclarations lors du débat «A coeur ouvert» organisé lundi dernier par notre quotidien L'Expression. La France désire se rapprocher de l'Algérie via le pôle culturel. Potentiellement, c'est indéniable. Pour ce faire, «il faut travailler concrètement», dira M.Bernard Bajolet, qui ajoutera: «Nous allons renégocier avec l'Algérie la convention dite Accord de coopération culturelle, qui date de 1986. Nous allons transmettre à la partie algérienne de nouveaux textes de conventions qui définiront les objectifs prioritaires en commun pour les 5 années à venir en matière de coopération. Ce sont des textes liés aux différents aspects de cette coopération dans le domaine culturel certes, mais aussi de l'information, de l'économie, des finances et de la sécurité». Et de faire relever avec conviction: «Je crois pouvoir dire qu'aucun autre accord n'est aussi ambitieux que celui que nous allons proposer à l'Algérie.» Comme l'indiquait récemment M.Philippe Douste-Blazy, ministre des Affaires étrangères, la France vise à renforcer son partenariat avec le Maghreb. Aujourd'hui, les autorités françaises affichent clairement leurs intentions de rapprochement et d'approfondissement de leur relation avec le Maghreb et ce, en développant une culture de «l'image». Cela se traduit sur le terrain par la nette volonté du groupe Canal+, notamment et sa filiale pour l'international Media Overseas, de lancer ses chaînes au Maghreb en les commercialisant à des prix réduits. S'agissant de contrer l'hégémonie de la langue anglaise, M.Bajolet répond, fair-play: «On ne ressent aucune concurrence ni jalousie. Il est légitime que l'Algérie ait d'autres partenaires. La relation entre la France et l'Algérie n'est pas exclusive. C'est naturel. Si l'anglais permet aux Algériens de s'ouvrir sur le monde, c'est tant mieux.» Il n'empêche que Son Excellence reconnaît toutefois volontiers, que l'audiovisuel est un bon tremplin pour le développement de la francophonie dans le monde. Et d'estimer tout de même: «C'est à nous de faire plus d'effort en communication afin de faire mieux connaître ce qu'on fait, ce qui va peut-être rafraîchir notre image. C'est à la France de veiller à maintenir la place du français en Algérie. C'est vrai qu'il y a beaucoup d'effort à faire. Cet effort doit toucher tous les niveaux, les médias, le livre, l'enseignement supérieur...». Si beaucoup de choses sont en train de se faire au niveau des médias, le cinéma, lui, s'est emparé de cette culture de «l'image». M.Bajolet évoque les nombreuses coproductions entre l'Algérie et la France qu'il convient d'encourager. Les mémoires se délient. Aujourd'hui, beaucoup de films sur ou autour de la guerre d'Algérie sont tournés. Même s'il reste encore des choses à faire, une certaine chape de plomb a été levée. «Cette mémoire doit être partagée. Le plus grand chemin à faire est celui des Français, mais cela ne veut pas dire que les Algériens n'ont aucun chemin à faire. On a tout de même progressé. On n'est pas au bout du chemin. Il faut regarder l'histoire en face pour être en paix avec son passé et construire le futur. C'est par toute chose concrète que ce travail de mémoire doit se faire. Il faut qu'il n'y ait aucun sujet tabou entre l'Algérie et la France». Voilà qui est dit! Peut-être que là où la politique a échoué, le traité d'amitié, entre autres la culture, elle, réussira-t-elle à ressouder les liens entre l'Algérie et la France? Enfin, M.Bernard Bajolet se dit agréablement surpris par la situation linguistique de l'Algérien, qui vit sa francophonie sans aucun complexe, tout en maîtrisant parfaitement les deux langues, arabe et française. Ayant déjà connu l'Algérie dans les années 80, il estime que la situation s'est nettement améliorée, à tout point de vue. Les entreprises françaises installées en Algérie avouent ne pas avoir de difficultés à recruter des cadres algériens.