Le communiqué de l'ambassade des Etats-Unis a-t-il pris en considération les éventuelles répercussions d'un tel fait d'annonce sur les habitants des quartiers cités comme cibles potentielles des explosions? La réaction des autorités algériennes à ce qui est convenu d'appeler l'incident diplomatique causé par le communiqué, rendu public par l'ambassade des Etats-Unis à Alger, le samedi 14 avril, soit trois jours après les attentats terroristes ayant visé le Palais du gouvernement à Alger-Centre et un commissariat des forces de police à Bab Ezzouar, a le mérite de réconforter les Algériens sur la question de la souveraineté nationale mise à mal par cette représentation diplomatique d'un pays étranger qui confond Alger avec Baghdad et Mogadiscio. Le chargé d'affaires des Etats-Unis à Alger a été convoqué, le lendemain, dimanche 15 avril, au siège du ministère des Affaires étrangères pour s'expliquer sur cette attitude qualifiée d'«inacceptable», «inopportune». Un message clair, net et précis que Washington et son ambassadeur, fraîchement débarqué de la capitale irakienne, auront tout le temps de décrypter. C'est aussi le message des citoyens algériens brusqués par l'annonce de l'ambassade du pays de l'Oncle Sam d'une alerte sur le risque d'attentats imminents dans la capitale. Une information qui a jeté un froid dans le dos des Algérois encore sous le choc des attentats kamikazes. En fin de journée du dimanche 15 avril, l'ambassade des Etats-Unis à Alger réagit et se défend de toute «arrière-pensée», jugeant la réaction des médias algériens de «spéculations» et d'«inappropriée». C'est vrai qu'une telle attitude est la caractéristique de la politique extérieure des USA, particulièrement dans les pays à risque et les centres de conflits. Ces lieux sont nombreux dans le monde et ont tendance à se multiplier, justement, par la faute de la politique des «gros sabots» suivie par l'administration Bush et les Faucons de la Maison-Blanche. Libre donc aux Américains de sensibiliser, d'alerter ou d'informer leurs ressortissants là où ils sont, mais sans violenter les «autochtones» avec des annonces apocalyptiques dans des moments de désarroi où l'appel au calme semble plus approprié et plus indiqué dans pareilles circonstances. La panique génère souvent des catastrophes. Ce communiqué biscornu et incongru, a-t-il pris en considération les éventuelles répercussions d'un tel fait d'annonce sur les habitants des quartiers cités comme cibles potentielles des explosions? Ou alors, considère-t-on les Algériens comme une quantité négligeable dans ce monde où la mondialisation laisse peu de place aux petits peuples dont nous faisons partie? Ces petites gens, ce que nos amis américains savent déjà, sont aujourd'hui connectés aux réseaux d'information internationaux, suivent pas à pas les bouleversements du monde, s'initient aux questions d'ordre géostratégique et surtout savent que les USA, seule puissance mondiale, dominent ce monde. Les Algériens savent, aussi, que les différents services de sécurité intérieurs et extérieurs américains ont tissé une toile d'information sur la planète Terre, qu'ils ont les moyens d'entendre les battements de nos coeurs avec leur technologie de pointe et les relais qu'ils ont plantés un peu partout dans le monde. Les Algériens savent surtout que les Américains s'intéressent aux pays qui recèlent des richesses naturelles ou se situent dans des positions géographiques stratégiques. Le continent africain est devenu le nouveau centre d'intérêt des puissances mondiales qui se disputent l'approvisionnement en énergie. L'instabilité du Moyen-Orient pose problème. La facture à payer est devenue très élevée, particulièrement depuis que le mouvement de résistance incarné par l'Iran, le Hamas, le Hezbollah, les talibans et la résistance irakienne ont bloqué le processus de la construction du projet du Grand Moyen-Orient (GMO) cher à l'administration Bush. L'Algérie, le Soudan, la Somalie, le Grand Sahara et l'ensemble des pays du Sahel et de l'Afrique centrale sont devenus les nouveaux centres de tension et d'intérêt. Les crises et les conflits ont pris des proportions alarmantes. Chasse gardée de l'Europe, l'Afrique assiste à l'avènement sur son sol de deux nouvelles puissances: la Chine et les USA. Face à de tels défis, les Algériens n'ont à faire valoir que l'unité nationale et la farouche volonté de vivre libres et sous la protection d'un Etat souverain. L'histoire a appris à ce peuple comment résister et déjouer les scénarios les plus alambiqués qui attentent à son intégrité. Les années de terrorisme de masse, vécues par les Algériens dans la solitude et l'isolement, ont permis à l'Algérie de reconnaître ses amis et d'identifier ses ennemis. Quant aux leçons à donner à la presse, s'il y a lieu de le faire, nos médias sont bien placés pour le faire, sans rougir particulièrement quant il s'agit de défendre une certaine liberté de ton. La bataille (médiatique) d'Alger n'aura pas lieu. Et si elle y est, les Algérois la gagneront sans doute aucun avec ou sans «spéculations». La preuve: ils n'ont pas cédé à la panique. Mieux encore, ils veulent se faire entendre en organisant des rassemblements sur tout le territoire national. Une question de réflexe, c'est tout.