Chargée d'histoire et même de passion, la fête des cerises est un événement en soi en Kabylie. La fête revient en cette première semaine de juin, pour raconter le beau et aussi le combat de l'homme contre une difficile nature et aussi donner un aperçu sur les enfants de la région. Des enfants qui ont participé à faire l'histoire glorieuse, lors de la longue marche du pays vers la liberté. Berceau de l'une des premières manifestations de la revendication culturelle, la fête des cerises a connu, en son temps, les arrestations, les «brimades» et autres violences du système unique et inique envers une partie du peuple. La commune de Larbaâ Nath Irathen renoue cette semaine avec cette fête qui, durant près d'une semaine, va égayer cette jolie ville du Djurdjura, perchée fièrement sur les sommets jouant traditionnellement, avec d'autres, les gardiennes vigilantes des valeurs traditionnelles et avançant doucement ses pions vers la modernité. Cette terre de héros, mais quel est donc ce village ou ce hameau de Kabylie qui n'en compte pas, quand la région a su, dès les premiers feux de la Toussaint sacrée, s'engager corps et âme dans la bataille du destin? Comment rendre un hommage mérité à cette région si ce n'est qu'en renouant avec l'esprit de la fête des cerises qui est un hymne en l'honneur de ces rudes paysans qui, de leurs mains calleuses, ont su dompter une nature avare et difficile et des sols schisteux, en tirer leur subsistance. Comment passer aussi, sous silence, les hommes de la stature de Laïmèche Ali, ce digne fils de Tizi Rached, la région mitoyenne et surtout Ali Ferhati et le grand Abane Ramdane, celui que d'aucuns avaient surnommé à juste raison le Jean Moulin de la Révolution nationale, celui-là, que des «nains», parvenus par les hasards de l'histoire, ont un jour voulu salir. La Kabylie n'a, certes, pas de terres fertiles mais le ventre de ses femmes a donné naissance à plusieurs héros dont Abane Ramdane, Krim Belkacem, Ali Laïmèche, Ouamrane, Ali Mellah et tant d'autres célèbres ou inconnus. C'est de tout cela et de ce sens particulier dont est chargée cette fête que l'APC de Larbaâ organise du 3 au 8 juin. Un riche programme est tracé à cet effet, un programme axé sur le travail et l'effort tout en n'oubliant pas l'histoire qui est aussi très forte. Animation folklorique, carnaval d'enfants, conférences sur le cerisier alterner- ont avec les manifestations sportives, le théâtre, la poésie, la danse et le cinéma pour redonner à Larbaâ Nath lrathen, son cachet de ville accueillante. Un cachet qu'elle n'a, d'ailleurs, jamais perdu. Larbaâ se pare pour la circonstance mais a-t-elle réellement besoin de se parer quand la ville comme, d'ailleurs la région, sont, en fait, des perles de la nature? Le cerisier raconte l'histoire de la terre et la terre est riche de celle des hommes qui l'ont pétrie et souvent affrontée pour la libérer et faire refleurir le sourire sur le visage de l'enfant.