La défense estime que ce procès est «de la poudre aux yeux», et que de hauts responsables de l'Etat doivent être convoqués. Le dossier du procès du séisme de Boumerdès reprend aujourd'hui. La grande salle de conférences de l'université M'hamed Bouguerra, abritera une nouvelle fois les audiences. Prévu initialement pour le 26 juin 2007, le jugement des 39 prévenus dans le dossier du séisme de mai 2003 a été reporté pour aujourd'hui, sur demande de la défense. Les avocats ont jugé nécessaire de faire appel à tous les éléments-clés dans cette affaire. Outre les accusés et la partie civile, de hauts responsables de l'Etat sont attendus aujourd'hui à la barre du tribunal correctionnel de Boumerdès. Il s'agit du président-directeur général du Centre national de construction de Birkhadem et, non moins actuel, ministre de l'Habitat, Noureddine Moussa. Celui-ci fait partie, rappelons-le, de la première commission chargée du dossier du séisme. De même, la défense a exigé la présence de l'ex-ministre de l'Habitat, Nadir Hamimid. Celui-ci était, à l'époque de la catastrophe, premier responsable du département en cause, et a donné les ordres pour l'ouverture d'une enquête sur «instruction» du chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika. A ce propos, Me Benbraham insiste sur le fait que la présence de ces deux responsables de l'Etat est primordiale. Pour cette avocate, la responsabilité est celle de l'Etat. Plus explicite, Benbraham poursuit: «L'ex-ministre de l'Habitat, M.Hamimid, était le premier à avoir déclenché l'enquête, il doit, donc répondre aux questions de la défense». «Nous voulons un Etat de droit. Nous voulons faire croire aux citoyens que nous sommes dans un Etat de droit. Cela oblige une certaine égalité face à la loi, soit on est dans le pouvoir soit en dehors du pouvoir. Donc, le témoignage de ces deux responsables de l'Etat va éclairer la justice. Nous avons besoin de leur poser des questions afin de connaître toute la vérité sur le scandale du séisme», affirme Me Benbraham à L'Expression. Et de préci-ser: «Nous ne sommes pas des hommes politiques. Nous sommes des juristes et nous sommes obligés de décortiquer le procès pour situer les responsabilités publiquement». Sans aller plus loin, l'avocate qualifie ce procès de «serpent qui mord sa queue». Une manière pour l'avocate de «responsabiliser l'Etat». D'après elle, ce procès est «de la poudre aux yeux». Elle précise que «nous sommes obligés» d'aller jusqu'au fond du problème afin de «définir les véritables coupables et ne pas incriminer, par ricochet, les innocents». A en croire la même source, beaucoup d'autres responsables de l'Etat seront convoqués. «Il y aura d'autres ministres, l'ancien chef de gouvernement et des responsables de laboratoires», qui devraient être convoqués. L'autre point qui, selon la défense, a son importance, est la nécessité d'appeler à la barre le juge d'instruction en charge de l'affaire. Cela même si le président d'audience n'a pas jugé utile de le convoquer. A noter que le juge d'instruction a établi deux rapports, l'un technique et l'autre juridique. Ce travail, considéré «colossal», lui a valu les félicitations de la défense. Ces deux rapports, volumineux, contenant 68 pages pour l'un et 92 pages pour l'autre, peuvent aider le tribunal à mieux situer les vrais coupables. Les accusés commenceront à répondre dès aujourd'hui. Ils sont poursuivis pour «homicide involontaire, blessures involontaires, négligence, fraude dans la qualité des matériaux, non-respect des normes de construction». Du côté des accusés, figurent des responsables d'entreprises de construction et de promotion immobilière publiques et privées, des architectes, des responsables de bureaux d'études, des ingénieurs, des techniciens du CTC et des chefs de chantier. Reste à savoir si le procès ne sera pas reporté une nouvelle fois. A en croire la stratégie de la défense, qui consiste à convoquer toute «une chaîne de responsables», le report est une éventualité à ne pas écarter.