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Les nuages dissipés
ALGERIE-FRANCE
Publié dans L'Expression le 09 - 07 - 2007

Le courant passe entre Bouteflika et Sarkozy. Ça tombe bien, parce que les relations bilatérales ont besoin de cette bonne entente pour booster le partenariat et la coopération.
Quoique écourtée de sa partie marocaine, la visite de Nicolas Sarkozy aura le mérite de lever le voile sur son projet d'Union méditerranéenne. Mais au-delà de ce prétexte à caractère régional, on retiendra surtout la relance de la relation politique entre Alger et Paris, d'autant plus qu'il est de notoriété publique que Bouteflika et Sarkozy ont des atomes crochus.
Le porte-parole de l'Elysée assure que Sarkozy n'a pas un projet ficelé. Il viendra surtout pour écouter ses homologues maghrébins. L'essentiel à retenir, concernant le chef de l'Etat français, c'est sa connaissance parfaite de l'Algérie, un pays où il est venu à plusieurs reprises, soit en tant que ministre des Finances, soit en tant que ministre de l'Intérieur. Mais surtout on retiendra l'effort qu'il a fait de venir en Algérie, en plein milieu de la campagne présidentielle en France, ce qui prouve l'intérêt qu'il portait au soutien d'Alger et à la nécessité de nouer des relations profondes entre les deux rives de la Méditerranée.
Ça c'est pour le côté jardin de la visite, son volet relations personnelles entre les deux chefs d'Etat. Ses entretiens avec Bouteflika qui avaient duré des heures, est un indice de la qualité et de la densité des relations bilatérales, ainsi que de la confiance qui règne à leur niveau. On ne peut parler d'un couple Algérie-France si les relations humaines ne sont pas au beau fixe entre les deux dirigeants. Or, tout indique qu'elles le sont.
A partir de là, tout est possible. Et tout se négocie: la France est le premier fournisseur de l'Algérie, et l'un de ses principaux clients. Les affaires étant les affaires, il va de soi qu'il s'agira de traiter, en toute transparence, et dans l'esprit de la saine concurrence tous ces dossiers. Mais le fait que Nicolas Sarkozy, quelques semaines à peine après son investiture ait décidé de venir au Maghreb, avec dans ses valises, un projet d'Union méditerranéenne est en soi de bon augure. Mais le dossier Algérie n'a pas été absent des thèmes de campagne de Nicolas Sarkozy, et pas seulement en ce qui concerne l'émigration clandestine ou les problèmes de sécurité. Bien au contraire, lors de sa venue à Alger, le ministre de l'Intérieur qu'il était, avait promis d'alléger les procédures de visa, tout en en augmentant la quantité. On peut dire que promesse a été tenue. Question circulation des personnes, et quelles que soient les remarques que l'on peut formuler à l'adresse du locataire de l'Elysée sur son glissement droitier, il est clair que le durcissement annoncé, n'a pas eu lieu, y compris en banlieue, en dépit de la fermeté d'Hortefeux...
Mais le volet le plus important, juste après celui de la circulation des personnes, concerne bien entendu l'économie. Pour l'Algérie, la priorité est donnée à l'investissement direct étranger. Une délégation du Forum des chefs d'entreprise s'est rendue à Paris où elle a rencontré ses homologues du Medef. On voit, au fil des années, que les Français, que l'on dit frileux, sont plutôt intéressés par le créneau des services (banques, assurances). Ils ont du reste postulé pour la reprise du Crédit populaire d'Algérie CPA (en voie de privatisation). Cela dit, les banques françaises sont déjà assez nombreuses en Algérie, et elles sont dynamiques. Elles essaient de conquérir le terrain par le crédit à la consommation, un produit où les banques publiques algériennes restent timides, mais surtout depuis quelque temps, elles ciblent la petite et moyenne entreprise. Longtemps, la prise de risque est un concept inconnu, voire méconnu en Algérie, et voilà que des banques étrangères filiales de grandes banques internationales ouvrent le bal, d'autant plus que les scandales financiers qui ont touché aussi bien des banques publiques que privées algériennes ont laissé un arrière-goût amer dans le domaine des règles prudentielles.
Mais Nicolas Sarkozy dépasse ce cadre pour viser un partenariat autrement plus fort, dans le domaine de l'énergie, plus particulièrement, gaz et nucléaire civil. L'energie d'aujourd'hui et celle de demain dans un même pack. Les garanties que présente l'Algérie sont réelles: richesses énergétiques, réserves de change, un plan de consolidation de la croissance de 100 milliards de dollars pour la construction d'infrastructures de base (routes, autoroutes, rails, logements, structures de santé, usines de dessalement d'eau, barrages...). Et puis, il y a ce projet de Méditerranée, un dossier dans lequel il se croit investi d'une mission. Il voit les choses en grand. Après avoir sauvé l'Europe par un minitraité qui remet l'Union sur les rails, n'a-t-il pas ravi la vedette à ses pairs européens au dernier sommet de l'Union, obligeant les jumeaux polonais à faire des concessions au forceps? le voilà qui vole au secours de l'espace euro-méditerranéen, dans lequel le processus de Barcelone s'est enlisé; en mettant sur la table des dossiers bilatéraux et des dossiers liés à la région méditerranéenne, Sarkozy donne le «la» de ce qu'est sa vision des relations futures: il les inscrit dans le cadre global de la mondialisation, une mondialisation qui va au pas de charge et qui ne connaît pas de répit. Laissant sur les quais les retardataires.


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