Il aurait été plus judicieux pour l'ambassade de circonscrire tout renseignement sécuritaire à une sphère restreinte. Depuis les attentats du 11 avril à Alger, la rumeur et l'intox se sont, de nouveau, installés, alimentant la psychose au sein de la population. Cependant, tout dépend de l'origine et de la véracité de ces informations. On pourrait admettre une rumeur émanant de la société, mais pas d'une institution. C'est le cas de l'ambassade américaine en Algérie qui a mis en garde ses ressortissants contre d'éventuels attentats terroristes qui, selon elle, pourraient survenir, hier à Alger. Jusque-là tout va bien, sauf que la représentation diplomatique US est allée plus loin. Elle a outrepassé ses prérogatives, en «prédisant» des attentats dans la capitale pour la journée d'hier. D'après le communiqué, les zones qui devaient être visées par les attaques d'Al Qaîda sont la Grande Poste et le siège de l'Entv. Une curieuse annonce qui fait paradoxalement l'affaire des terroristes, dont le terreau est l'intox et la manipulation. Même si le communiqué parle d'informations «non encore vérifiées», il reste que ce doute est susceptible de semer la terreur parmi la population, surtout que le document en question a été diffusé en boucle par les chaînes Itélé et Al Jazeera, qui jouissent d'une grande audience auprès des téléspectateurs algériens. Pourquoi une telle annonce, au moment où les Algériens ne se sont pas encore remis des derniers attentats terroristes qui ont fait 33 morts et 57 blessés? Pourtant, il aurait été plus judicieux pour l'ambassade des Etats-Unis de circonscrire tout renseignement d'ordre sécuritaire dans une sphère restreinte. C'est-à-dire l'examiner avec les différentes structures nationales et régionales chargées de la lutte antiterroriste et dans la discrétion la plus totale. Il est clair que le fait d'ébruiter un renseignement sécuritaire, qu'il soit vrai ou faux, pourrait alerter les auteurs des attentats. Hier, aucune mesure sécuritaire particulière n'était visible à proximité de la Grande-Poste ni près du siège de la Télévision. En effet, si réellement «projet» d'attentat il y avait, les services de sécurité algériens auraient pris toutes les dispositions pour éviter le «pire». A noter que même si la coordination entre Alger et Washington, en matière de la lutte antiterroriste est qualifiée d'«exemplaire», il reste que des précautions s'imposent pour ne pas faire le jeu des terroristes. Il est évident que la décision de l'ambassade US de mettre en garde contre des attentats à Alger est en est soi une bonne chose. Mais à condition que ces «renseignements» ne contribuent pas à accentuer la psychose, en les lâchant sur la place publique. Il y va de la souveraineté de l'Algérie. Car, quand on mène une lutte implacable contre un ennemi invisible, la discrétion est de mise.