Les discussions entre les deux présidents sont d'ores et déjà qualifiées d'”opérationnelles”. Une visite très significative pour l'avenir des deux pays. Les terrains marécageux seront évités de part et d'autre pour aller à l'essentiel. Le déplacement aujourd'hui du chef de l'Etat français à Alger, au-delà de sa campagne pour son projet pour l'union de la Méditerranée, est déjà un pas de franchi. Reste à savoir sur quoi porteront les discussions qu'Alger qualifie d'ores et déjà d'opérationnelles. La visite du président français à Alger revêt d'abord un cachet consensuel. Si les sujets divergents seront évités, une façon de voir la bouteille à moitié pleine au lieu de la voir à moitié vide, c'est dans le souci de passer aux choses concrètes afin de pouvoir avancer dans l'assainissement des relations bilatérales qui ont connu jusqu'à un passé récent des turbulences. Les deux parties ont donc décidé d'éviter les terrains marécageux, à savoir l'épineux problème lié aux thèmes de l'histoire de la colonisation et du devoir de mémoire. Si cette approche avait été de rigueur depuis la visite en octobre 2006 à Alger de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, il faudrait s'attendre à la confirmation de la nouvelle réorientation des relations bilatérales vers plus de pragmatisme. Alger voit en cette visite “un pas significatif de franchi dans les relations entre l'Algérie et la France”. Quant au choix porté sur l'Algérie, les sources proches du dossier affirment qu'en procédant de la sorte, Nicolas Sarkozy montre tout l'honneur et l'intérêt qu'il porte pour l'Algérie. Au-delà du fait que le locataire du palais de l'Elysée considère que l'Algérie est un allié stratégique dans sa nouvelle politique méditerranéenne, il entend également asseoir à travers son projet qu'il soumettra, aujourd'hui et demain, à ses interlocuteurs de l'Afrique du Nord une politique de voisinage équilibrée qui prendrait en compte les intérêts des uns et des autres comme l'a si bien fait l'ancien président du gouvernement espagnol Aznar. Une politique que son successeur le socialiste Zapatero a totalement remise en cause au profit d'un ralliement aux thèses marocaines, notamment sur la question du Sahara occidental. Sur ce dossier bien précis, Alger attend des éclaircissements, surtout que l'ambassadeur de France à Alger, M. Bernard Bajolet, avait affirmé dans une rencontre informelle avec la presse que le conflit sahraoui “n'est pas un problème majeur ni un enjeu pour la France”. Et le diplomate d'ajouter : “Sarkozy surprendra les Algériens (comme) il a déjà surpris les Français.” Et compte tenu de cette proximité récurrente et le sens de la communication entre l'Algérie et la France, peut-on ainsi considérer que le terrain est bel et bien balisé ? En clair, Alger et Paris sont aujourd'hui interpellés afin d'avoir une vision commune puisque l'avenir est commun. C'est un défi à relever aussi bien du côté français que du côté algérien, même si Alger n'a revendiqué que son droit légitime quant à la reconnaissance des crimes coloniaux commis en 132 ans d'occupation. Le président Sarkozy qui, durant la campagne électorale, a rejeté l'idée d'une repentance de la France pour son génocide perpétré en Algérie pendant la période coloniale, n'a rien dit sur le sujet depuis son investiture. Pour Bernard Bajolet, ce dossier n'est pas un obstacle à un “partenariat d'exception” entre les deux pays. D'ailleurs, ce dossier ne sera pas évoqué à l'occasion de la visite de Sarkozy en signe de la bonne volonté d'Alger d'apaiser la tension diplomatique qui a caractérisé les relations entre les deux pays ces dernières années. Mais il n'en reste pas moins que les autorités algériennes attendent des gestes forts de la part de Nicolas Sarkozy afin qu'il rétablisse la vérité sur l'histoire coloniale, comme la France a eu à le faire avec d'autres pays auparavant. Salim Tamani