La «bonne nouvelle» annoncée samedi par le président iranien consiste dans le nouveau bond de l'Iran dans la maîtrise du nucléaire. Comme il ne faisait pratiquement pas de doute, «la bonne nouvelle» annoncée samedi par le président Ahmadinejad, consistait dans le passage à un niveau élevé de l'enrichissement de l'uranium d'une part, de la production en quantité industrielle de centrifugeuses, d'autre part. C'était celle-là l'annonce qui devait être faite hier au peuple iranien. Devant un parterre de hauts dirigeants et dignitaires du pays, dont le président Mahmoud Ahmadinejad, le président de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (Oiea), Gholam-Reza Aghazadeh, a officiellement annoncé le passage de l'Iran à l'enrichissement industriel d'uranium, cela à l'occasion du premier anniversaire de la «Journée nationale de l'énergie nucléaire», journée instituée l'an dernier. «Nous sommes réunis ici aujourd'hui pour célébrer l'entrée du projet d'enrichissement d'uranium à un niveau industriel», a dit M.Aghazadeh. Celui-ci a également annoncé «le début de la production en masse de centrifugeuses» pour l'enrichissement d'uranium. Alors que l'Occident attendait de l'Iran un arrêt total de l'enrichissement de l'uranium, ce dernier est, a contrario, passé à la vitesse supérieure se donnant les moyens de sa politique. Ce nouveau défi de l'Iran n'augure en fait rien de bon, alors que la résolution 1747 du 24 mars dernier - qui fait suite à celle 1737 du 23 décembre - exigeait de Téhéran la suspension de ses expériences d'enrichissement. Le bras de fer Iran-Occident prend dès lors de nouvelles dimensions, d'autant plus que l'Iran qui s'appuie sur un texte du Conseil de sécurité, le Traité de non-prolifération nucléaire (TNP, adopté en 1968 et renouvelé en 1995 qui donne droit aux pays de procéder à de telles recherches sur le nucléaire), n'entend pas céder sur ses droits au nucléaire pacifique, à la recherche et à l'enrichissement nucléaire, et refuse de discuter de son «droit légitime», comme l'a réitéré dimanche Mohammed Ali Hosseini, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, qui a affirmé: «Nous ne faisons rien qui soit contraire au Traité de non-prolifération (TNP) et il n'y a aucune raison (...) pour suspendre». Ce que, à l'évidence, l'Occident - suivi par le Conseil de sécurité dominé par les pays détenteurs du droit de veto - ne l'entend pas ainsi, et est prêt, sous la pression d'Israël et des Etats-Unis, de passer à l'acte. Ce qui serait gravissime pour la paix dans le monde, d'autant plus que Téhéran n'entend pas, de son côté, se laisser intimider. La journée d'hier a été marquée par le premier anniversaire de l'enrichissement de l'uranium iranien à 3,5%, pourcentage suffisant permettant la production de combustible nucléaire. Il faut savoir, cependant, qu'il faut un uranium enrichi à 90% pour pouvoir produire la bombe atomique, ce que l'Iran nie avoir à son programme qui est un programme civil. Les grandes puissances craignent justement que la République islamique ne détourne son programme civil à des fins militaires afin d'obtenir la bombe atomique. Téhéran a toujours démenti que telle est son intention. De fait, l'Occident veut tout simplement interdire à tout pays non agréé -ou ne faisant pas partie du cercle restreint des «initiés»- la maîtrise du nucléaire. Cette maîtrise peut aboutir à terme, c'est évident -pour tous ceux qui en possèdent les capacités- à la fabrique de la bombe atomique. Dès lors, on comprend que l'Iran soit devenu le test, grandeur nature, pour tout pays aspirant à se lancer dans la recherche nucléaire. Conscient du fait que l'annonce du passage à l'enrichissement industriel, allait aggraver la tension avec l'Occident, l'Iran a pris des mesures sécuritaires draconiennes. Ainsi, de véritables chaînes humaines ceinturaient hier les principaux centres nucléaires iraniens, notamment l'usine de conversion nucléaire d'Ispahan et le chantier du futur réacteur de recherche d'Arak (les deux dans le centre). L'Iran qui prend au sérieux les menaces d'attaques venant notamment d'Israël qui brûle de rééditer le coup de Tamuz -la centrale nucléaire irakienne détruite en 1981- s'est ainsi entouré de toutes les précautions nécessaires pour prévenir un tel coup. Le secrétaire général du Conseil suprême de la sécurité nationale, Ali Larjani, a affirmé hier, depuis l'usine de Natanz, que l'Iran n'aura d'autre choix que d'abandonner le Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) s'il est soumis à de «nouvelles pressions» sur son programme nucléaire indiquant, dans une déclaration à la presse: «Si (les grandes puissances) exercent de nouvelles pressions, nous n'aurons pas d'autre choix que de reconsidérer notre appartenance au TNP, comme en a légiféré le Parlement.» Le Conseil de sécurité de l'ONU a déjà requis des sanctions contre l'Iran du fait de son refus de suspendre son enrichissement d'uranium, menaçant de les aggraver si Téhéran persiste dans son refus. Washington a été le premier à réagir hier par la voix du porte-parole du département d'Etat, Sean McCormack, qui a indiqué que l'annonce de Téhéran représente un nouveau «défi de l'Iran envers l'appel de la communauté internationale, qui lui demande de cesser ses activités liées à l'enrichissement», justifiant, selon lui, la voie des sanctions prises par le Conseil de sécurité.