Quel décor, Alger! Ses palais, ses terrasses, ses jardins, ses quais et son peuple bigarré. Le tandem Tadjer-Aïssaoui nous a produit une pièce de théâtre des plus captivantes dans le cadre d'«Alger capitale de la culture arabe». Madinet el Hob est une fresque historique qui traite d'une période particulière de la capitale, à savoir la période ottomane, celle qui précède de peu l'agression coloniale sur l'Algérie. En 12 tableaux, une galerie de personnages hauts en couleur nous retracent les péripéties d'une ville cosmopolite dans laquelle se côtoyaient divers peuples autochtones ou venus des rives de la Méditerranée: Maltais, Espagnols, Français, Italiens etc.; et bien sûr les trois religions du Livre y sont également représentées; musulmans, bien sûr, mais aussi chrétiens ou juifs. Alors que la course bat son plein, la Régence est une plaque tournante convoitée par les puissances de la rive Nord de la Méditerranée. Le début du XIXe siècle a sonné le glas de l'hégémonie ottomane et la montée inexorable du capitalisme a changé la donne économique et politique dans la région, comme partout ailleurs dans le monde. Le Dey Hussein, qui joue dans la pièce un rôle important, a peut-êre fait les erreurs qu'il ne fallait pas, en vendant au crédit, du blé à la France et en nommant à des postesclefs des représentants comme Bouchenaq et Bakri. Le coup d'éventail n'est pas loin et avec lui, l'occupation du pays et la résistance qui s'en est suivie et qui n'a jamais faiblie. Ce que l'on peut dire, c'est que l'acteur Djamel Bounab a été époustouflant dans le rôle de Chameoun. En tant qu'acteur de théâtre, il restera comme la révélation de l'année 2007, consacrée à la culture arabe. On avait l'habitude de le voir dans quelques dramatiques à la télévision, mais le moins que l'on puisse dire est qu'il a laissé éclater son talent. Les autres comédiens n'ont pas moins de mérite pour donner à la pièce toute sa valeur, nous montrant des aspects d'Alger qu'on ne connaissait pas toujours. Que ce soit Khedaoudj el Amia ou Cervantès, Alger est apparue comme une capitale maritime bigarrée, cosmopolite, avec ruelles organisées en corporations, son architecture incomparable, sa population (les Mezghana) qui ont développé des traditions raffinées et toutes les populations venues des quatre coins du monde. Ses Hozi, ses janissaires, ses corsaires, ses marchands, ses prisons aussi bien sûr. L'une des meilleurs répliques restera cette remarque du Syrien de passage Alger «Vous avez des ouled lehram en Algérie? -Oui, il n'y a que ça, lui répond son hôte. -Chez nous aussi,; au Sham, il y a des ouled lehram!» C'est donc la chose la mieux partagée. Comédien de théâtre depuis 1963, le réalisateur Abdelkader Tadjer est également scénariste et auteur de théâtre. Il a écrit 4 scénarios pour la télévision: Un Immense espoir, Fatma dans la ville, et deux pour le cinéma: Rai et Amour interdit. Quant au producteur Boualem Aïssaoui, il faut savoir que cet ancien élève de l'école nationale supérieure de journalisme d'Alger a occupé des fonctions de responsabilité dans la production radiophonique et cinématographique nationale et qu'il est l'auteur de publications sur l'audiovisuel et le cinéma? En tant que directeur de la boite audiovisuelle Cim, il a réalisé de nombreuses oeuvres de fiction et de documentaires comme un feuilleton sur Iguerbouchen et un autre sur Rachid Ksentini.