La marche d'aujourd'hui constitue une nécessité vitale aux fins de jauger ses forces après plus de dix mois de contestation, souvent violente, en Kabylie. Un dispositif sécuritaire aux portes de la capitale a été disposé hier, confirmant par la même la décision d'interdiction de la marche du FFS prise par le ministre de l'Intérieur et réaffirmée hier à l'APN. Selon des sources bien informées, les services de sécurité ont reçu des consignes pour rester discrets, mais prêts à toute éventualité. Du côté du parti d'Aït Ahmed, on annonce, en revanche, que les préparatifs pour le jour J vont bon train. Contacté hier au téléphone, les militants FFS de Kabylie disent être décidés à marcher à Alger, malgré la réaction négative des pouvoirs publics, à laquelle ils s'attendaient du reste. Le discours du Président de la République d'avant-hier, ne semble pas fléchir la détermination du parti qui n'a pas hésité de le qualifier de non-événement, insinuant par la même que les mots d'ordre qui ont motivé la manifestation d'aujourd'hui sont encore d'actualité, à en croire les responsables du FFS. Aussi, la décision de faire de tamazight une langue nationale, ainsi que les autres mesures pratiques annoncées par le chef de l'Etat au Palais des nations sont-elles considérées par le FFS comme largement en deçà des attentes de la population en Kabylie. Cela étant, la marche d'aujourd'hui se veut d'abord nationale, même si l'essentiel des manifestants viendra de Kabylie. D'autres mots d'ordre relatifs à la gestion du volet sécuritaire par l'Etat sont inscrits dans la liste de revendications politiques qui ont poussé le parti d'Aït Ahmed à investir la capitale, à quelques semaines d'un important rendez-vous électoral. A ce propos, certains observateurs n'hésitent pas à faire la liaison avec les prochaines élections législatives. Ce serait une manière comme une autre de lancer une campagne électorale. Cela fait dire à bon nombre d'observateurs que la marche d'aujourd'hui poursuit un objectif d'abord électoraliste. Rejetée par les radicaux des ârchs, la consultation populaire du 30 mai prochain devient problématique pour les formations politiques majoritaires dans la région. Le FFS, qui dispose en Kabylie d'un réservoir électoral très important, ne peut, en effet, décider de participer aux législatives que s'il est assuré d'un bon score dans son fief. La marche d'aujourd'hui constitue de ce point de vue, une nécessité vitale aux fins de jauger ses forces après plus de dix mois de contestation, souvent violente, en Kabylie. Boycotter les urnes serait un acte suicidaire pour un parti politique. C'est en cela que le parti d'Aït Ahmed vit un véritable dilemme qui ne cessera que s'il arrive à renverser la situation en sa faveur. Le fait est qu'il est pris en tenailles entre les radicaux des ârchs qui ne veulent pas du tout d'élections et le pouvoir décidé, coûte que coûte, à interdire toute manifestation à Alger. Un état de fait qui laisse une très légère marge de manoeuvre à une formation qui joue sérieusement son avenir politique, dans un climat pour le moins électrique. En attendant l'heure H (14 heures), les Algérois appréhendent cet événement et craignent un remake du 14 juin 2001, même si l'on assure au FFS que les marcheurs feront montre d'un esprit de responsabilité. En tout état de cause, ce jour ne sera pas de tout repos pour les services de sécurité qui auront à disperser des manifestants qui viendront sans doute en masse se regrouper à la place du 1er-Mai, encadrés par les responsables nationaux du FFS. Le gros des troupes sera, lui, empêché d'entrer dans les limites de la wilaya d'Alger.